En 2012, le producteurs des Game Awards Geoff Keighley, alors encore journaliste (quoi que…), est filmé intervenant devant, d’un côté, un paquet de chips Doritos bien en évidence et des bouteilles de soda Mountain Dew, et de l’autre, un poster de Halo ou figurent ostensiblement ces deux mêmes marques. L’image est vu par beaucoup comme une illustration du problème de collusion entre une certaine presse jeux vidéo et les marques et éditeurs.
Le journaliste Robert Florence, dans les colonnes d’Eurogamer, dénonce cette situation, mais son papier sera amendé suite à des pression d’une journaliste, Lauren Wainwright, accusée nommément dans l’article. Florence démissionnera alors du magazine. Cette affaire, connue sous le nom de Doritos Gate, plane encore aujourd’hui sur l’image de Geoff Keighley.
Entre ça, et la façon dont il a décidé de lâcher un E3 en chute libre pour créer le Summer Game Fest, son propre événement (E3 dont il fut partenaire de longue date, d’où les accusations de traitrise qu’on peut lire ici ou là), Keighley avait besoin d’un moment où il pourrait se reconstruire une image de « good guy ». C’est peut-être pour cela que les Game Awards (produits par Keighley, donc) ont accueilli dès 2020 le programme The Game Awards’ Future Class.
L’objectif avancé était de profiter des Game Awards et de leur rayonnement pour mettre en avant des personnalités du jeu vidéo représentant un avenir « audacieux, inclusif et plein de promesses pour l’industrie du jeu vidéo ». Ont ainsi été mis en lumière Blessing Adeoye Jr., du podcast Kinda Funny, pour son travail de représentation des voix afro-américaines ; Chantal Ryan, une game designer connue sous le pseudo darkwebSTREAMER, pour son travail sur les structures de pouvoir dans l’industrie ; ou encore Audrey Leprince, de The Game Bakers (Furi, Cairn…) cofondatrice de Women in Game France.
Mais en 2023, les nominés, rejoints par des membres des « classes » précédentes, ont co-signé une lettre ouverte dénonçant notamment le génocide à l’œuvre en Palestine :
« Vu l’état actuel de l’industrie du jeu vidéo, le silence est une prise de position.
Le silence est un soutien tacite.
Le silence, c’est la déshumanisation des Palestiniens.
En tant que membres de la Game Awards Future Class et membres de l’industrie, nous exhortons les Game Awards à briser ce silence. Nous demandons qu’une déclaration soit lue en notre nom lors de la cérémonie du 7 décembre, pour réclamer :
1. Que l’industrie du jeu vidéo s’investisse contre la déshumanisation systémique des peuples d’Asie du Sud-Est et d’Afrique du Nord ;
2. Un soutien franc à la protection des droits de l’Homme en Palestine ;
3. Un cessez-le-feu sur le long terme afin que plus une vie civile ne soit injustement enlevée.
Quand vous nous avez accordé votre confiance pour être les champions d’un avenir meilleur, vous nous avez confié le devoir de vous dire quand et comment faire mieux. » – extrait de la lettre ouverte des membres des Future Class aux organisateurs des Game Awards (traduit par la rédaction)
La réponse à cette lettre ouverte fut le silence. Silence de Keighley, d’abord, qui n’aura pas eu un mot ni pour cette initiative, ni pour la Palestine (ni pour les licenciements à répétition dans l’industrie, ni pour…). Silence imposé aux Future Class, aussi, puisqu’il n’y aura pas eu de nomination en 2024, et qu’on apprend qu’il n’y en aura pas non plus en 2025.
Toute trace de l’initiative a même été effacée du site web des Game Awards, ainsi que l’a noté Bryant Francis sur GameDevelopper.com. Le site relaie un message d’Emily Weir, en charge des Future Class pour les Game Awards, publié sur un canal Discord réservé aux membres des Future Class, les informant que « à l’heure actuelle, nous ne prévoyons pas de nouvelle Future Class pour cette année, et n’avons pas d’autre projet pour les Future Class ».
Parce que mettre en lumière telle ou telle initiative louable, pourquoi pas, surtout si ça peut aider à polir l’image des Game Awards. Mais tendre un micro à des gens qui pourraient prononcer des paroles qui paraitraient désagréables aux oreilles d’investisseurs potentiels, il n’en n’est pas question ! Et puis, supprimer ce programme Future Class, ça libèrera du temps qu’on pourra consacrer aux annonceurs… Quand on sait que la diffusion d’un trailer pendant la cérémonie est facturée 250 000$ la minute, on n’a pas de temps à perdre ! Allez, Geoff, tu nous ressers un Mountain Dew ?

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