Rematch, c’est clairement le tube du moment. En passant du kung-fu millimétré au jeu de football multijoueurs résolument arcade, le studio français Sloclap a fait le choix du grand écart, et bien lui en a pris, au moins d’un point de vue comptable. Aujourd’hui, plus d’un million de joueurs se sont déjà affrontés dans des matchs au rythme effréné, et le plus fort, c’est que même des personnes pas forcément intéressées par le football sont tombées sous le charme du titre.
Malgré tout, si Rematch a clairement de nombreux atouts dans sa manche, est-il taillé pour s’installer durablement sur la scène multijoueurs ? Surtout, comme nous l’avions présenté lors d’un précédent article, n’est-il pas sorti un peu trop tôt ? Après de nombreuses heures de jeu, notre test.
(Test de Rematch effectué sur Playstation 5 à partir d’une copie fournie par l’éditeur)
Goal Volant
Un concept innovant et fun suffit-il pour créer un bon jeu ? Une chose est sûre, Rematch coche les deux premières cases. Le pitch est simple, mais en fait malgré tout un OVNI dans le paysage vidéoludique actuel. Vous incarnez un joueur de football dans des rencontres en 3vs3, 4vs4 ou 5vs5, tous uniquement contrôlés par des utilisateurs. Mais attention, ici, pas de prise de vue en mode télévision comme dans EA Sports FC, mais une caméra à la troisième personne qui suit uniquement votre joueur, comme dans un jeu d’action, dans un univers au style cartoon qui n’est pas sans rappeler l’esprit du dessin animé Foot 2 rue, ou d’un certain Sifu…tiens tiens.
Une fois le mini-tutoriel terminé, l’entrée dans le grand bain est immédiate. Et là, bienvenue dans une véritable cour de récréation. Tous les marqueurs du football de l’école sont présents. Ici, pas de fautes (malgré de bons gros tacles glissés), pas de hors-jeu, pas de touches (les terrains sont entourés de vitres/écrans permettant des combos détonants), et surtout, pas de postes définis. En fonction de votre positionnement sur le terrain, vous deviendrez instantanément gardien, libéro ou attaquant, changeant par la même les caractéristiques et compétences de votre joueur. C’est hyper fluide, et amène à des rencontres complétement débridées.
Et le charme opère très rapidement. Les buts et gestes techniques surréalistes s’enchainent, et on se prend rapidement à vouloir devenir le héros de l’équipe, que ce soit par ses arrêts décisifs ou ses actions offensives d’éclat. Les rencontres de six minutes sont sans temps morts, hormis quelques courts ralentis, et une fois la prise en main adoptée, les rencontres s’enchainent à vitesse grand V. On ne compte plus le nombres de matchs que l’on a pu enchainer sur certaines sessions, preuve que la première mission de Rematch est accomplie: fidéliser une communauté grâce à un gameplay arcade débridé. Et ce malgré de nombreux manques à côté.
Place à l’action
Le plaisir de jeu est énorme, et Rematch réussit un véritable tour de force: proposer un jeu de football sans prise de tête, et accessible à tous. Pas besoin de maitriser parfaitement sa manette ou son clavier pour s’amuser, les contrôles sont simples d’accès. Comme nous le disions dans l’introduction, après le très difficile et exigeant Sifu, Sloclap a complétement changé son fusil d’épaule. Ici, on se retrouve face un jeu aux mécaniques simplistes, mais aux possibilités quasi infinies. Attention toutefois, le jeu reste encore très brut, et pourra s’avérer frustrant pour les adeptes de la précision, tant viser juste est difficile dans le feu de l’action.
Le titre nous ramène aux fondamentaux du football, et ça fait du bien. Exit la tactique, le plaisir réside avant tout dans l’action et les nombreuses possibilités d’apporter une pierre à l’édifice collectif grâce à ses actions individuelles. Serez-vous le défenseur dernier rempart, le gardien infranchissable, ou l’attaquant qui campe dans la surface adverse en attente d’un bon ballon ? Tout est possible, et vous pouvez rapidement devenir le héros.
À l’image de ce qu’a pu apporter un Rocket League à ses débuts, Rematch amène un vrai vent de fraicheur dans le paysage vidéoludique sportif multijoueurs. Et comme son ainé, avec qui il partage de nombreuses caractéristiques, le potentiel pour l’Esport semble infini (et savamment calculé). Et à l’heure où nous écrivons ces lignes, le public semble conquis. Les parties s’enchainent rapidement, et le matchmaking est efficace, même si on regrettera l’absence de crossplay au lancement du titre.
