Depuis le premier épisode d’Hyrule Warriors sur Wii U en 2014 jusqu’à aujourd’hui avec Persona 5 Strikers, Omega Force a trouvé une voie particulièrement habile pour inonder le monde de sa recette mûso, sans pour autant nous ressortir les éternels Dynasty Warriors ou autre Samurai Warriors. En s’employant à trouver comment adapter son action décomplexée à des univers déjà très marqués, le studio s’est vu gagner en assurance et en créativité, une créativité découlant comme bien souvent d’une multitude de contraintes qui, dans ce cas précis, découlent directement de l’univers devant être adapté.
Pour autant, malgré une recette faisant mouche régulièrement, suivant les licences, il faut bien avouer que quelques titres n’auront au final rien eu de transcendant, et pour ne citer qu’eux, nous pouvons bien entendu parler des derniers One Piece: Pirate Warriors. La recette étant donc pertinente, mais le résultat pas toujours très intéressant, il est maintenant temps de voir si Omega Force a eu les épaules assez solides pour s’attaquer à Persona 5, l’un des titres les plus mémorables de ces dix dernières années.
(Test de Persona 5 Strikers sur PS4/PS5 réalisé à partir d’une version fournie par l’éditeur)
Persona 5 Strikers fait renaître les Voleurs Fantômes de leurs cendres
Si cet opus est l’œuvre d’Omega Force, il ne faut pour autant pas le prendre pour un spin-off qui s’écarterait de la trame principale. Bien au contraire, Persona 5 Strikers nous propulse six mois après les derniers événements de Persona 5, nous plongeant la tête la première dans une suite directe. Alors que les Voleurs Fantômes en avaient finalement terminé avec le Metaverse, voilà que ce dernier se manifeste à nouveau par le biais d’EMMA, la toute dernière application d’assistance virtuelle en vogue. C’est lors d’une petite promenade au cœur de Shibuya que les choses ont soudainement dérapé, nous conduisant à la rencontre d’un nouveau personnage qui rejoindra rapidement notre petit groupe de justiciers.
L’introduction de ce nouveau personnage, dont nous vous laisserons découvrir le twist scénaristique par vous-même, saura être une sorte de phare guidant les nouveaux joueurs dans la brume épaisse de l’univers de Persona 5. Car ne l’oublions pas, le jeu est une suite directe, qui part souvent du principe que vous avez déjà fait le J-RPG précédent. Le souci, c’est que pour les amoureux d’action qui n’auraient pas eu le courage de faire le jeu de base, il fallait bien trouver une solution pour qu’ils ne soient pas trop perdus. C’est là qu’entre en jeu le nouveau personnage, à qui les Voleurs Fantômes devront régulièrement expliquer les tenants et les aboutissants de leurs actions. Globalement, cela s’insère très bien dans les dialogues, les néophytes ne seront donc pas entièrement largués, et les habitués ne trouveront pas ce gimmick trop redondant.
Quoi qu’il en soit, cela va surtout se voir dans les premières heures, avant que le jeu ne vous lâche complètement dans le grand bain, et que vous puissiez enfin apprécier le nouveau scénario avec les clés nécessaires à sa compréhension. Du côté de la trame narrative, même si Omega Force a dû faire des concessions, on sent bien qu’il a compris où se trouvait toute la saveur de Persona 5. C’est donc avec joie que nous avons retrouvé dans Persona 5 Strikers une qualité certaine en ce qui concerne l’écriture des dialogues. Toujours aussi posés, laissant respirer les personnages en leur permettant de s’exprimer sur des sujets qui peuvent parfois sembler inutiles, mais qui participent à l’immersion et à l’attachement à ces derniers.
Cependant, et c’est là que le studio a dû faire des concessions afin de se concentrer sur l’action, vous devrez vous contenter d’interactions sociales beaucoup plus limitées. On laisse donc de côté les sessions de vagabondage dans la ville afin de renforcer nos relations, et on se concentre sur les combats et l’histoire. Et en même temps avec la trentaine d’heures de jeu réglementaires pour ce type de titre, il restait fatalement peu de place pour autre chose. Mais encore une fois, le jeu réussit à offrir une expérience très bien rythmée, dont on ressort avec le sentiment du « ni trop, ni trop peu ».
On retrouve donc dans Persona 5 Strikers toute la beauté de l’univers auquel nous avions consacré pas loin de 200 heures de jeu par le passé, et ça fait un bien fou. Qu’il s’agisse des personnages, des lieux, de l’atmosphère, ou de cette OST de rêve, le jeu a su reproduire à la perfection le charme du jeu d’origine, et nous renvoyer en pleine face toutes ces émotions éprouvées auparavant. Malheureusement, tout n’est pas aussi rose quand on se penche sur le gameplay, mais vous allez voir que globalement, il y a de quoi s’offrir une bonne dose de fun grâce au système de combat.
