Pour commencer, nous allons répondre aux trois questions les plus insistantes que se posent les joueurs ayant « essayé Monster Hunter » auparavant et n’ayant pas aimé ce Monster Hunter: World. Oui, le but est toujours de chasser des monstres. Oui, le jeu est encore rempli de menus innombrables et difficiles à analyser. Et oui, ce jeu vous permet d’être le meilleur ami d’un chat.
Cela veut-il dire que les personnes n’ayant jamais réussi à accrocher à Monster Hunter ou pire, celles qui n’y ont jamais touché, devraient tout bonnement passer leur chemin sur ce nouvel opus ? Monster Hunter: World est un défi, aussi bien pour les nouveaux joueurs que pour les développeurs. Cantonnée dans sa zone de confort, la série a très peu évolué depuis l’épisode Monster Hunter Tri sur Wii en 2010. Capcom tente de tout faire pour rendre la série le plus accessible possible sans pour autant perdre son identité. Les vétérans comme les novices peuvent-ils enfin prendre du plaisir tous ensemble sur Monster Hunter: World ?
Le charme de la chasse
La franchise Monster Hunter est connue pour repousser les nouveaux joueurs. Aimer Monster Hunter, dans l’esprit de certains joueurs, est semblable à aimer le ski de fond ou à regarder le Tour de France tout un dimanche. Vous admirez les gens qui le font, mais vous soupçonnez aussi qu’ils pourraient être des masochistes implacables. À ce titre, Monster Hunter: World est un jeu conçu pour être plus attirant que ses prédécesseurs, et, pour beaucoup de gens, la première incarnation moderne d’une franchise qui n’a pas énormément bougé depuis sa naissance en 2004 sur PlayStation 2.
Monster Hunter: World n’est pas un jeu facile, mais pas insurmontable pour autant. Il possède encore une surcouche d’un système complexe et demande toujours à ses joueurs d’investir du temps et des connaissances. Mais ce nouvel épisode n’a pas franchi les limites les plus ésotériques de la franchise. Vous passerez plus de temps à lutter contre des monstres que contre des systèmes de contrôle archaïques.
Malgré toute sa complexité, le but d’un Monster Hunter est tout entier dans le titre : vous chassez des monstres. Votre chasseur (ou chasseresse), personnalisé(e) grâce à un créateur de personnage robuste, commence le jeu en voyageant vers un nouveau monde rempli d’un écosystème magnifique et luxuriant, grouillant de créatures grandes et petites (bien que généralement juste gigantesques et très agressives).
Votre ennemi principal est le Dragon Ancien, le Zorah Magdaros, une bête mi-monstre, mi-volcan, incrustée de magma et de la taille d’un gratte-ciel. Obtenir une occasion de l’abattre signifie décimer une ménagerie de monstres, chacun distinct et magnifiquement caractérisé, en accumulant progressivement les compétences et l’équipement nécessaire pour une bataille épique.
L’histoire du jeu, articulée sur les mouvements du Zorah Magdaros, est d’un intérêt mineur. Une motivation minime pour vous aider à aller de l’avant. Peu importe. Il y a beaucoup de choses et de personnages à découvrir dans les sections civilisées. Votre chasseur sera accompagné par deux compagnons de route. D’abord, vous avez votre assistante personnelle. Son rôle est de vous donner les informations utiles dans votre quête. Elle est surtout présente lors des missions liées à l’histoire. Le second personnage qui vous suit est bien plus important. Il s’agit de votre Palico. Un Palico kesako ? C’est un Félyne, apprivoisé. Entre autre, c’est un chat qui participe avec vous au massacre de monstres. Tout comme vous, il a besoin d’une arme et d’une armure. Customisable aussi à partir des monstres chassés. Un Palico est un soutien non négligeable dans votre chasse. Il est d’autant plus mémorable grâce à ses calembours liés aux chats. Mais ce qui vous marquera le plus, ce sont les monstres, les véritables pièces maîtresses de ce Monster Hunter: World.
Un monde vivant
Monster Hunter: World permet astucieusement à ses bêtes fabuleuses de prendre le devant de la scène, ne laissant jamais l’histoire comme un bête tutoriel. Chaque monstre, à partir du moment où vous le repérez pour la première fois dans une clairière, jusqu’au point où vous avez transformé ses parties corporelles en armure spectaculaire, se distingue grâce à des conceptions visuelles uniques. Les animations des monstres ont toujours été un point fort dans la série et Monster Hunter: World va encore plus loin.
