Il fallait avoir le nez fin pour dénicher les petites perles parmi la nuée de démos proposées lors du Steam Next Fest il y a quelques jours. Outre les gros morceaux comme Wheel World ou Haste (sur lesquels nous avons rédigé une preview) vous auriez pu tomber par hasard sur ce jeu indépendant conçu par Tim Sheinman et Ember Rose : The Deadly Path.
Prévu pour le 25 mars et supposément tarifé autour de 15 €, le titre promet un mélange des genres inattendus, une difficulté relevée et une promesse d’esthétique gore et viscérale. Pari réussi ?
(Test du jeu The Deadly Path réalisé sur PC à partir d’une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Dead dead demon
Vous incarnez le Pénitent, autrefois gardien du sanctuaire des dieux du mal, un job atrocement raté quelques millénaires plus tôt. Ainsi vous êtes chargé de la résurrection de ces immondes divinités tout en subissant leur courroux. The Deadly Path se présente par une grille de tuiles avec lesquelles vous pouvez interagir : des tuiles à creuser, d’autres sur lesquelles construire. Creuser une tuile vous ouvre le chemin vers la suite tandis que construire un bâtiment vous permettra d’en extraire les ressources, chaque construction apportant ses propres bénéfices.
La première chose qui saute aux yeux, c’est malheureusement l’aspect « jeu indépendant » qui manque clairement de polish. Ce dernier stade du développement, consacré aux finitions et à l’optimisation de l’expérience, semble avoir été négligé… Un vrai dommage compte tenu des autres qualités du titre.
Expédions rapidement les autres défauts avant de passer aux points plus positifs : la mise en route est laborieuse. L’entrée en jeu, malgré un tutoriel d’une quinzaine de minutes, reste confuse si l’on ne s’y investit pas à 100 %. Certains mécanismes essentiels ne sont introduits que bien plus tard, souvent au moment où l’on se retrouve brutalement éliminé.
La clarté n’est définitivement pas le point fort du jeu, et il faut essuyer plusieurs défaites pour obtenir des réponses à des questions pourtant basiques. Par exemple : « Est-ce que je perds si je n’ai pas assez de ressources à ce stade ? » est une interrogation que le joueur ne devrait pas avoir à se poser en pleine partie.
D’un point de vue plus subjectif, la bande-son semble quelque peu hors-sujet. Non pas qu’elle soit mauvaise, mais on s’attendrait à une ambiance sonore sombre et oppressante, avec des instruments évoquant la dark fantasy ou une touche médiévale… Or, The Deadly Path nous assaille de musique techno, un choix pour le moins déroutant.
Bloody hell
Les défauts étant évacués, si vous les trouviez rédhibitoires, vous avez sans doute déjà décroché. Maintenant, place à la surprise : The Deadly Pathest un bon jeu. Il s’attaque à un mélange de genres rarement réussi, combinant city-builder et roguelite. Si Against the Storm en est une référence récente, le titre tente une approche légèrement différente. Ici, les parties sont courtes, rythmées, l’aléatoire force à s’adapter, et le challenge est bien dosé.
Avant de plonger dans une partie, il faut choisir un dieu du mal, qui définit vos objectifs et ressources de départ, un territoire parmi les quatre disponibles (déterminant la difficulté), ainsi qu’un gardien offrant un petit bonus. Après quelques runs, vous pourrez aussi équiper des charmes, suivant une logique similaire à celle d’Hollow Knight : un budget de trois emplacements et des bonus occupant un, deux ou trois slots. Ces améliorations boostent significativement votre productivité, toujours d’une manière utile.
Une fois en jeu, l’objectif est simple en apparence : bâtir la statue de votre divinité tout en répondant aux ponctions régulières de ressources. Deux échecs, et c’est la fin. Pour éviter une mort prématurée, il faudra creuser le terrain à la manière d’un Dungeon Keeper, en espérant tomber sur des zones exploitables. Chaque tuile peut accueillir un certain nombre de bâtiments, où vous devrez assigner des ouvriers pour extraire les précieuses ressources. Ces derniers peuvent même être spécialisés pour optimiser leur rendement. Vous gagnez également de l’expérience qui va servir à améliorer vos bâtiment pendant votre partie.
L’apprentissage du jeu peut sembler un peu lourd au début, d’autant que les bulles d’informations exigent une lecture attentive, mais The Deadly Path reste élégant dans sa conception. Les cinq ressources du jeu se collectent différemment selon la divinité choisie, et en général, seules deux d’entre elles sont véritablement critiques pour gérer l’équilibre entre développement et entretien. La surpopulation se contrôle aisément grâce aux sacrifices, et le système d’invasion de héros, bien que simple, offre des affrontements efficaces et bien intégrés à l’ensemble.
Mortellement difficile
En termes de contenu, The Deadly Path oscille entre générosité et maigreur. Si les divinités offrent une diversité appréciable, elles ne sont pas toutes aussi distinctes que l’on pourrait l’espérer. Néanmoins, leur nombre permet de renouveler l’expérience. Même constat du côté des gardiens, qui proposent des alternatives intéressantes, particulièrement utiles lorsqu’un palier devient un mur infranchissable.
Et des échecs, vous en connaîtrez. Le jeu est exigeant et adore vous surprendre avec des événements imprévus : un groupe d’aventuriers trop zélé, une récolte plus abondante que prévu… Ce genre d’aléatoire maintient une tension constante dans la gestion du donjon, mais peut aussi mener à des impasses brutales. Une défaite que vous voyez arriver lentement mais qu’il vous est impossible d’éviter, c’est vite frustrant.
The Deadly Path est une tentative très convenable de city builder Rogue-like, une combinaison assez rare dans le paysage vidéoludique qui a le mérite de proposer de très courtes parties à forte intensité. C’est un jeu qu’on a régulièrement envie de relancer, plutôt un bon signe. Malgré une certaine indulgence due à la petite taille du studio, il est important de rester objectif : si le fond est solide, la forme laisse malheureusement à désirer et risque de décourager ceux qui ne sont pas prêts à s’y investir pleinement.
Pour la somme annoncé (~15€) c’est une expérience qui peut vraiment valoir le coup, il est seulement important de savoir dans quoi on met les pieds pour éviter les mauvaises surprises, comme une traduction française qui peut s’avérer hasardeuse par exemple…