À l’orée de la transition vers une nouvelle génération de consoles, Ary and the Secret of Seasons nous renvoie au début des année 2000 tant le titre indépendant, édité par Modus Games et développé par les studios eXiin et Fishing Cactus, rappelle les jeux de cette période.
Plus précisément les platformer 3D, un genre aujourd’hui un peu effacé et dont certains des plus éminents représentants (Jak and Daxter, Ratchet et Clank) avaient fait les beaux jours de la sixième génération de machines. Ary and The Secret of Seasons fera-t-il de même pour les derniers jours de cette huitième génération ?
(Test de Ary and The Secret of Seasons réalisé sur PC via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Le monde de Valdi est en péril. L’équilibre entre les saisons, qui régit l’ordre de ce monde, s’est mystérieusement déréglé. Et puisque personne d’autre ne semble prêt à résoudre cette catastrophe climatique, c’est à la jeune Aryelle, ou Ary, qu’il incombera la tâche de rétablir l’équilibre dans les quatre régions de Valdi. Débute alors pour Ary un voyage d’apprentissage riche en rencontres et péripéties, qui lui permettra peut-être de retrouver son frère disparu.
Un monde à sauver, un membre de la famille disparu, voilà un scénario qui n’a rien de révolutionnaire en plus d’être assez prévisible. C’est pourtant suffisant pour nous donner envie d’achever l’histoire principale du jeu. Surtout que celle-ci ne demandera pas plus d’une dizaine d’heures pour en voir le bout. Le monde de Valdi étant découpé en quatre « grandes » régions ouvertes, quelques quêtes annexes viendront s’ajouter à l’exploration des donjons.
Car oui, Ary and The Secret of Seasons ne s’apparente pas seulement au genre platformer 3D, mais emprunte également à la série des Zelda. Ainsi, ce sont environ six donjons que l’on sera amené à explorer, lesquels regorgent d’énigmes à résoudre, de coffres à trouver et d’ennemis à terrasser. Avec des influences aussi évidentes, le jeu de eXiin et Fishing Cactus a comme un air de déjà-vu, du moins dans sa structure.
Car il ne faudrait pas omettre le pilier central du gameplay de Ary and The Secret of Seasons : la capacité de manipuler les saisons. Ce pouvoir, se déclinant de plusieurs manières in-game, est réellement le point fort du jeu. L’utilisation principale du pouvoir des saisons est la Sphère des saisons. Cette sphère autour de Ary transforme l’espace environnant selon les caractéristiques de la saison tout en affectant également les ennemis.
Pour illustrer, prenons l’exemple de l’hiver. Activer la bulle de l’hiver fera apparaître des plateformes de glace ou des blocs nécessaires pour bloquer un interrupteur. Lors des combats, chaque sphère octroiera un avantage ou un désavantage aux adversaires. Il faudra donc s’adapter selon les situations rencontrées.
À un certain point de l’aventure, le pouvoir des sphères de saisons pourra être couplé avec l’utilisation du lance-pierres, l’unique arme à distance du jeu, permettant ainsi de projeter une sphère de saison, multipliant les possibilités.
Enfin, le pouvoir des saisons peut être également invoqué lors des combats, l’occasion de parler rapidement de la castagne. Reprenant la méthode des Zelda 3D, les combats du jeu reposent sur un système de lock, accompagné comme d’habitude du contre et de l’esquive.
À cela vient donc s’ajouter un pouvoir lié à chaque saison : l’hiver octroie des cœurs de vie supplémentaires, le printemps augmente l’agilité en combat, l’automne permet d’électrocuter nos adversaires, et enfin l’été déchaîne un anneau de feu autour d’Ary.
Activer chaque pouvoir requiert de donner quelques coups pour le charger, sans oublier d’avoir activé au préalable la sphère de saison adéquate. Un système de combat dynamique et agréable à prendre en main, qui n’est hélas pas mis en avant tant les affrontements sont peu engageants.
La faute à des ennemis peu variés et présentant un challenge minime. On essaiera bien d’augmenter la difficulté, mais la faiblesse des ennemis et surtout la sauvegarde automatique, très très fréquente, retirent au game over tout son poids. Définitivement le point faible du jeu.
Ary and the Secret of Seasons fait bien plus la part belle à l’exploration. Platformer 3D oblige, Ary est capable de sauter, grimper et nager comme toute bonne héroïne du genre. Les sauts amples et la capacité de Ary à s’accrocher aux plateformes rendent l’exploration agréable et poussent à atteindre le moindre rebord, à révéler le moindre recoin, surtout si c’est pour mettre la main sur un des nombreux coffres cachés à travers Valdi.