Comme le sous-entend le sous-titre « World », pour la première fois, la scène de chasse est passée d’une carte fragmentée en blocs à un monde cohérent et ouvert, le rythme du jeu devenant plus compact et dynamique. Les paramètres de zonage sont toujours conservés dans Monster Hunter: World, mais les frontières qui relient les différentes zones ne sont plus les quelques secondes de chargement, mais plutôt des tunnels étroits, des rivières qui déferlent, des falaises abruptes, de magnifiques cascades, etc. Cette conception embrasse non seulement le monde sans coupure de Monster Hunter, mais assure également l’harmonie écologique dans toutes les régions (dans la mesure du possible).
Le jeu offre actuellement plusieurs cartes, dont la taille n’est pas particulièrement grande, mais les détails sont étonnamment riches. Presque chaque centimètre de terre, chaque plaine, chaque caverne, chaque arbre géant est utilisable dans votre chasse, collecte ou exploration. Monster Hunter: World est également doté d’un sens impressionnant de l’espace et de la 3D.
Bien sûr, avec les puissantes caractéristiques matérielles de la PlayStation 4 et de la Xbox One (par opposition à la Nintendo 3DS), l’effet visuel de ce travail a atteint un sommet. Le détail de la modélisation des monstres est incroyable, chaque centimètre de peau, chaque caractéristique, même les extrémités brisées révélant les détails internes du corps sont parfaitement visibles. Le bel environnement qu’offre les différentes régions peut détourner votre esprit de la chasse. Que ce soit des forêts luxuriantes, des hauteurs et profondeurs de la friche, des gorges ou des plateformes de corail fleuri de cerisiers japonais, chaque centimètre carré de la topographie de l’environnement est une merveille pour les yeux. Le dépaysement est total d’une carte à l’autre.
La chaîne alimentaire de la jungle, entre l’écosystème complet et les monstres, a longtemps été une caractéristique de la série Monster Hunter, mais cette caractéristique est particulièrement frappante dans ce travail. Dans Monster Hunter: World, de gros monstres s’entretuent souvent en plus de s’attaquer à de petits monstres. Le fait d’avoir des cartes entièrement ouvertes permet d’accueillir bien plus de monstres qu’auparavant. Dans les anciens jeux Monster Hunter, lorsque vous lancez une quête pour chasser un monstre, il se peut qu’un deuxième soit présent sur la carte. L’apparition de la seconde bestiole va juste compliquer votre quête. Les deux monstres vous prendront pour cible. Dans Monster Hunter: World, il y a davantage de monstres présents et avec son écosystème avancé, chaque monstre a son territoire. Votre chasse peut donc amener un monstre à s’introduire dans le territoire d’un autre et crée alors, volontairement ou non, une guerre de territoire. Ces scènes meurtrières primitives sont parfois exceptionnellement spectaculaires et brutales.
Au fur et à mesure que la carte devient plus grande et l’écologie plus complexe, le processus de recherche d’un monstre ciblé devient encore plus tortueux et l’importance du système de « Navicioles » est ainsi mise en évidence. Vous pouvez considérer ces petites mouches éclaireuses comme un équipement de recherche sur votre chemin. Les Navicioles vous aideront à identifier automatiquement des ressources et des empreintes de pas dans un environnement proche de vous, des marques de griffes et d’autres traces de monstres. En collectant constamment des traces de monstres, les insectes vous guideront graduellement vers l’endroit où se trouve le monstre.
Cependant, le système d’insecte d’aveugle est plus qu’un outil de recherche. Plus les informations collectées par les insectes sont nombreuses, plus la page d’informations du monstre est pertinente dans le jeu. La première fois que vous rencontrez un monstre flambant neuf, la page « Wikipédia » de votre compendium ne peut enregistrer que son nom et sa taille. Cependant, à mesure que l’enquête progresse, vous verrez progressivement ses caractéristiques détaillées, ses faiblesses, l’efficacité des attaques par attributs et les parties du monstre pouvant être endommagées ou cassées. Cette conception fournit une manière officielle pour pousser les joueurs à approfondir leur compréhension des monstres grâce à leurs propres efforts. Ceci est vraisemblablement plus pertinent et les enquêtes procurent un gros sentiment d’accomplissement.
