Il existe, dans les sous-sols de chaque éditeur, un département sous haute surveillance, dans lequel sont entreposés les corps des protagonistes de toutes leurs licences. Entre mauvaise réception critique, succès commercial en demi-teinte, repos mérité ou burn out avancé, tout le monde y fait un passage à un moment ou un autre de sa carrière. Certains y restent des années, d’autres n’en ressortent jamais.
C’est ici qu’on pratique toutes sortes d’interventions : médecine générale, psychologie, psychiatrie, opérations de chirurgie plastique complexe et même certaines expériences contre-nature. PlayStation ne fait pas exception à la règle. Ces dernières années, c’est dans ces laboratoires qu’ont émergé les différents remakes et remasters de Demon’s Souls, The Last of Us, Horizon Zero Down,… mais aussi des monstres à trois pattes comme Concord et autres jeux services, aujourd’hui encore en développement, enchaînés, ou bien carrément débranchés, laissés pour mort sur leur lit d’observation.
Le cas de Days Gone est cependant plus complexe. PlayStation ayant pendu haut et court tout espoir d’avenir pour la licence. Par respect pour les défunts, nous n’avions pas traité cette information dans la foulée de l’annonce de Days Gone Remastered lors du State of Play du 12 février dernier. Pendant des années, on pensait les corps de ses personnages abandonnés au fond de la fosse commune des exclusivités de la firme, sans avoir eu la chance de passer par la phase sanatorium. Pourtant, quelle ne fut pas notre stupeur de voir déterrer puis ramener à la vie, en plein milieu de la conférence, la silhouette de Deacon St. John, tout juste bon pour le musée Astrobot, il y a seulement quelques mois.
Quelques minutes plus tard, PlayStation affichait sur ses sites, en guise de présentation du jeu : « Surmontez les défis imprévisibles d’un monde post-apocalyptique ». Tout le monde pouvait mesurer l’ironie – ou le tragicomique – de la situation. L’analogie était fascinante de cynisme, la firme ayant fait la sourde oreille pendant toutes ces années plutôt que de redonner une chance à sa licence, préférant faire carburer la majorité de ses studios aux ‘GaaS’. On connait aujourd’hui le résultat. Le bilan énergétique est salé. Des annulations en cascade et surtout un catalogue jeux-solo first party en désuétude. Days gone se devait d’être exhumé. Que de jours perdus…
Il faut se rappeler cependant que la sortie de Days Gone en avril 2019 fut émaillée (oui, le mot est faible) d’une avalanche de bugs faisant naitre sur le web un festival de compilations de Harley Davidson perchées à la cime des arbres, de personnages avalés régulièrement par la map ou encore d’une physique des corps défiant toutes les lois de la gravité. La réception critique fut déplorable. Sony fut vexé, furieux même. Bend Studio n’avait pas décroché toutes les étoiles du « seal of quality » auquel chaque exclusivité doit se plier. Inévitablement, des brouilles opposèrent les deux têtes pensantes du studio à celles de PlayStation. John Garvin, directeur créatif et scénariste principal et Jeff Ross, directeur du jeu, prirent la porte dès 2020, un an seulement après la sortie du jeu. Days gone… et pour toujours.
Avec le recul, on imagine un Sony, à ce moment précis, pas mécontent d’écarter une licence trop proche de son autre cocktail maison « post-apo zombies », le bien nommé The Last of Us. Le second opus devait sortir quelques mois plus tard et Sony avait déjà des plans d’expansion vers d’autres médias. Pas de confusion dans les rangs. Dossier classé.
Pourtant, correctif après correctif, année après année, le jeu se révèle à un grand public qui l’avait boudé lors de sa sortie. Les forêts du nord-ouest américain, théâtre des péripéties de Deacon St. John, prennent le chemin du cœur des joueurs. Les hordes de zombies (toujours aussi impressionnantes à l’écran aujourd’hui) se muent en hordes de défenseurs de la licence. Six ans après sa sortie, on estime à 9 millions le nombre de copies vendues (ps4 et pc compris).
On est en février 2025, déjà conscient de cette anomalie depuis quelque temps et surtout un peu gêné (mais pas plus que ça non plus) par le manque de jeux first party pour sa dernière console, PlayStation décide de refaire le coup du remaster et de rendre vie à son Days Gone, le 25 avril prochain, sur PS5.
Que nous réserve donc cette nouvelle version ? On nous promet un gameplay, une progression, un mode photo et une distance d’affichage améliorés. De nouvelles fonctionnalités d’accessibilité. Et les modes Mort Permanente, Speedrun et certainement le plus attendu le mode Assaut de horde. Un jeu dans le jeu où chacun pourra s’essayer à survivre le plus longtemps possible face à des hordes toujours plus imposantes, hostiles et mobiles. Il vous en coutera 49.99 € ou bien 10 € si vous possédez déjà une copie physique ou dématérialisée du jeu PS4.
Comme à son habitude avec PlayStation, les possesseurs de la version PS+ du jeu ne bénéficieront pas de cet upgrade à prix réduit. Il faudra repasser intégralement à la caisse. Sachez aussi que des vidéos, postés par des « empêcheurs de tourner en rond de vendre en boucle » selon Sony (…), ont commencé à pointer rapidement leur nez sur le net pour vous expliquer qu’il n’y aura aucune différence graphique.
Patientez et faites-vous votre propre avis, une fois les tests ou le jeu sorti. On vous rappellera aussi qu’un patch fait tourner le jeu à 60fps et qu’il est disponible sur PS5 gratuitement depuis des années. Peu importe le support, peu importe la version. Si vous n’avez jamais arpenté les forêts de l’Oregon en compagnie de Deacon St. John, on ne peut que vous conseiller de vous y essayer.
Il existe donc bien, dans les sous-sols de chaque éditeur, un département dans lequel sont entreposés tous les corps de tous les protagonistes de leurs licences. Même Deacon St. John y a eu droit. Remaster facile ou arnaque au porte-monnaie ? Pour beaucoup, peu importe le flacon, pourvu qu’ils aient l’ivresse de voir un jour une seconde partie. Et puis l’espoir fait vivre. Au sens propre comme au figuré. Sony ne le sait que trop bien. Si vous en doutez encore, demandez voir à Deacon. Lui qui a surmonté « les défis imprévisibles d’un monde post-apocalyptoludique »…
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