Entre les affaires entourant Ubisoft et Michel Ancel, et le crunch imposé aux équipes de Cyberpunk 2077, l’actualité nous montre particulièrement en ce moment à quel point le jeu vidéo est une industrie formidable pour ceux qui y travaillent… C’est au tour de Kena: Bridge of Spirits de faire parler de lui – et pas en bien – sur ces questions de conditions de travail.
Brandon Popovic, programmeur et game designer, prétend ainsi avoir joué un rôle clé dans le développement de Kena: Bridge of Spirits avant de se faire mettre « gentiment » dehors sans être payé pour la totalité de son travail. C’est le site VideoGameChronicles qui a révélé l’affaire, après avoir parlé à Popovic, mais aussi à un autre ex-employé d’Ember. Les journalistes de VGC ont aussi eu accès à des e-mails échangés entre le développeur et les studios, éloignant ainsi la possibilité d’accusations gratuites ou revanchardes…
On le sait, Kena est le premier jeu d’un studio, Ember Lab, jusqu’ici spécialisé dans l’animation. Brandon Popovic avait ainsi été embauché pour transformer un projet créé sur Unity en prototype jouable sous Unreal Engine ; un rôle clé, on l’imagine, vu la configuration particulière des studios. D’autant que d’après ses déclarations, il n’y avait pas grand-chose d’utilisable dans le projet Unity, et le jeu a dû plus ou moins être entièrement recodé de zéro.
Très impliqué dans le projet, Popovic a tenu un rôle qui allait bien au-delà de ce portage pour lequel il avait été embauché. Toujours selon le développeur, le directeur des studios, Mike Grier, appréciait son travail et se montrait particulièrement à l’écoute de ses idées. Ainsi, c’est Popovic qui aurait eu l’idée du Rot, le petit compagnon de l’héroïne, et des éléments de gameplay liés à la créature.
Mais ce n’est pas tout, ce sont aussi les contacts de Popovic dans l’industrie qui ont permis à Ember de trouver un éditeur pour leur titre.
Persuadé du potentiel du titre, Popovic a consenti à travailler pour Kena: Bridges of Spirits bien au-delà de ce pour quoi il était payé, prenant même à un moment un deuxième job, son travail sur Kena n’étant pas rémunéré assez pour lui permettre d’assumer son quotidien.
Le travail fourni par Popovic sur le jeu semblait suffisamment indispensable au développement de ce dernier pour que le développeur se voie promettre un poste au sein des studios, ainsi qu’un bonus en dollars. « Nous n’avions rien signé encore, mais on m’a promis que si je m’accrochais, un poste et un bonus suivraient », déclare Brandon Popovic à VideoGamesChonicles.
Fin 2017, Ember connaissait des soucis financiers. Popovic, toujours très dévoué au jeu, et gardant l’espoir que les promesses que le studio lui avait faites soient tenues, aurait travaillé gratuitement pour le studio à cette période. VGC précise qu’ils ont eu accès à des e-mails confirmant ces déclarations. Et c’est à ce moment qu’il reçoit un coup de fil de la direction, lui annonçant que le poste promis n’était plus à l’ordre du jour, que s’il restait jusqu’à la fin du projet, il serait effectivement payé, mais pas à la hauteur de ce qui lui avait été promis…
« Ils m’offraient la moitié de ce qui m’avait été promis, sachant pertinemment que c’était moins que ce dont j’avais besoin pour assurer mon quotidien et celui de ma famille. Ils avaient aussi retiré les parts promises dans la société, et en gros, c’était ça ou rien. »
– Brandon Popovic à VideoGamesChonicles.com
Bien entendu, le studio nie en bloc. Selon eux, Popovic n’a travaillé que quelques mois sur le jeu, sur une partie très technique uniquement. Il se serait aussi vu offrir un poste au sein des studios, qu’il aurait refusé. Et bien entendu encore, les studios se disent blessés par de telles accusations…
Popovic déclare qu’il espérait que le jeu ne sorte jamais, et que la sortie du trailer lors de l’événement PlayStation 5 l’a profondément touché.
« Honnêtement, j’ai pleuré. Le trailer que nous avions créé ensemble voilà trois ans pour la GDC était presque exactement le même que celui qu’on voyait. Et pas seulement ça, certains éléments de gameplay sur lesquels j’avais personnellement insisté étaient là, tout beaux et impeccables. »
– Brandon Popovic à VideoGamesChronicles.com
Comme souvent dans ce genre d’histoires, c’est parole contre parole. Et si ces accusations peuvent très bien venir d’un ancien employé frustré s’imaginant ne pas avoir été récompensé à la hauteur de son travail, VGC insiste sur le fait que d’autres témoignages ainsi que des e-mails dont ils ont pu prendre connaissance viennent corroborer l’histoire du développeur.
On rappelle qu’aux États-Unis, il n’existe aucun syndicat réunissant les salariés du jeu vidéo, même si des embryons d’organisations commencent à voir le jour. Il serait peut-être grand temps que l’industrie du JV connaisse l’équivalent de la « Grève des Scénaristes » de 2007 à Hollywood…
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