Dès que pointe le bout de son nez un J-RPG (qui ne vient pourtant pas du Japon, cette fois, mais de l’Ohio ; on parlera de J-RPG comme d’un genre et non comme d’une provenance), il est bien évidemment coutume de se remémorer les perles magnifiques que nous avaient pondues à l’époque les machines 16-bit. Romancing SaGa, Phantasy Star, Final Fantasy, et même Rudra no Hihou un peu moins connu par chez nous et pourtant magistral… les exemples ne manquent pas. Et la liste est longue de ces œuvres qui auront su nous enchanter des heures et des jours durant. Aujourd’hui, on s’intéresse à Ara Fell: Enhanced Edition, un peu sorti de nulle part. Kézako ?
Eh bien, il s’agit à nouveau d’un jeu d’aventure très typé Super NES dans sa conception visuelle, sonore (heureusement qu’il n’a pas choisi la MegaDrive sur cet aspect…) et de gameplay. On pensera à Octopah Traveler qui rendait un bel hommage à cette époque, ou encore à Sea of Stars qui viendra bientôt nous délecter avec le même objectif. Et Ara Fell dans tout ça, il se pose où ? Aura-t-il des arguments assez convaincants pour venir jouer dans la cour des Grands Anciens et des petits nouveaux aux dents longues ? Penchons-nous un instant sur le sujet, ami aventurier…
(Test de Ara Fell: Enhanced Edition réalisé sur Switch via une version fournie par l’éditeur)
Ara Fell – Le château dans le ciel…
… et les villes, aussi, et les grottes. Et les donjons. Et des lacs et des cascades, tiens. Impossible de ne pas penser au film du grand Miyazaki, Laputa, en découvrant ce royaume céleste qu’est celui d’Ara Fell, un bien étrange nom pour un archipel flottant dans les cieux, « fell » étant la forme passée du verbe « fall » en anglais, qui signifie « tomber ». Et l’on s’apercevra en découvrant un peu plus le scénario du jeu que ce nom sied parfaitement à la condition de l’île telle qu’elle nous est présentée…
En termes de background, on a droit à l’histoire d’un monde désolé et ravagé par les guerres entre dieux, devenu un véritable enfer pour tous ses habitants. Pour préserver une petite partie de cette planète en déroute de la destruction totale, une déesse solaire prit l’initiative d’élever celle-ci au firmament, créant ainsi un petit continent flottant composé de plusieurs îles et îlots de tailles diverses, ressemblant à un Eden fleuri et idyllique où cohabitaient jadis elfes et humains en parfaite harmonie.
Cette bonne œuvre accomplie, la déesse décida que les dieux n’étaient pas des êtres bienveillants, et, la plupart des autres divinités ayant disparu lors de leur pitoyable conflit, elle s’abîma, elle aussi, au sein du soleil qu’elle représentait, pour ne plus jamais revenir, laissant son île flottante (haha) aux mains de ses habitants, en sécurité dans les cieux.
Ou pas. Car outre les humains et les elfes, la contrée céleste hébergeait aussi ce qu’on appelle des vampires, des monstres assoiffés de sang et de conquête accompagnés de hordes de créatures toutes plus hideuses et agressives les unes que les autres. Eut lieu, fut un temps, alors, une guerre opposant elfes et vampires, au cours de laquelle les premiers se sacrifièrent pour préserver l’île, qui n’en entama pas moins une lente mais inexorable chute vers la terre dévastée qui l’avait vue naître, désormais appelée Abysses.
Voilà pour le scénario global de Ara Fell, et nous vous laisserons le soin d’en apprendre plus par vous-même, par le biais notamment de documents fort intéressants créant un lore captivant sur l’histoire de l’archipel, et que vous pourrez dénicher tout au long de votre progression dans des étagères bourrées de bouquins.
Moi je m’appelle lol-Lita…
Ce monde que nous venons de vous décrire, c’est celui au sein duquel vous allez évoluer en incarnant Lita, une jeune fille pleine d’entrain, d’humour (vous aurez souvent droit à ses salves drolatiques et à ses crises d’humeur marrantes) et avide d’aventure, au caractère bien trempé, et très habile avec un arc et des flèches. Elle constituera votre personnage principal, auquel viendra rapidement se joindre un ami de longue date, puis deux autres personnages aux compétences et caractéristiques diverses, le tout composant une équipe homogène en tous points (magie, force de frappe, soins, défense, etc.).
De fait, point ici de groupe de 20 000 persos parmi lesquels choisir votre équipe fétiche ; vous avez en main quatre cartes seulement (façon de parler), à vous de les faire progresser dans le sens qui vous convient.
