Petit historique rapide. Initiée en 2000, la série Deus Ex compte actuellement cinq épisodes principaux, sans compter Deus Ex GO paru récemment sur mobiles, ainsi que tout un éventail de produits dérivés : comics, roman, visual novels, figurines et autres lignes de vêtements, que vous pourrez retrouver sur le site dédié du Deus Ex Universe.
Mais c’est plus particulièrement à un titre datant de 2011 et troisième opus de la saga, Human Revolution, que nous allons nous référer dans ces quelques lignes, puisqu’il constitue les prémices du jeu qui nous intéresse aujourd’hui, sa suite donc, baptisée Deus Ex: Mankind Divided. Soyons francs : Human Revolution représente à mes yeux l’une de mes expériences de jeu les plus jouissives de ces dernières années, le moment est donc venu de découvrir (même si vous l’aurez déjà compris) si Mankind Divided reprend avec brio le flambeau, ou s’il fait plonger la série d’ans l’abîme…
Deus Ex, des jeux profonds et matures
Pas facile de faire suite à un titre aussi réussi que Human Revolution (oui, je sais, c’est un avis parfaitement subjectif et personnel, mais hé, qui c’est qui écrit ce test, hmm ?) tant les attentes et exigences des fans placent la barre haut, et tant sera scruté le moindre aspect du jeu pour déterminer s’il hérite dignement de son ancêtre. On retrouve ainsi dans Deus Ex: Mankind Divided le même univers cyberpunk sombre et violent développé dans son prédécesseur, le tout situé dans un hypothétique futur proche (2029), deux ans après les événements décrits dans Human Revolution ; à ce propos, si vous n’avez jamais joué à ce jeu, faites-vous une belle faveur et allez l’acquérir avant de vous lancer dans sa suite.
Si toutefois vous n’en avez ni l’envie ni les moyens, sachez que Mankind Divided propose un résumé particulièrement complet et détaillé, qui vous permettra de visionner les passages les plus intéressants et porteurs de sens de Human Revolution afin d’entamer dans les meilleures conditions possibles ce nouvel opus, toujours signé Eidos Montréal.
En quoi est-ce si important, me direz-vous ? La réponse est simple : les Deus Ex ont la particularité de se focaliser avec minutie sur l’élaboration d’un scénario et d’un univers profonds, cohérents et complexes, intelligemment dépeints et crédibles, il serait donc dommage de passer à côté des éléments d’information permettant d’assimiler ce qui a conduit à la situation initiale que vous découvrez au début de Mankind Divided.
Pour résumer à la louche, et en tentant de ne pas trop en révéler, le background est le suivant. Suite à l’émergence fulgurante des implants cybernétiques destinés, à l’origine, à soigner des amputations ou des maladies graves, l’Humanité s’est, comme à son habitude, n’est-ce pas, déchirée en deux factions : les pro-augmentations, qui usent et parfois abusent de cette technologie révolutionnaire, et les puristes anti-implants, persuadés que cette robotisation signera la mort de l’Humain tel qu’on le connaissait jusqu’alors.
History repeats itself
Cet antagonisme a connu son apothéose lors d’une crise majeure advenue en 2027, au cours de laquelle des hordes d’augmentés ont été pris de folie à cause d’un virus programmé par un esprit néfaste, et depuis, la guerre entre puristes et pro-cyber ne cesse de faire rage : ségrégation, terrorisme, violences constantes, exclusion, complots politiques impliquant les méga-corporations… Tout y passe, et le monde est en permanence à feu et à sang.
Au milieu de tout ceci, on retrouve Adam Jensen, ancien chef de sécurité lourdement augmenté suite à un assaut ayant failli lui coûter la vie, et également protagoniste principal des deux jeux, dont les choix effectués dans le premier volet auront pesé lourd dans la balance de la situation actuelle. Désormais agent d’une division d’Interpol anti-terroriste, notre charismatique soldat se voit confié, au tout début de Mankind Divided, une mission à Dubaï concernant une vente d’armes, transaction qui ne vas pas se dérouler du tout comme prévu. Nous n’en dirons pas plus ici, il est d’ailleurs difficile de résumer en quelques mots un scénario aussi riche que celui de ces jeux…
Une chose semble évidente cependant dans tout cela : sous couvert de cyberpunk et de dystopie futuriste, c’est bien de thèmes parfaitement actuels que traite le jeu, et c’est là que réside un de ses plus grands atouts. Le message ici semble être : quelle que soit l’évolution de la société dans un avenir proche ou lointain, l’Homme restera toujours l’Homme, et persistera à partir en croisade contre lui-même, avec toujours de bons motifs et de grandes causes morales pour agresser et détruire ses congénères. Ceci dit, ne voyez pas dans Deus Ex: Mankind Divided un pamphlet politique caché et militantiste, mais plutôt une vision sombre, mature et réaliste de l’âme humaine…
Des genres en nombre
Et puisqu’on évoquait à l’instant les atouts du jeu, sachez que l’on n’a pas encore abordé le plus marquant. S’agit-il donc de sa prouesse technique ? Que nenni, car même si le jeu affiche toujours des graphismes parfaitement calibrés à son univers ténébreux, des musiques atmosphériques et envoûtantes qui vous transportent de manière efficace dans les méandres d’un avenir peu reluisant, des doublages entièrement en français de qualité globale très correcte, on pourra éventuellement, en pinaillant, déplorer quelques visages assez moyennement modélisés et animés pour les personnages secondaires, ainsi qu’une évolution peu significative du rendu général par rapport à l’épisode précédent.
