En 1972, avec l’arrivée du jeu Pong, le jeu vidéo faisait sa première apparition. Révolution pour l’époque, rapidement devenu une culte antiquité. Car depuis, le jeu vidéo a évolué à une vitesse fulgurante pour devenir aujourd’hui un marché économique parmi les plus puissants du monde. Imaginez, on parle là d’un loisir né il y a cinquante ans à peine. En comparaison avec la musique, qui accompagne la vie humaine depuis des millénaires, le jeu vidéo n’est qu’un nouveau-né.
On ne compte plus le nombre de consoles, de jeux et de personnages cultes de la pop culture qu’a amené le jeu vidéo en une si courte période : Mario, Pikachu, Link, Donkey Kong, Kratos, Sonic, ou encore Solid Snake. Rien qu’à l’évocation de ces noms, nous sommes persuadés qu’une image mentale s’est immédiatement créée dans votre cerveau. Et nous aurions pu en citer bien d’autres.
Mais, en y repensant, ces personnages ont un autre point en commun que celui d’être simplement issus de jeux vidéo : ils commencent à dater. La plupart d’entre eux sont nés dans les années 80 et 90, et ont déjà soufflé bien plus que leur dix-huit bougies. Certains sont dans la fleur de l’âge, mais, miracle du jeu vidéo, ils ne vieillissent pas (et rajeunissent même pour certains). En fait, ils sont les stars du jeu vidéo, et son image de marque à travers le monde.
En comparaison, nous avons bien du mal à imaginer quels personnages récents pourraient bien devenir figure de proue d’une franchise pour les décennies à venir. Si on est prêt à parier que Mario sera toujours là dans 20 ou 30 ans, on a du mal à imaginer Cal Kestis ou Aloy devenir des icônes durant des décennies, malgré leurs succès récents. Le futur nous donnera peut-être tort, mais le jeu vidéo a-t-il encore le pouvoir de créer des personnages cultes ?
L’époque actuelle est un vrai paradoxe. Le jeu vidéo est de plus en plus médiatisé, de plus en plus de jeux sortent chaque année, et pourtant, difficile d’en ressortir des personnages et surtout de les imaginer sur la durée. Attention, notre culture vidéoludique étant loin d’être exhaustive, sans doute serez-vous capable de nous citer des héros récents auxquels nous n’avions pas pensé. Mais nous dirons que c’est l’exception qui confirme la règle.
L’époque actuelle, vrai paradoxe disions-nous ? Peut-être pas tant que ça lorsqu’on se penche un peu sur la mécanique des émotions humaines. Plus de jeux, c’est aussi plus d’appels à la consommation. Et qui dit plus de consommation, dit souvent moins d’attachements aux oeuvres. La culture du zapping est devenue monnaie courante, et avec elle, beaucoup de joueurs ne trouvent plus le temps de finir les oeuvres et de s’y intéresser en profondeur. Reste alors les intemporels classiques, imprimés dans nos cerveaux et dans nos coeurs depuis des années, sans forcément qu’on ait déjà posé les mains dessus. C’est dire leur force.
Il faut dire aussi que le jeu vidéo actuel surfe sur une autre vague. Le développement des univers passe bien avant celui des personnages. Qu’il s’agisse d’Elden Ring ou de GTA V, pour citer d’énormes succès, c’est pour le level design et leur monde qu’ils ont été mis en avant, pas forcément pour un héros marquant.
À cela s’ajoute le fait que les jeux proposent de plus en plus de personnaliser nos héros au début d’aventure. Pour une plus grande immersion et inclusion, les joueurs peuvent créer leurs propres protagonistes, uniques, à leur image. Chacun appréciera son propre avatar, mais impossible d’en faire des icônes.
L’être humain aime également être rassuré, c’est dans sa nature. Il aime revenir à ce qu’il connait, pour se retrouver dans sa zone de confort, en confiance. Rien de tel qu’un nouveau Zelda pour relancer sa Switch après des mois d’hibernation. Et ça, les éditeurs l’ont bien compris. En essorant jusqu’à la moelle les univers de certains personnages, ils font plaisir aux joueurs. Et par la même occasion, eux aussi restent dans leur zone de confort. Mettez vous à la place de SEGA aujourd’hui. Est-il plus risqué de parier sur un nouveau Sonic ou de tenter de lancer une nouvelle licence ?
C’est sur cette nostalgie que les développeurs jouent lorsqu’ils proposent leur dizaine de reboots, remaster, portage, etc.. En capitalisant sur nos héros cultes, ils savent que la réussite est souvent au rendez-vous. Et en restant toujours au sommet, ces héros gardent une place de choix dans l’imaginaire collectif. Difficile pour des petits nouveaux de se faire une place au soleil.
Tiens, reprenons notre comparaison avec la musique. Si vous êtes un tant soit peu curieux des affiches des plus grands festivals européens, notamment rock, vous savez que ces événements capitalisent également sur les anciennes gloires, au détriment des nombreux très bons artistes émergents. Kiss, les Rolling Stones, Deep Purple ou encore Iron Maiden seraient-ils les Mario, Sonic et Link de la musique ? À cela près qu’eux ne rajeunissent pas…
Ce qui est le plus impressionnant, c’est que ces héros du passé sont devenus des héros du présent. Mario et Link sont des stars pour les jeunes générations. Le passage de témoin s’est fait, sans doute entre parents et enfants, et également entre éditeurs et nouvelle génération. Et en continuant de sortir des jeux, des films, des séries mettant en scène ces personnages, nul doute que leur histoire est loin d’être terminée.
Mais c’est peut-être là la plus belle des réussites du jeu vidéo. Etre capable de rassembler autour d’icônes communes des gens de tous horizons. Et même si aucun nouveau personnage ne sera peut-être capable d’atteindre les sommets de nos héros d’antan, ce n’est finalement pas si grave, tant que chacun s’y retrouve.
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