Plus humain et plus moderne
La narration a toujours été au centre de cette série vidéoludique, et Monster Hunter: World ne fait pas exception. En surface, le jeu présente une histoire pleine de suspense autour de votre mission, explorer le nouveau continent afin de résoudre le mystère de la migration anormale des Dragons Anciens, dont le Zorah Magdaros. Mais pour la plupart des joueurs, la version vraiment significative de l’histoire devrait être « J’ai occis tous mes monstres préférés »… Cependant, une chose qu’il faut admettre, c’est que le poids de l’histoire est plus substantiel que n’importe lequel des Monster Hunter précédents. En plus de fournir une première expérience forte en cinématiques, il contribue également à rationaliser le processus.
Dans Monster Hunter: World, toutes les quêtes qui conduisent le développement de la ligne principale (similaire aux quêtes clé des opus précédents) ont été individuellement retirées pour former une ligne principale bien définie. Et cela permet également aux joueurs d’avoir une idée plus claire de leur progression actuelle. Le système de quêtes et de rang a donc été totalement refondu. Ici, vous avez différents types de quêtes. D’abord nous avons les missions. Ce sont les quêtes liées à l’histoire du jeu. Au fur et à mesure que vous les complétez vous augmentez votre rang de Chasseur. Ensuite, il y a les quêtes libres. Vous retrouvez les même quêtes de missions plus d’autres que vous pouvez refaire à volonté.
Puis nous avons les contrats. Il s’agit de quêtes avec des contraintes particulières offrant des récompenses bonus plus ou moins rares selon la difficulté. Enfin, les événements : les quêtes spéciales que Capcom ajoute tout au long de la vie du jeu, le tout gratuitement.
Dans la refonte du système de quêtes, il ne faut pas oublier le multijoueur. La série Monster Hunter est également appréciée pour son multi. Vous l’aurez deviné, il n’est pas question de compétition entre les joueurs, mais bien de coopération. Ce qui ne change pas, c’est le nombre de chasseurs possibles dans une quête : jusqu’à quatre maximum. Le changement dans le multijoueur, c’est qu’il n’y plus de barrière entre le solo et le multi. Les anciens jeux de la série marquaient une frontière entre les quêtes de l’aventure solo et celles du multi. Or, comme dit plus haut, ce sont les missions de l’histoire qui font progresser votre rang de Chasseur. Les vétérans vont se demander, mais alors, Monster Hunter: World nous oblige à jouer en solo avant de s’éclater en multi. Eh bien non, toutes les quêtes, que ce soient missions, libres, contrats ou événements, sont jouables seul ou à plusieurs.
Bien que vous puissiez parfaitement jouer à Monster Hunter: World hors ligne, lors de la sélection de votre fichier, le jeu vous demande de vous connecter en ligne, afin de rejoindre ou créer une session. Ainsi, vous débarquez en ligne dans une session contenant seize joueurs maximum. Ces seize joueurs peuvent se retrouver « physiquement » dans une seule partie du village, le Grand Pont. Autrement, vous pouvez, dans le tableau des quêtes, voir lesquelles sont proposées par les autres joueurs de la session. Vous pouvez alors rejoindre n’importe qui et surtout n’importe quand. Car oui, vous pouvez rejoindre un joueur déjà parti en quête, alors que c’était impossible avant et cela était bien frustrant.
Comme Monster Hunter: World se veut plus libre, vous pouvez partir tout bonnement en expédition. Les activités d’expédition ressemblent un peu aux missions de collecte de l’opus précédent, mais il n’y a pas de limite de temps, ni de mort. Vous êtes libre d’explorer, de recueillir et de chasser sur des cartes désignées. De plus, l’infrastructure du camping a été améliorée, car non seulement vous pouvez placer des camps dans plusieurs endroits différents sur une même carte, mais vous pouvez aussi changer de matériel, manger ou prendre des missions directement au camp. L’efficacité en est grandement améliorée.
Le système d’acquisition et de synthèse est également devenu plus clair, plus fluide. Des ressources telles que les herbes, le miel, les champignons et d’autres articles consommables peuvent être récoltées sans vous arrêter. Désormais, la pioche, le filet à papillon et l’aiguisoir font désormais partie d’une catégorie d’objets spéciaux que vous pouvez utiliser à l’infini. Autre point intéressant, l’artisanat automatisé facilite votre travail. Par exemple, lorsque vous collectez du miel sur le terrain et que vous possédez dans votre sacoche de l’herbe, l’artisanat automatisé synthétisera automatiquement une mégapotion. Un tel système raccourcit considérablement le temps d’apprentissage pour les novices et rend le rythme global du jeu plus dynamique.
