Sortie « Day One » sur le Game Pass qui s’est fait discrète, Back to the Dawn arrive auréolé d’un accueil enthousiaste ayant suivi son early access sur Steam. Si le milieu carcéral a quasiment offert un sous-genre au cinéma (de La Grande Évasion à Un Prophète, en passant par L’Évadé d’Alcatraz, Les Évadés, ou Animal Factory) ou à la télé (Oz, Prison Break…), il se fait plus rare en jeu vidéo (on a bien un A Way Out, ou des jeux mineurs comme The Escapist, mais la liste se termine rapidement).
Le jeu citera d’ailleurs abondamment les classiques, en faisant faire à son héros des grues en papier pour séduire le médecin, comme dans Prison Break, ou fabriquer un mannequin pour le remplacer dans le lit aux yeux des gardiens comme Clint Eastwood à Alcatraz… Alors Back to the Dawn sera-t-il le Shawshank Redemption du jeu vidéo ?
(Test de Back to the Dawn réalisé sur PC via une copie commerciale du jeu)
Doin’ Time
C’est bien connu, les prisons sont remplies d’innocents. À commencer par les personnages que l’on incarne, au choix Thomas, le renard, journaliste sur le point de révéler une affaire mettant en péril la réélection du maire, et donc emprisonné pour être réduit au silence, ou Bob, la panthère noire, flic infiltré.
Deux personnages qui représentent les deux difficultés du jeu : Thomas pour le mode « normal » et Bob pour le mode « difficile ». Une excellente idée qui, en plus de jouer sur les statistiques pour rendre l’aventure plus ardue, modifie également un peu la narration, offrant une rejouabilité plus intéressante qu’avec « simplement » un défi plus relevé.
Outre nos deux avatars, la prison comporte 45 autres détenus, les gardiens, le directeurs et le médecin. Autant de personnages qu’on peut prendre le temps de connaître, chacun étant écrit et plus ou moins développé. Plus ou moins à la masse aussi, entre le chimiste inspiré par Breaking Bad qui veut installer un labo dans sa cellule et le bouc à la tête d’une secte Lovecraftienne (évitez d’ailleurs de vous en prendre à lui…).
« Prendre le temps de les connaître », écris-t-on, car c’est vraiment le cas. Chaque action, chaque choix nous « prend » du temps, au sens où cela nous en prive. On dit que « le temps, c’est de l’argent », mais comme dans le film d’Andrew Niccol « In Time », le temps, ici, c’est surtout la survie.
Système D (comme détenu)
Présenté comme un RPG d’évasion, le jeu est aussi un jeu de survie, mais c’est avant tout un jeu de stratégie. Survivre en prison, le cinéma nous l’aura appris, n’est pas chose aisée, et il faut savoir trouver sa place, créer les bonnes alliances, et éviter de se faire trop d’ennemis.
Dans Back to the Dawn, chaque décision entraînera une consommation de temps et d’énergie. Et le jeu débute avec un compte à rebours. Dans le cas de Thomas, on est incarcéré 21 jours avant la réélection du maire. Ce qui signifie qu’il faudra pouvoir s’évader et révéler les manigances de l’édile dans ces trois semaines imparties.
Comme dans tous jeux de survie, une place prépondérante est laissé au crafting (la fameuse brosse à dent limée pour en faire un surin…), mais surtout on a des indicateurs à suivre de près : les plus importants seront la santé et le moral. L’argent, aussi, compte énormément, étant donné que pour tout, ou presque, il faudra payer.
Ainsi, soit on consacrera sa matinée à préparer une solution antirouille, de façon à espérer ouvrir cette trappe qui nous permettra peut-être de nous rapprocher de l’évasion, soit on travaille un peu pour gagner de quoi se payer un déjeuner un peu plus nourrissant qu’un simple morceau de pain et de l’eau chaude pour la douche…
Lors de nos premiers runs, nous avons rencontré quelques difficultés à savoir retarder telles ou telles activités qu’on imaginait essentielles pour la progression du scénario, afin de maintenir la santé et le moral de notre personnage. Ce n’est que lors de la 3ème ou 4ème partie que l’on a réussi à trouver un équilibre entre survie et progression. Un conseil : être patient, raisonnable, et accepter que de nombreuses missions et activités ne pourront être menées à bout.
Une sentence dont vous êtes le héros
Le jeu étant situé en prison, les possibilités de déplacements sont évidemment limitées. Au début de la partie, seules quelques zones sont accessibles : le hall principal, les deux blocs de cellules, l’étage avec la salle télé, la cantine et la cour. Mais de nouveaux décors viendront s’ajouter au fur et à mesure des progrès dans le scénario.
Là où le titre éloigne beaucoup plus les limites, c’est dans sa façon de nous laissez appréhender la manière de progresser. On peut se rapprocher de l’un des 3 gangs en particulier, on peut travailler avec les gardiens, soulever de la fonte, devenir violent et gagner le respect par la crainte, ruser et au contraire ne pas se battre une seule fois, faire un mix d’un peu tout ça… C’est ici que le titre mérite l’appellation de RPG, puisqu’on interprètera le personnage de la manière que l’on souhaite et que « tout » est possible.
Pixel is the new Black(sad)
On ne l’a pas précisé jusqu’ici (les captures d’écran l’auront fait pour nous), mais le jeu met en scène une galerie d’animaux anthropomorphisés, et adopte un style pixel art. On pense alors évidemment à Blacksad. Comme dans les aventures du chat détective, la race de chaque personnage révèle une partie de sa personnalité. Les gardiens seront ainsi des chiens de garde, le kangourou sera un boxeur hors-pair, quand notre personnage de journaliste d’investigation sera, lui, un renard…
Mais n’est pas Blacksad qui veut, et dans Back to the Dawn, on reste un peu en surface. Les animaux qui peuplent la prison sont finalement plus «cartoon » qu’autre chose (le bouc à la tête d’un culte ; le paresseux qui met un temps infini à faire ses phrases, comme dans Zootopia ; ou le singe à la tête d’un gang qui s’appelle Ceasar, comme dans la Planète des Singes…).
De même avec le scénario du jeu. Si certains éléments sont extrêmement graves, ou violents (à commencer par les armes que l’on peut crafter, comme ce poignard composé d’un large morceau de verre), le jeu a du mal à dépasser le premier degré de son scénario. Sans être raté, tout cela ne va hélas pas bien loin.
Si l’on avait commencé Back to the Dawn un peu par hasard, on s’est vite pris au jeu. Ayant le mérite d’être l’un des très rares jeu vidéo ayant pour décors la prison, le titre tire parfaitement parti de cette mise en place, qui lui permet de s’étaler dans les proportions modeste du AA, voire du petit jeu indé.
Le côté huis clos maîtrisé lui permet de se dérouler dans un nombre réduit de décors, sans pour autant entraver le gameplay. On aura même des difficultés à faire tout ce dont on a envie, freiné (sans que cela apparaisse comme frustrant) par les mécaniques de survie. On aura toujours quelque chose à faire ou à tenter pour se rapprocher de l’évasion, et avant même qu’on s’en soit rendu compte, on aura déjà englouti plusieurs heures de jeu dans Back to the Dawn. Attention néanmoins, le jeu est uniquement en anglais et ne dispose pas , à ce jour, de traduction française.