Quel futur pour Rematch ?
Mais attention, chers amateurs de football léché, vous pourriez toutefois être forts déçus. Car dans tout jeu multijoueur, le plaisir que l’on prend à jouer ne dépend pas que de nous, mais aussi du comportement des autres joueurs. Et en fonction des équipiers que les serveurs vous attribueront aléatoirement, vous n’êtes pas à l’abri de vivre quelques matchs calvaires.
Comme souvent, certains joueurs préféreront toujours tirer la couverture à eux plutôt que de privilégier le collectif. En résultent alors des runs en solo, à vouloir dribbler tout le monde, afin de marquer le plus de buts possibles. Et pour un peu que vous en ayez deux comme cela dans votre équipe, le fun en prend rapidement un coup.
Pour pallier à cela, Rematch propose toutefois un système d’endurance simpliste, mais terriblement efficace. En position d’attaque, les joueurs perdent plus rapidement leur barre d’endurance, et sont ainsi plus facilement arrêtables par la défense. Un bon point qui permet de limiter les comportements de solistes.
À l’heure où nous écrivons ces lignes, de nombreux joueurs ont déjà trouvé quelques failles dans le système de jeu de Rematch. L’action la plus simple pour marquer un but est de frapper le plus fort possible sur la vitre au dessus du but, afin qu’un équipier puisse reprendre la balle de volée à la retombée. Cela engendre des buts magnifiques, et la sensation de voir la balle revenir sur nous est hyper grisante.
Toutefois, se pose la question de l’évolution du gameplay sur la durée. Car si Sloclap ne remédie pas rapidement à la situation, en proposant de nouveaux gestes techniques offensifs ou des moyens de défendre un peu plus précis, nous ne sommes pas à l’abri que les matchs deviennent tous des copié-collé dans un futur proche. Or, dans l’optique d’un projet Esport à moyen-terme, c’est l’une des pires choses qui pourrait arriver au studio.
Un accès anticipé au prix fort ?
Vous l’aurez compris, difficile de ne pas tomber sous le charme de Rematch. Et pourtant, nous nous devons d’être honnêtes, le jeu souffre encore de nombreux manques, selon nous indignes d’un jeu proposé au prix de vingt-cinq euros. Le menu d’accueil ne propose que des matchs en ligne, sans aucun autre mode de jeu. Seuls quelques rares exercices d’entrainement loin d’être passionnants tentent d’égayer ce paysage.
Aucun mode hors ligne contre des bots n’est pas exemple proposé, et même si l’absence de cross-play devrait être résolue avant la fin de l’année, cela fait tâche. Dès l’arrivée sur la home page, un QR code permet à chacun de donner ses feedbacks sur le jeu pour une amélioration future. Une fonctionnalité louable, mais qui donne la désagréable impression qu’on nous vend un énième jeu en early-access au prix fort, et non un jeu fini.
Surtout, nous suivrons avec attention les améliorations apportées au titre dans un futur proche. Car si le buzz est actuellement réel, Rematch risque rapidement de se retrouver à la croisée des chemins, face à un véritable dilemme: rester simple pour continuer d’attirer du monde, ou se complexifier et se diversifier pour se donner le droit de survivre sur la durée ? Une chose est sûre, une fois la saison 1 en cours terminée, des mises à jour importantes devraient avoir lieu, sous peine de rapidement tourner en rond.
Rematch est un véritable OVNI vidéoludique. Et force est de constater que le potentiel est énorme. Après quelques heures de jeu, il est devenu de plus en plus difficile de poser la manette (le syndrome du « allez un petit dernier pour la route »). Le jeu porte parfaitement son nom, tant il est difficile de ne pas relancer une nouvelle rencontre dès le coup de sifflet final. Et au vu de la vitesse du matchmaking, nous ne sommes clairement pas les seuls.
Toutefois, le titre pourra s’avérer frustrant sur la durée, car en voulant se baser sur un gameplay simple, le studio Sloclap a aussi pris le risque de proposer un jeu répétitif. Nous attendrons avec impatience la suite d’une aventure qui s’annonce déjà très longue, croisant les doigts pour que les prochaines étapes règlent les nombreux manques, sans aucun doute dû à un lancement précipité. C’est dommage, mais franchement, on s’est tellement amusé qu’on n’en tiendra pas forcément rigueur si le job est fait par la suite. Allez, on vous laisse, c’est bientôt le coup d’envoi, on y retourne.