Le géant du jeu vidéo Rockstar Games a officiellement annoncé l’acquisition du studio australien Video Games Deluxe, renommé pour l’occasion Rockstar Australia. Si cette expansion témoigne de l’intérêt croissant de Rockstar pour le développement international, elle marque aussi le retour du tristement célèbre Brendan McNamara, figure pour le moins controversée de l’industrie vidéoludique, au sein de la société.
Rockstar s’implante en Océanie
Fondé en 2013 par McNamara, Video Games Deluxe a collaboré étroitement avec Rockstar Games pendant plus d’une décennie. Le studio s’est notamment illustré en travaillant sur L.A. Noire: The VR Case Files, ainsi que sur les mises à jour du très buggé GTA Trilogy: The Definitive Edition, après le fiasco initial de son lancement. Dans un communiqué officiel, Jennifer Kolbe, vice-présidente de Rockstar Games, a salué cette acquisition (en prenant soin, bien sûr, de ne pas mentionner la réputation très écornée de McNamara et le coup porté à sa respectabilité professionnelle) :
« Après avoir travaillé en étroite collaboration pendant de nombreuses années, nous sommes ravis que Video Games Deluxe rejoigne l’équipe de Rockstar Australia. »
Brendan McNamara, quant à lui, s’est dit honoré de faire partie de Rockstar Games et de poursuivre son engagement à créer « les meilleurs jeux possibles. »
Brendan McNamara, retour salutaire ou sulfureux ?
Si Brendan McNamara est évidemment tout de même très estimé pour son travail sur le sublime L.A. Noire, il traîne cependant derrière lui une réputation sulfureuse : ancien scénariste de The Getaway chez Sony, il fonde en 2003 Team Bondi, un studio australien ambitieux qui va consacrer près de sept ans au développement de son premier et unique titre (secondé et distribué par Rockstar Games), plongeant les joueurs dans le Los Angeles noir des années 40. Mais derrière le succès critique et commercial de L.A. Noire, l’histoire de Team Bondi est entachée par de nombreux témoignages accablants sur sa gestion.
Dès la sortie du jeu en 2011, plusieurs anciens employés dénoncent des conditions de travail éprouvantes : semaines pouvant atteindre les 100 heures, pression constante et management tyrannique. Le crunch, souvent évoqué dans l’industrie, prend ici une dimension particulièrement brutale, avec des employés contraints d’enchaîner des journées de 12 à 16 heures, week-ends inclus pendant des mois, ainsi que des salaires non versés. Pire encore, plus de 100 développeurs ayant pleinement contribué au projet sont purement et simplement exclus des crédits du jeu, provoquant un tollé et exposant une fois de plus les pratiques abusives de l’industrie du jeu vidéo.
Le portrait dressé de McNamara par ses anciens collègues est loin d’être flatteur. Plusieurs employés évoquent une culture d’entreprise toxique où la peur et l’intimidation sont monnaie courante. « Un des pires managers avec qui j’ai travaillé », confie un ancien employé dans un article de Kotaku, tandis que d’autres décrivent un environnement où les critiques publiques et humiliations étaient fréquentes.
Une vision du développement de jeux qui contraste avec les efforts récents de l’industrie pour assainir ses pratiques et lutter contre la glorification du crunch, bien que ce dernier demeure encore trop courant et tristement accepté. Face aux controverses, Team Bondi se retrouva donc isolé. Ses relations avec Rockstar Games, qui avait soutenu financièrement L.A. Noire, se détériorèrent au point que la firme américaine refusa de collaborer par la suite avec le studio australien. Privé de soutien, Team Bondi ferma ses portes en octobre 2011, et McNamara disparut un temps des radars avant de réapparaître avec Video Games Deluxe deux ans plus tard.
Aujourd’hui, son retour sous la bannière de Rockstar, via l’achat de son studio, renommé pour l’occasion Rockstar Australia, pose une question : McNamara a-t-il changé, ou son approche du management sera-t-elle de nouveau source de controverses ? Interrogé à l’époque sur ces accusations, McNamara avait déclaré, sans aucun remord :
« L’attente [lors du développement] est un peu étrange, comme si vous pouviez faire ce travail sans vous tuer à la tâche. Ce n’est pas possible. »
Une vision du développement déshumanisante, ne faisant clairement plus l’unanimité dans une industrie en pleine remise en question des conditions de travail des développeurs, même si ces propos remontent à 2011.
Métamorphose en Rockstar Australia : et maintenant ?
Avec GTA 6 prévu pour l’automne 2025, et déjà des années de développement au compteur, il est peu probable que cette nouvelle branche du studio, Rockstar Australia, soit impliquée directement dans le projet. Toutefois, son expertise précieuse dans les adaptations et les mises à jour de jeux existants pourrait être utilisée pour les futures versions et améliorations des titres Rockstar. Par ailleurs, le statut de GTA San Andreas VR, un projet sur lequel Video Games Deluxe travaillait, reste incertain après cette acquisition.
Avec cet achat, Rockstar Games porte à douze le nombre de ses studios à travers le monde, consolidant ainsi sa position de mastodonte du jeu vidéo et de référence en matière d’open world ambitieux. Si l’intégration de ce nouveau studio représente une opportunité stratégique pour Rockstar Games, s’implantant enfin en Océanie, elle pose aussi la question du management de McNamara. Espérons que cette acquisition permette d’encadrer et d’améliorer ses méthodes de travail, afin que Rockstar Australia devienne un acteur clé de l’expansion du studio, sans répéter les erreurs du passé.
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