Bien que désormais assez installée dans le paysage vidéoludique, avec des efforts qui ont été faits du côté d’une relative accessibilité, la réalité virtuelle a un peu de mal à décoller. Certains titres ont réussi à devenir des incontournables, Beat Saber en tête – seul et unique million seller en VR, depuis poursuivi par d’innombrables clones. On pense aussi à l’exceptionnel Moss, à la géniale exclu PSVR Astrobot, ou au premier vrai blockbuster pour les casques VR, Half-Life: Alyx. Cependant, on aura un peu de mal à trouver un vrai bon titre pour chaque centaine d’euros que nous a coûté le matériel. L’arrivée d’un titre comme Pixel Ripped 1995 apporte alors un vrai vent de fraicheur dans un catalogue un peu famélique. Suffisant pour nous convaincre ?
(Test de Pixel Ripped 1995 réalisé sur PC via une copie commerciale du jeu)
1995.
Le groupe du rappeur Nekfeu avait fait de cette date son blase (ça se dit encore, blase ?), considérant que c’était la meilleure année de l’histoire du rap. Concernant les jeux vidéo, 1995 n’est peut-être pas la meilleure année de tous les temps (il paraît que c’est 1998), mais c’est définitivement une année charnière. Certains des derniers gros, gros, hits 2D sortent cette année-là : Chrono Trigger, Comix Zone, Worms, un certain Trials of Mana, Rayman… Mais la 3D commence à s’imposer. C’est l’année de la sortie de la tempête WipeOut.
Une révolution portée par de nouvelles machines qui arrivent aussi en 1995 : la Saturn de SEGA, le bizarroïde Virtual Boy de Nintendo, et surtout la PlayStation de Sony. Cette (r)évolution, c’est celle que nous propose de revivre Pixel Ripped 1995.
Avatars
Pour nous faire voyager dans ce passé vidéoludique, Pixel Ripped 1995 nous mettra tour à tour dans la peau de deux personnages. D’abord, Dot, une héroïne de jeux vidéo qui cite assez directement Samus Aran (le personnage principal de Metroid) dont le monde pixelisé est en danger et qui partira en quête d’un joueur assez doué pour lui venir en aide.
Le joueur en question sera le deuxième personnage qu’on incarne, un petit garçon de neuf ans, passionné par les jeux vidéo, qui doit, pour pouvoir jouer, constamment lutter avec sa mère qui est persuadée que ces derniers rendent stupides. Les univers des deux personnages vont se rencontrer, et des événements extraordinaires se produiront…
Ainsi, si on débute l’aventure casque VR sur la tête, immergé dans un univers de pixels (la sensation est assez saisissante !), on prendra rapidement la place de David, ce jeune héros installé devant la télé du salon, manette en main.
Rétrogaming
Si une partie du gameplay de Pixel Ripped 1995 est constituée d’une expérience rétrogaming, le jeu réussit à ajouter une touche de fun en tirant parti de son scénario et du fait qu’il se joue en VR. Il faudra en permanence jouer au jeu proposé tout en ayant toujours quelque chose à faire en dehors de l’écran.
Ainsi, pendant le premier niveau, on joue un Zelda-like sur la télé, tout en entendant râler la maman, qui trouve que « ça fait des heures qu’on est sur ce truc », et qu’on « ferait bien d’aller prendre l’air, le temps est magnifique », bla bla bla. Devant notre manque de coopération manifeste, elle menacera de débrancher la console. Il nous faudra alors ruser, et utiliser un jouet, un pistolet, pour tirer dans des éléments de la pièces (la boite à cookies, des boites empilées sur le frigo, la chaîne hi-fi pour la mettre en route et la faire hurler, etc.) afin de détourner l’attention de la maman, de l’obliger à aller régler les problèmes ainsi causés, ce qui nous fait gagner un précieux temps de jeu.
Dans le même esprit, dans un niveau suivant, on n’aura pas le droit de jouer la nuit (normal !), il faudra donc ruser pour jouer en cachette. Un œil sur la télé cathodique, on joue à un Castlevania-like, l’autre œil sur la porte de la chambre, où l’on guette la lumière qui s’allume quand notre maman nous entend jouer en cachette. Il faut alors saisir rapidement la télécommande de la télé pour l’éteindre, attendre que maman se rendorme pour reprendre la partie…
Enfin, les deux univers se rencontreront réellement à divers moments du jeu, offrant des tableaux très réussis de jeux vidéo qui prennent vie dans l’espace quotidien du jeune héros : une attaque de dragon dans son salon, un versus fighting « pour de vrai » au milieu d’une salle d’arcade…
Citations
Pour nous remettre dans l’époque, Pixel Ripped 1995 nous fait rejouer aux genres phares et aux titres qui ont marqué l’époque. Parmi les jeux plus ou moins directement cités (sans que jamais les véritables licences n’apparaissent, pour des soucis de droits, évidemment), on retrouve ainsi Zelda, Sonic, Streets of Rage, on a déjà parlé de Metroid et Castlevania, on reconnaît aussi Road Rash ou les combattants digitalisés (comme on disait à l’époque) de Mortal Kombat.
On visitera une salle d’arcade, un magasin de jeux vidéo, dans lequel on assistera à une dispute entre deux enfants qui nous referont vivre la rivalité SEGA/Nintendo. On verra passer entre nos mains plusieurs machines, évoquant les machines reines de l’ère 16 bits, mais aussi le 32X ou, graal de l’époque, la PlayStation.
Pas de pétrole, mais des idées
Si le jeu est de manière générale plutôt réussi, il faut toutefois évoquer les quelques défauts qu’on peut regretter. Comme souvent en VR, l’aventure est relativement courte, et se boucle en 3h. Le jeu est d’ailleurs assez facile. Réalisé et édité en indépendant par le studio brésilien Arvore, Pixel Ripped 1995 n’a bien entendu pas bénéficié du budget luxueux d’un Half Life: Alyx. En résultent certaines collisions maladroites, une gestion des mains de l’avatar pas toujours très juste…
Le titre reste cependant l’un des jeux le plus frais qu’il nous a été donné de tester en VR depuis un certain temps. Un vrai moment de fun, d’excellentes idées de game design… Certains tableaux sont graphiquement très réussis, mêlant à merveille le rétrogaming et des environnements plus modernes, et la VR est particulièrement bien mise à contribution du gameplay, en nous proposant des mécaniques de jeu à la fois à l’intérieur des jeux joués par le héros et à l’extérieur de l’écran. La musique est elle aussi très réussie.
Peut-être un tout petit peu cher vis-à-vis de sa durée de vie, le jeu coûte un peu moins de 20€ sur Steam et est compatible avec tous les casques VR PC, mais également avec Occulus Quest et dès le 19 mai prochain sur PSVR.
Bonne surprise et petit coup de cœur pour ce Pixel Ripped 1995, qui respire l’amour du jeu vidéo et propose enfin quelque chose d’original et réussi en VR, au milieu d’une jungle de jeux de rythme courants après une part du gâteau Beat Saber. Un vrai voyage au pays des pixels et quelques très jolis tableaux nous font regretter une aventure un peu courte, mais qui a le mérite de ne pas trop se répéter, et de ne jamais nous ennuyer. À noter que le même développeur propose également Pixel Ripped 1989 sur le même principe.