Ce qui ne constitue pas un terrible crime en soi, puisque ce dernier était de très grande qualité visuelle et audio. Mais pour rester objectifs, reconnaissons que cinq ans après, et pour avoir rejoué tout récemment à Human Revolution, la progression technique n’est pas particulièrement flagrante en se plongeant dans Mankind Divided. Passons.
Non, le véritable point fort de ce jeu, c’est cette alchimie si efficace qu’on trouvait déjà chez son ancêtre, et ceux qui l’ont connu sauront de quoi je parle. Loin d’un banal FPS où l’on n’a d’autre choix que de défourailler à tout va en fonçant tête baissée (un genre que j’apprécie aussi, ceci dit), les Deus Ex offrent une expérience plus léchée, un gameplay plus fin et surtout, qui offre au joueur le choix de la façon dont il va décider d’appréhender les différentes situations, sans imposer ses règles. Deus Ex: Mankind Divided est donc un savoureux mélange de FPS, d’infiltration et de RPG. Voyons tout cela en détail pour qui découvrirait la série.
Des qualités à la pelle
Chaque situation in-game vous permet, soit de chercher à tuer tout le monde de front au risque de tomber sur une force armée plus puissante que vous, soit d’aborder les obstacles par des voies détournées, en assassinant ou en assommant discrètement vos adversaires tout en restant dans l’ombre et en navigant de conduits en conduits, de cachette en cachette. Le jeu ne privilégie aucune méthode plus que l’autre, et vous ne serez pas puni pour avoir essayé d’assaillir un repaire ennemi en passant par la porte principale ; l’expérience sera simplement différente. Ajoutez à cela un soupçon de RPG matérialisé par la présence d’un arbre de compétences destiné à améliorer les caracs et les augmentations de Jensen, ainsi qu’un léger aspect crafting, et vous vous retrouvez avec un jeu complet, dans lequel chacun saura trouver la manière de jouer qui lui convient en fonction de ses affinités.
Et cerise sur le foie gras, la maniabilité est parfaitement adaptée à chaque façon d’aborder le jeu, que vous soyez un bourrin ou un ninja ; un vrai régal. Concluons cet éloge en évoquant les petits détails qui contribuent encore un peu plus à la qualité du jeu, tels que ce mode compétitif (Breach) inédit permettant d’incarner l’avatar d’un hacker parti à l’assaut des réseaux les plus sécurisés du monde (augmentant d’autant une durée de vie déjà très honnête), la présence de quatre niveaux de difficulté bien dosés pour offrir à chacun l’expérience la meilleure possible, ou encore la multitude de mails, journaux, infos TV etc. à dénicher dans le jeu, qui contribuent à l’édification d’un univers documenté et cohérent. Une belle réussite, merci Eidos Montréal (à nouveau).
Défi relevé haut la main : Deus Ex: Mankind Divided est bel et bien le digne successeur de son aîné, il en reprend la profondeur scénaristique, la maturité, la variation des genres en termes de gameplay, l’univers cyber sombre et violent, bref, une suite digne de ce nom, que tous les amoureux du premier volet se doivent de posséder. Et même si l’on ne constate que peu d’évolution flagrante niveau performances techniques, ce détail ne saura venir ternir le plaisir éprouvé à prendre de nouveau le très badass Jensen en mains.
Vous êtes bourrin ? Ce jeu est fait pour vous. Vous êtes plutôt discret et subtil ? Ce jeu est fait pour vous. Vous aimez l’infiltration, les FPS ou les RPG ? Ce jeu est fait pour vous. En bref, vous aimez les jeux de qualité dotés d’une campagne solo cohérente et d’un univers riche et complet ? Deus Ex: Mankind Divided est fait pour vous, point.