Mais que se passe-t-il avec Little Devil Inside ? Voilà huit ans que le projet a été annoncé via une campagne kickstarter et il est regrettable qu’en dépit de quelques trailers vraiment réussis, dont celui de 2018 (aaaaah, ce cochon !) qui faisait furieusement envie grâce à son rythme et sa musique envoûtante, la pétoire est enrayée. Une apparition à la conférence PS5 de 2020 et au State of Play de 2021 avec une longue phase de gameplay puis, à nouveau, silence radio. D’accord, rien de nouveau sous le soleil du JV et ce ne sont certainement pas Eitr ou encore Beyond Good & Evil 2 qui diront le contraire ! Cependant, Little Devil Inside est l’allégorie du développement chaotique qui accumule les erreurs malgré l’affection qu’on souhaite porter au projet.
Récapitulons : le jeu est le premier produit du studio coréen Neostream Interactive, petite équipe constituée d’une douzaine de personnes. Lorsque ces derniers entreprennent la production de Little Devil Inside, ils se lancent dans une campagne de financement participatif, dont les objectifs seront atteints, permettant même d’envisager une version Wii U. Les planètes sont alignées : la direction artistique victorienne fait mouche, les jeux de lumière sont ravissants, la diversité et l’humour semblent même à l’épicentre de cette réalisation atypique qui semble bien partie pour débarquer en 2016. Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes et nous nous disons, un brin coquins et chambreurs, que l’indé va encore donner une leçon aux blockbusters.
Comment aurait-il pu en être autrement ? La liberté est presque palpable, le terrain de jeu plutôt consistant et les créateurs, habiles, parviennent à troquer la pauvreté de certaines textures pour opérer un choix délibéré qui contourne le froid pragmatisme de la technique. Une nouvelle preuve de talent qui porte l’étendard de David face à ces clones de Goliath, dégoulinants de marketing agressif et d’expositions récurrentes auprès de la rétine.
Fichtre, rien ne se passera comme prévu. En effet, le retard s’accumule et la communication de Neostream est à l’image d’un certain Watermelon : catastrophique à tous points de vue. Lorsqu’une déclaration est faite, celle-ci est tellement maladroite que, in fine, nous regrettons le silence habituel de la firme. Coup du sort : les gamers évitent de disjoncter et conservent ce capital sympathie pour Little Devil Inside alors que les signes de faiblesse sont clairement identifiés.
Devil et versa
Ce qui entamera paradoxalement la confiance est cette présentation pour l’arrivée de la dernière machine de la marque PlayStation, synonyme d’un partenariat permettant de brandir le spectre de l’exclusivité temporaire. Tout cela est factuel : Little Devil Inside sortira sur PS5, PS4 et ensuite sur PC. Vous aviez fait don de votre argent pour une sortie sur Wii U ? Qu’importe, la décision est prise et qui dit participation ne dit pas démocratie. Toutefois, cela a le pouvoir de nous rassurer, prouvant que le jeu est encore en vie et qu’une telle mise en avant de la part de Sony ne peut qu’être un immense gage de qualité, celui-ci étant un des fers de lance de la sortie du bois de la PlayStation 5. Il va sans dire que la bande-annonce est particulièrement efficace et que, ô surprise, les phases de gameplay montrées plus tard le seront tout autant.
Seul hic ? Après le scandale financier viennent les accusations de racisme suite à la diffusion du trailer PS5. La scène dure quelques secondes et pourtant, la polémique sera de mise au point d’obliger les membres du studio à présenter leurs excuses. Le fond de l’affaire ? Des personnages noirs similaires armés de sarbacanes et équipés de masques aux grandes lèvres. Si le jeu vidéo nous avait déjà habitués aux clichés (on en parle du semi-boss Ash de Bare Knuckle 3 ?), ici, ça ne passe pas et les créateurs prennent la foudre de plein fouet, leur forçant la main afin de modifier ces ennemis dans le respect le plus strict de la civilisation afro. Beaucoup de confusion, peu d’explications et, surtout, un nouveau mutisme total des artisans de Little Devil Inside qui semblent repartis dans leurs travers.
De facto, difficile de comprendre la stratégie mise en place ou les difficultés liées au développement tant les messages sont au mieux cryptiques, au pire contradictoires. Dorénavant, comment expliquer que les plateformes Xbox Series et Nintendo Switch soient annoncées sur le site officiel de Neostream ? Quid des investisseurs ? Seront-ils un jour agréablement surpris comme cela fut le cas avec Paprium, laissant de côté toutes ces années néfastes ou, a contrario, seront-ils les dindons de la farce sacrifiés sur l’autel du vaporware ?
À l’heure actuelle, nul ne peut le dire même si l’absence au PlayStation Showcase est un mauvais signe, d’autant plus que l’événement aurait bien eu besoin d’un coup de pouce pour briller. Partie remise, diront les plus enthousiastes. Tromperie impardonnable, diront les autres. Il ne reste plus qu’un trailer, qui paraît si lointain, pour y croire encore…
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