En parlant de dynamisme, Monster Hunter: World est devenu plus fluide et flexible que n’importe quel épisode précédent dans sa navigation. Vous pouvez vous balancer d’avant en arrière comme un Tarzan avec des lianes dans la jungle ou votre grappin, et vous pouvez glisser rapidement dans une position de skateboard en descente. Même lors de la lutte contre un monstre, ces actions restent toujours faisables, permettant de faire des attaques sautées qui vous amènent à grimper sur le monstre. Connaître la bestiole que vous traquez est une chose, mais il faut aussi apprendre à vous servir du décor. Tout cela converge à une expérience la plus naturelle et fluide possible. Cela vaut aussi dans la prise des consommables sur le terrain. Finis les moments de longue non-action que les joueurs des anciens épisodes connaissent. Vous pouvez désormais prendre des médicaments tout en marchant lentement, l’énergie vitale est progressivement récupérée dans le processus. Ces ajustements, apparemment mineurs, portent l’expérience de la chasse à un tout nouveau niveau de fluidité.
Le système de synthèse des armes est plus abordable que n’importe quel jeu précédent. Bien que les armes de haut niveau de Monster Hunter: World soient encore modelées à partir d’armes du même genre au niveau relativement bas, vous avez maintenant la possibilité de remanier des armes non désirées à tout moment, avec la même quantité de matériel qu’auparavant. Cet ajustement permet d’encourager les joueurs à essayer des armes aussi diverses que possible, ou un grand nombre d’armes différentes dans le même système de branches des différentes armes.
Des défauts mineurs
Monster Hunter: World compte un total de 30 gros monstres, dont les deux tiers sont nouveaux. Ce nombre n’est pas énorme pour un jeu dans la série Monster Hunter, et si on le compare au « portrait de famille » de Monster Hunter Generations, c’est carrément minable. Et parmi cette trentaine de grosses bestioles, trois sont des variantes, des sous-espèces. Seulement une de ces sous-espèces fait partie du scénario. La façon dont on les débloque relève de la fainéantise des développeurs. Par exemple, si vous voulez débloquer la Rathian Sakura et les dernières missions de chasse supplémentaires, vous devrez collecter les traces du monstre spécifié en errant en expédition. Pour les joueurs ayant bien avancé dans le jeu et s’étant familiarisés avec la structure des plusieurs grandes cartes de chasse, ce type d’enquête devient répétitif même si les pistes varient, ce qui devient aussi quelque peu lent et long.
Les modifications en masse du mécanisme de Monster Hunter: World afin de rendre le jeu plus accessible pour les joueurs novices ont fait un travail remarquable. Mais la courbe d’apprentissage est loin d’être lisse. Le processus de démarrage avec chaque nouvelle arme est particulièrement gênant, et presque toutes les techniques avancées ne peuvent être explorées que dans un combat réel. Bien que le jeu fournisse un « terrain d’entraînement » qui répertorie les mouvements complets, le temps d’apprentissage reste prohibitif pour les joueurs modestes. En ce sens, Monster Hunter: World se place dans l’enseignement des conseils, il n’y a pas encore une place à une optimisation plus poussée dans l’apprentissage des armes.
Si nous mettons bout à bout toutes les innovations et modifications apportées au jeu par rapport aux anciens opus, oui Monster Hunter: World révolutionne la saga tout en gardant son identité. Le titre est d’une réalisation incroyable. Il gère l’exploit presque impossible de prendre une franchise connue (et souvent aimée) pour sa complexité et sa profondeur incroyables et de la rendre beaucoup plus accessible, sans pour autant la dépouiller de son âme.
Il raconte l’histoire la plus convaincante de tous les Monster Hunter (pas un exploit énorme, certes, mais c’est une histoire digne et intéressante) et offre certains des combats les plus intéressants et les plus addictifs de toute franchise, sans exception. Si, pour une raison quelconque, vous savez que le gameplay de base de Monster Hunter ne vous plaît pas, Monster Hunter: World ne changera probablement pas votre avis. Si vous êtes un joueur de jeu d’action hardcore, ce travail ne doit pas être manqué, car il est susceptible d’être le meilleur jeu d’action de l’année et indéniablement la meilleure expérience Monster Hunter.