Si les combats forment le point faible du jeu, les puzzles en sont le point fort. C’est d’ailleurs durant ces phases que le potentiel du pouvoir des saisons ressort pleinement. Associé avec les classiques déplacements de blocs et activations d’interrupteurs, l’on obtient des puzzles fun à la difficulté justement dosée. Bon, sauf bien sûr si l’on bouffe du Zelda depuis le berceau.
De façon similaire aux puzzles, le monde de Valdi peut sembler un peu vide en comparaison au royaume d’Hyrule. Il existe pourtant bien des quêtes annexes, mais la plupart demandent seulement de récolter des objets laissés ici et là dans Valdi. Seule la quête des tours à escalader présente un véritable challenge.
En outre, les interactions avec les PNJs sont limitées et manquent d’intérêt. C’est aussi le cas de certaines zones vides (littéralement) qui viennent seulement agrandir la taille de la carte.
Néanmoins, on se retrouve rapidement dépaysé grâce à la variété des décors que l’on traverse. Le Dôme des saisons est un bâtiment véritablement impressionnant, parfait comme hub central de la carte. Mais ce sont bien les donjons qui restent les décors les plus réussis.
Ce monde a pris vie sous Unity, résultant des graphismes à l’aspect très coloré et cartoon, correspondant au ton donné dans les dialogues. Doublés pour les cinématiques majeures, les dialogues révèlent un titre plein d’humour. Un humour assez léger, même si quelques blagues méta surgissent ici et là via le personnage de Dagbann.
Malgré cette ambiance générale légère, le jeu sait se montrer sérieux dans les moments requis. Le pont entre ces différentes phases se fera grâce à la musique. Alternant musiques enchanteresses, thèmes épiques et mélodies inquiétantes, la bande original est digne d’un platformer 3D d’aventure.
Au final, tous ces composants rapprochent pas mal Ary and the Secret of Seasons d’un dessin animé jeunesse.
Ainsi, Ary and the Secret of Seasons semble se tourner vers un public assez jeune. Une caractéristique de bon nombre de platformers 3D, d’ailleurs, et qui est à l’origine de la difficulté toute relative du titre (même en difficulté maximum). Cela dit, ça n’explique pas le monde parfois vide ou les combats peu engageants. La réponse ici est en deux temps.
Premièrement, le jeu s’est construit autour de la mécanique du changement de saisons. Une idée que Sebastien Le Touze, réalisateur du jeu, avait eue sur ce qui n’était à l’époque qu’un projet réalisé sur RPG Maker. C’est donc peu surprenant que l’équipe ait plus bûché sur les phases de jeu mettant en avant cette mécanique, à savoir les puzzles. Surtout qu’au vu de sa taille, l’équipe a dû choisir quoi prioriser.
C’est évidemment une production indépendante. Le jeu possède une sacrée ambition et pourtant l’on est ni chez Naughty Dog, Insomniac Games ou même Nintendo. La production du jeu fut lancée en 2016, et jusqu’en 2018, ils n’étaient que trois à travailler dessus, puis seulement une dizaine de personnes. Bien qu’une équipe réduite ne justifie pas tout, il est nécessaire de la confronter avec le travail fourni et relativiser certaines faiblesses du titre.
Ary and the Secret of Seasons est bien tout ce qu’il prétend être, c’est-à-dire un platformer 3D empruntant également fortement à la série des Zelda. Tous les codes propres à ces deux genres se retrouvent dans le titre de eXiin et Fishing Cactus. Les mécaniques de gameplay et l’ambiance des platformers 3D des années 2000 d’une part, et la structure en donjon et les combats des jeux Zelda d’autre part.
Le jeu apporte quand même sa patte personnelle, avec le pouvoir de manipuler les saisons, ce qui demeure l’attrait principal du titre. Surtout comparé aux phases de combat peu engageantes qui déçoivent rapidement. On regrettera également un monde un peu vide parfois et des quêtes annexes manquant d’intérêt. Des reproches qui n’entachent pas pour autant le travail colossal fourni pour donner vie au monde de Valdi, surtout que l’on est face encore une fois à une œuvre indépendante.
Au final, Ary and the Secret of Seasons apportera un vent de nostalgie à ceux qui ont grandi avec les platformers 3D des cinquième et sixième générations de consoles. Les amateurs de Zelda-like l’apprécieront également, même s’ils risquent de le trouver un peu « léger ». Mais surtout, Ary and the Secret of Seasons est une excellente porte d’entrée dans le jeu vidéo en plus d’une belle porte de sortie vers l’aventure.