Oh tell me why… Do we build castles in the sky ?
Car en effet (oui, on sait, ça ne se dit pas, c’est pour ça qu’on le dit !), comme dans tout bon RPG, vous allez progresser au fur et à mesure que vous allez monter de niveau. Parce que bon, tous ces vampires et leurs mignons, comme on dit, ne vont jamais cesser de devenir plus puissants et plus féroces. D’ailleurs, il faut noter, comme c’était le cas dans Secret of Mana notamment, une belle abondance de boss-fights dans Ara Fell, pour lesquels il va s’agir de venir bien préparé.
Chaque victoire vous rapportera donc des points d’EXP, et quand vous passerez au niveau suivant, vous aurez tout loisir d’attribuer ces bonus de compétence selon quatre catégories : Power (pour la puissance de frappe, bien sûr), Defence (est-il besoin de clarifier ?), Agility (pour l’esquive et les attaques à distance type arc), et Wisdom (la sagesse, donc la magie et l’extension des points permettant de balancer des attaques spéciales et des sorts).
Mortels combats
Les combats dans Ara Fell sont assez classiques, et donc, efficaces. On a droit à du tour par tour dans lequel ennemis et personnages de la team effectuent leurs actions l’un après l’autre, une formule qui a marché – les exemples sont nombreux – et qui reste pertinente aujourd’hui encore.
Par contre, et ce sera là un des défauts du jeu, les combats sont terriblement longs. Même les premiers petits adversaires ressembleront à des gros sacs à PV de par le manque de puissance de vos attaques, même spéciales. Alors ne parlons pas des boss… Ara Fell est clairement un jeu comme jadis, où il va parfois falloir farmer un peu pour progresser. Ce qui n’a jamais constitué un souci pour les vieux briscards, à qui s’adresse clairement ce jeu, mais les petits nouveaux avides de progression rapide risquent de rager un peu. Ara Fell, c’est no pain, no gain.
La craft est plutôt important dans ce jeu, ce qui n’en fait pas pour autant un T-RPG ; la conception d’objets, de potions de soin et d’armes se fait avec une simplicité enfantine, et ça, c’est un point positif si vous avez envie de jouer casu. Vous ramassez des matériaux (peaux de bêtes, métaux, joyaux…) à droite à gauche, et vous n’avez plus qu’à vous rendre dans le menu de craft pour concevoir des améliorations pour votre stuff, ça prend 10 secondes max, et c’est bien pratique.
Dora fell
L’accent est ainsi mis sur l’exploration progressive des diverses zones de l’île, chaque aboutissement vous permettant de progresser un peu plus loin. Sachez que lors des combats, vos attaques spéciales et magiques, que l’on a évoquées plus haut, entameront votre jauge de mana. Donc, impossible de spammer vos attaques les plus puissantes impunément, il va s’agir de surveiller votre barre de magie/attaques spé. Heureusement, celle-ci se régénère un peu à chaque tour lors du combat, ce qui vous permet de poser rapidement une attaque ou un sort particulier une fois votre capital de PM rempli.
Ayez conscience également que votre barre de santé (évolutive, bien sûr) et votre barre de mana (évolutive itou) reviennent à leur max à l’issue de chaque combat ; n’ayez donc aucune crainte d’enchaîner les bastons au risque de vous faire démonter le museau, car vous repartez à chaque affrontement avec toutes les chances de votre côté.
Petite note pour finir : Ara Fell est un jeu américain, donc disponible en anglais, mais il bénéficie également d’une traduction japonaise pour les ceusses qui maîtriseraient ce langage. Si vous êtes un gaulois sans notion de la langue d’Idris Elba, vous risquez de passer à côté de tout un tas de dialogues intéressants (même avec des PNJ random, chapeau) et du scénario de Ara Fell, qui pèse beaucoup dans l’intérêt du jeu.
Ara Fell: Enhanced Edition est un magnifique hommage aux RPG 16-bit que l’on aimait à l’époque de la Super NES. Il en reprend la qualité visuelle, sonore, et scénaristique. Loin des poncifs clinquants dont on nous robore à foison (et ce n’est pas une critique ; chacun sa place), il récupère tous les codes d’antan pour nous fournir une aventure forte en rebondissements et en plaisir de jouer.
Alors certes, on pourra déplorer des combats un peu longuets, une map plutôt sommaire, si on veut chercher la petite bête. Mais globalement, l’expérience est parfaitement satisfaisante pour qui aime le J-RPG tel qu’on le concevait dans les années 90.