Transformer une laverie défraîchie en paradis du jeu d’arcade, c’est la mission que nous confie Arcade Paradise, avec la promesse de pouvoir s’adonner à la petite quarantaine de jeux dans le jeu. Mais Arcade Paradise n’est pas qu’un pastiche de compilation rétro, puisque nos heures de jeu devront être gagnées à la sueur de notre front, en travaillant.
Spoiler : le jeu n’expliquera jamais pourquoi, dans une laverie automatique, c’est à nous de faire les lessives. On aura de toute façon pas tellement le temps de se poser la question si on veut pouvoir profiter un peu des bornes…!
(Test d’Arcade Paradise sur PC réalisée via une copie commerciale du jeu)
Remettre une pièce dans la machine
Ceux qui ont connu, petits (ou moins petits), l’époque des bornes d’arcade (alors encore régulièrement appelées jeux de café…) le savent : les parties se méritaient. Il fallait d’abord avoir les précieuses pièces de 2, 5 ou 10 francs pour s’offrir les crédits nécessaires, et puis (surtout), il fallait avoir la chance d’avoir une borne près de chez soi, et qui plus est avec un jeu intéressant !
Si quelques-uns ont connu les joies des vraies salles d’arcade, pour la plupart d’entre nous, c’était dans les cafés et les fêtes foraines (par ici, on dit « la ducasse ») que cela se passait. Le choix était limité, et l’accès aux jeux rendu encore un peu plus compliqué par les files d’attente qu’il y avait souvent devant les machines (sur lesquelles on venait poser une pièce pour se réserver la partie suivante !).
Autant dire que quand on avait sous la main un grand titre comme Golden Axe ou Shadow Dancer, on savait en apprécier chaque instant !
La passion pour le jeu d’arcade tenait autant à la satisfaction (de découvrir un grand jeu, d’avoir accès à telle ou telle borne, de réussir une bonne partie, de noter les trois lettres de son prénom sur le tableau des high scores…) qu’à la frustration (de ne plus avoir accès au jeu une fois les vacances finies ; d’être face à un jeu injuste seulement bon à avaler nos pièces ; de ne pas avoir pu jouer, la borne ayant été squattée par des « grands » ; de ne plus avoir assez de pièces pour continuer, ou d’avoir perdu trop vite…).
Un sentiment que réussit parfaitement à retranscrire Arcade Paradise grâce à un truchement scénaristique qui ajoute une condition pour toucher aux bornes in game : pour jouer, il va falloir travailler !
Ne pas dépasser les bornes
Car dans le jeu, on gèrera avant tout une laverie, et pas une salle d’arcade ! C’est dans l’arrière-boutique du commerce qu’on découvrira quelques vieilles bornes, ce qui nous donnera l’idée de transformer la laverie en salle de jeux.
Un projet qui demandera un certain budget, d’où l’obligation de travailler et de faire tourner la laverie. Notre temps se décomposera alors entre les tâches à réaliser à la laverie (lancer des machines, mettre le linge dans le sèche-linge, mais aussi nettoyer le local ou déboucher les toilettes…), et les (toujours trop courtes) parties de jeu vidéo.
Bien entendu, on pourra toujours passer plus de temps à jouer qu’à travailler, mais cela signifie aussi un business qui tourne au ralenti, et donc progresser plus lentement, et ne pas être en mesure de s’offrir les tant convoitées nouvelles machines…
Work hard, play hard
Le débat qu’on aura alors avec nous-même rejoindra un débat que le monde du jeu vidéo ressort régulièrement : « un jeu doit-il nécessairement être amusant ? ».
Et on pensera à tous ces jeux qui viennent simuler le travail ou l’ennui, et deviennent à leur tour (et en toute cohérence) pénibles ou ennuyeux. Souvenez-vous de la phase sur les docks, dans Shenmue premier du nom, quand il fallait passer ses journées à manipuler les petits chariots élévateurs… On pense aussi à Mosaic, un jeu sur le drame de la routine qui évoquera l’ennui… en étant ennuyeux. Une prise de position un peu casse-gueule qui n’aura pas tout à fait convaincu.
Les phases de travail dans Arcade Paradise sont répétitives, et pas franchement intéressantes. D’autant qu’elles sont peu nombreuses et pas très variées. Alors elles rendent les phases de jeu d’arcade précieuses, et en ce sens, c’est une réussite. Mais elles constituent aussi une part importante de gameplay, et peuvent finir par lasser le joueur et finalement nous éloigner du jeu. Équilibre instable…
I’m game
La collection de jeux d’arcade est, par contre, une vraie réussite. Les jeux sont originaux, tout en citant les grands classiques, et ne sont jamais de simples clones de jeux célèbres. Chacun aura à chaque fois une petite touche d’originalité en plus, une couche de gameplay supplémentaire qui rafraîchira l’expérience.
Si elles restent très rétro, les expériences sont diverses et quand certains jeux restent très classiques, d’autres se montrent vraiment malins et accrocheurs. Suffisamment pour qu’on veuille en finir au plus vite avec les corvées, pour pouvoir reprendre rapidement sa partie… Un sentiment qu’on retrouvera aussi IRL !
Arcade Paradise tient ses promesses et réussit à retranscrire, non sans un brin de nostalgie, ce que c’était de jouer sur borne d’arcade, à l’époque. Le temps de jeu était limité, et les parties d’autant plus précieuses. Le titre rend bien le côté pénible des corvées, là encore en soulignant d’autant plus le plaisir des jeux, quand il nous laisse y accéder.
Cependant, c’est cette réussite dans la forme qui est aussi son plus gros défaut. La pénibilité du job à la laverie est elle aussi bien retranscrite, et un peu repoussoir. On a parfois envie de jouer pour s’amuser tout court, et ce n’est pas exactement la proposition du jeu. Il faut néanmoins souligner la qualité de la collection de jeux d’arcade, à la fois classiques et inventifs, qui vaut à elle seule d’aller jeter un œil au titre !