Sorti en 2020, Ghostrunner premier du nom avait su se tailler une place de choix dans le cœur des joueurs de par son mélange habile entre combat au sabre et parkour, le tout saupoudré d’un univers cyberpunk convaincant. Il faut dire que les jeux d’acrobaties urbaines se font de plus en plus rares (pour ne pas dire inexistants) depuis la tragique disparition de son porte-étendard, Mirror’s Edge (tu nous manques, Faith).
Fort de son succès (avec un DLC en prime), Ghostrunner 2 fait sa soudaine apparition avec la promesse de rehausser l’ensemble de ses curseurs pour toujours plus d’actions frénétiques. Mais ce n’est pas tout, puisque le gameplay semble également se renouveler avec la présence d’une moto (bien mise en avant dans les différentes vidéos de présentation). Oui, vous imaginez bien la scène : un ninja futuriste sur une moto à hyper vitesse, faut-il expliquer davantage notre hype ? Il est grand temps de voir ce qu’il a dans le ventre.
(Test de Ghostrunner 2 sur PlayStation 5 à partir d’un exemplaire fourni par l’éditeur)
Parkour 2.0
Ghostunner 2 s’articule autour de deux phases bien distinctes. La première moitié du jeu est un approfondissement des mécaniques introduites dans son premier épisode : du parkour futuriste avec une poignée (minime) d’éléments inédits, mais loin d’être suffisants pour justifier une suite. C’est surtout sur la seconde partie qu’un renouvellement se fait sentir avec l’apparition d’un monde semi-ouvert et de la moto, mais nous y reviendrons plus tard, chaque chose en son temps.
Comme expliqué précédemment, les premières missions sont dans la continuité de l’opus initial. De l’action survitaminée à l’ambiance cyberpunk, avec comme terrain de jeu une ville futuriste. On saute, on dashe (bond en avant), on longe les murs, on utilise son grappin : les équipes de chez One More Level nous prouvent une seconde fois leur amour et maîtrise du parkour en ajoutant quelques nouveautés bienvenues au passage, comme la capacité Ombre permettant de générer un clone fantomatique et ainsi tromper ses adversaires.
Pour ceux ayant déjà approché la licence, les réflexes reviennent assez vite. Mais ne vous méprenez pas, Ghostrunner 2 reste un jeu exigeant, sans pour autant tomber dans l’extrême difficulté. Il conviendra alors de mourir un paquet de fois avant de venir à bout d’un passage délicat. Mais force est de constater que la recette fonctionne toujours autant. C’est d’une fluidité grisante, sans temps mort : de l’action pure et dure. Seulement voilà, après quelques heures de jeu au compteur, un sentiment désagréable se fait ressentir : celui du déjà-joué (le déjà-vu des joueurs).
Les sauts et les tranchages se suivent et on se dit doucement : « c’est juste un gros DLC sans valeur ajoutée, en fait ». Et c’est à ce moment précis que les portes de la ville s’ouvrent avec un tout nouveau monde à explorer. On entame la seconde partie du jeu, celle du renouvellement.
Into this house, we’re born. Into this world, we’re thrown.
Laissant la cité en perdition derrière nous, nous voilà face à une nouvelle zone, celle des terres désolées, théâtre d’une guerre dévastatrice lointaine. Aucun signe de vie à perte de vue, juste quelques mutants prêts à vous barrer la route. Dans cette configuration de vaste étendue sauvage, quoi de mieux qu’une moto pour ne pas perdre la frénésie si chère au titre ?
La moto fait indéniablement partie des points forts du jeu, car avec elle vient tout un pan inédit de gameplay des plus réussis. Les phases à moto sont enivrantes de par leur vitesse accélérée et leur ingéniosité dans leur composition. Il faudra éviter les obstacles à plus de 250km/h, rouler sur les murs, écraser un maximum d’ennemis, s’improviser un tremplin pour outrepasser un fossé, bref un cocktail d’action sans précédent. Il ne sera d’ailleurs pas rare de nous entendre dire : « Woooa ! » C’est à peine si on a le temps de cligner des yeux.
De par leur intensité, les passages à moto se doivent d’être courts. On notera néanmoins tout un niveau en monde semi-ouvert fort appréciable, mais bien trop restreint pour pleinement convaincre et peser dans la balance. Et c’est précisément là que le bât blesse, car les nouveautés injectées (aussi qualitatives qu’elles soient) restent succinctes sur la durée de vie totale du jeu. On aurait aimé plus de phases de moto avec pourquoi pas des améliorations possibles pour la bécane et un monde plus ouvert avec une exploration accrue. Ghostrunner 2 ne fait qu’effleurer cette potentialité et reste trop sur ses acquis.
Idem, le dernier niveau (rassurez-vous, aucun spoil à l’horizon) débloque une capacité de wingsuit, mais le titre n’exploite pas toutes les possibilités offertes, ça reste surfacique. Peut-être qu’il se cache ici une intention de laisser de la matière pour un futur DLC ou un troisième épisode ? Toujours est-il qu’une vraie frustration se fait ressentir.
Les pieds dans le virus
L’action, c’est bien, mais de l’action scénarisée, c’est mieux ! Et sur ce point, Ghostrunner 2 se casse la figure. L’histoire principale est tout bonnement incompréhensible. Celle-ci est une suite directe du premier opus, mais prend rapidement des virages d’une complexité inutile. Ça parle de virus antique, de rituel et de monde virtuel… À vouloir construire un solide récit, les équipes s’y sont perdues et on ressent un manque de savoir-faire.
Exemple tout bête, mais révélateur : la plupart des dialogues (indispensables pour bien comprendre les événements) se font directement en jeu. Mais comment voulez-vous suivre un échange (en anglais sous-titré français) alors qu’on doit impérativement garder une concentration accrue sur l’action, avec quasiment aucune pause ? C’est impossible.
Par conséquent, on comprend à moitié les tenants et aboutissements, et on se contentera d’avancer à travers les niveaux avec comme seul objectif de tuer les méchants. Et c’est dommage, car on ressent une réelle volonté de dérouler une histoire cohérente, mais la forme ne suit pas.
Ghostrunner 2 a en réalité le cul entre deux chaises avec d’un côté de l’action sans aucun complexe et de l’autre une volonté de prendre de la hauteur et de varier l’expérience. Avec une prédominance à l’action, le jeu ne réussit pas à trouver son équilibre. On notera quelques tentatives inabouties comme l’arbre à compétences enrichi, son scénario alambiqué ou encore des combats de boss assez laborieux, mais ces dernières ne suffisent pas pour marquer réellement.
Notre virée à deux roues touche à sa fin. Que faut-il retenir ? Ghostrunner 2 est dans la continuité de son premier épisode et limite les risques (les dégâts ?) en campant sur ses acquis : de l’action frénétique (ou fast-FPS pour les intimes). Néanmoins, le jeu tente d’insuffler de nouvelles mécaniques, à commencer par la moto (une vraie réussite pour le coup), mais n’enfonce pas suffisamment le clou pour que la recette fonctionne.
Attention, il est loin d’être mauvais, mais on ne peut s’empêcher de penser à ce qu’il aurait pu être avec un peu plus de recul, une narration soignée et un monde ouvert intelligent. Peut-être que ce sera pour le troisième épisode ? Oui, la lame s’est émoussée, l’effet de surprise n’est plus, mais un katana reste tranchant dans tous les cas…