Des combats jouissifs, mais brouillons malgré tout
Avec un jeu d’action, il était certain que nous devrions à un moment donné aborder le cœur des choses, à savoir le gameplay. Car Persona 5 est peut-être le J-RPG le plus abouti auquel nous n’ayons jamais touché en termes de développement de personnage, mais il est aussi un sacré client en ce qui concerne son gameplay au tour par tour. Persona 5 Strikers allait donc avoir fort à faire pour réussir à nous offrir quelque chose permettant de garder tout le sel du système d’origine.
Après quelques tutoriels nous expliquant comment jouer durant les combats, il faut bien avouer que nous avons trouvé le résultat vraiment convaincant. On retrouve donc une formation à quatre personnages, un sous votre contrôle, les autres gérés par l’IA, et vous n’aurez qu’à presser une touche pour passer de l’un à l’autre. On est donc sur du classique permettant d’être assez réactif, et réactif, vous allez devoir l’être, car mine de rien, l’IA n’est pas ce qu’on a connu de meilleur.
Lorsque vous serez au contrôle d’un personnage, vous aurez comme dans le jeu d’origine accès à vos personas et pourrez utiliser leurs compétences dans la limite de vos points de « mana » restant. Le système est assez intuitif, le temps se fige alors pour vous laisser choisir votre persona ou sélectionner la compétence voulue, et reprend son cours dès lors que vous validez l’action. À côté de ça, vous allez pouvoir vous battre en temps réel avec vos armes plus classiques, et vous faire plaisir avec les combos uniques et attaques spéciales de chaque personnage. Simple et efficace, c’est du fun instantané, et on fonce dans le tas sans réfléchir jusqu’à avoir décimé tous les opposants. Visuellement, on en prend plein les yeux, et sur PS5, même en optant pour une résolution supérieure, la fluidité ne s’en voit impactée à aucun moment.
Malheureusement, si le système de combat a tous les atouts pour séduire son public, il ne réussit pas le carton plein à cause de certains soucis parfois assez gênants. Tout d’abord, qui dit RPG au départ, dit aussi multiplication des éléments (glace, feu, etc.), des altérations (sommeil, folie, etc.), et il est souvent difficile de repérer visuellement quelles sont les faiblesses de l’ennemi, ou par quoi notre personnage est affecté. Aussi, la courbe de difficulté nous a semblé très aléatoire, alternant entre des combats plutôt aisés, et d’autres vraiment compliqués à gérer, notamment à cause de l’IA régulièrement aux fraises.
Enfin, nous terminerons sur la progression au travers des niveaux du Metaverse qui, contrairement au jeu d’origine, peinent à totalement convaincre sur la longueur. C’est avant tout le level design qui manque de profondeur, et malgré quelques efforts pour tenter de nous faire réfléchir, il faut bien avouer que le tout chancelle plus d’une fois durant l’aventure. Alors attention, on n’est pas sur une catastrophe, mais la progression est régulièrement sans surprise, et nous avançons bien souvent un peu trop au rythme du « GPS » durant nos infiltrations.
Persona 5 Strikers n’était vraiment pas à l’abri d’être l’une des erreurs de parcours signées Omega Force, mais au final, c’est un pari relevé avec panache qui vient de nous passer entre les mains. Qu’il s’agisse de l’univers, de l’esthétique, des personnages ou encore de la musique, le studio a assuré avec un respect total de l’œuvre d’origine. On y a perdu au passage tout le développement autour de l’aspect social, une concession bien mince quand on voit la qualité générale du jeu.
Le gameplay, quant à lui, bénéficie du même soin que le reste, et l’approche action dans l’univers de Persona est tout simplement grisante. Encore une fois, tous les éléments sont ici bien à leur place, et le mélange parvient durant près de trente heures à nous offrir un fun incisif à l’image de ce que nous pouvons retrouver dans les grandes adaptations musô d’Omega Force.
Cependant, tout n’est pas parfait et l’on retrouve quelques errances dans le gameplay, notamment dues au fait qu’il y avait énormément de choses à combiner pour respecter le matériau d’origine. À vouloir tout nous offrir sur un plateau, le jeu s’en retrouve parfois un peu brouillon, sans parler de son level design souvent trop classique et de son IA décevante. Enfin, même si le jeu fait l’effort de s’adapter aux néophytes pour qu’ils ne soient pas trop perdus dans cette suite directe, c’est avant tout les fans qui sauront le mieux l’apprécier. Et pour eux, Persona 5 Strikers est tout simplement le meilleur cadeau qu’ils pouvaient espérer pour clôturer l’aventure des Voleurs Fantômes.