Si vous vous intéressez à la culture asiatique, notamment nippone ou coréenne, vous savez probablement ce qu’est le White Day. Cette tradition, qui complète la Saint-Valentin, est toute simple. Lorsqu’un garçon reçoit un chocolat le 14 février, il peut décider de rendre une preuve d’affection à l’élue de son cœur en lui renvoyant un mois plus tard une confiserie. C’est cela le White Day. C’est-y pas mignon tout plein ? Aussi quand un jeu se propose de relater cette jolie coutume, on est en droit de s’attendre à un dating sim, un visual novel, un truc avec des jolies lycéennes aux grands yeux colorés et à la chevelure bigarrée. Non ? Non. White Day préfère plutôt vous proposer des fantômes coréens, un lycée flippant et un gardien retors. Accrochez-vous à vos slips, serrez votre doudou très fort dans vos bras et vérifiez qu’il n’y a rien sous votre lit car White Day: A Labyrinth Named School a décidé que la peur devrait remplir vos doux visages et vos sous-vêtements.
White Day: A Labyrinth Named School – Mortelle Saint-Valentin
Chair de poulpe
Hee-Min Lee est un adolescent tout ce qu’il y a de plus banal. Peu charismatique et discret, le jeune gaillard est amoureux de So-Young, la plus jolie fille du lycée. Lorsqu’il reçoit à la Saint-Valentin une boîte de chocolats, le jeunot, n’écoutant que ses hormones, décide de s’infiltrer un soir au lycée afin de glisser son cadeau de White Day dans le casier de l’élue de son cœur (n’y voyez rien de graveleux, bande de petits cochons). Comme on est dans un jeu vidéo, tout ne se passe pas comme prévu. Et notre héros aura vite fait de se rendre compte que si le lycée n’est pas toujours une partie de plaisir, cet endroit se transforme carrément en antichambre de l’Enfer, une fois la nuit tombée.
White Day: A Labyrinth Named School, développé par Sonnori, est un Survival Horror à la première personne, comme il en existe tant sur Steam. Marchant sur les traces d’un Outlast, ou d’un Slender, le jeu vous plonge dans un endroit angoissant à explorer, et colle à vos trousses une menace contre laquelle vous ne pouvez rien faire. Ces jeux ont la particularité d’être très efficaces en termes de tension, car, à l’inverse d’un Resident Evil, aucune pétoire ne viendra vous protéger du croque-mitaine.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que White Day: A Labyrinth Named School réussit parfaitement à instaurer une ambiance très anxiogène. Le titre vous place dans une école sombre, et un travail absolument remarquable sur le son a été fait afin de vous foutre la pétoche, les chocottes, en bref faire que vous ayez les boules, les glandes, même les crottes de nez qui pendent. La musique, tout en syllabes psalmodiées accompagnées du son sec du Gayageum (un instrument à cordes traditionnel coréen) autant que les bruitages (murmures, vent et craquements indistincts) font de ce jeu une usine à cauchemars. Et y jouer au casque, seul, la nuit, est une expérience éprouvante.
Par ailleurs, votre exploration des couloirs du lycée sera parsemée de fiches racontant des légendes urbaines bien flippantes et de nom de dieu de fantômes démoniaques qui ne manqueront pas de venir vous balancer un bon jump scare certes facile, mais toujours efficace. Et pourtant, si vous avancerez la peur au ventre durant le jeu, c’est surtout à cause du Gardien, un vieillard boiteux qui deviendra votre pire cauchemar.
Un collège fou, fou, fou…
Hélas, en dépit de ses qualités, notamment en termes d’ambiance, White Day: A Labyrinth Named School pêche sur de nombreux points. Ainsi, graphiquement, le jeu est vraiment en retard. On pourrait certes rétorquer à cela que le titre était sorti en 2001, et qu’il s’agit là du remaster d’un jeu qui n’était d’ailleurs pas issu d’un énorme studio, mais il n’empêche que parfois ça pique les yeux. Les environnements sont vides, et les ténèbres qui les entourent servent en fait de cache-misère. Les animations, par ailleurs, sont absolument ridicules. Trop rigides, elles transforment les personnages en automates. La modélisation sommaire de ces derniers renforce cette impression, et chaque humain que vous verrez posera sur vous un regard vide de poisson mort.
Aux glitchs graphiques (aliasing, scintillement, clipping…) s’ajoutent d’autres défauts. Notamment une réalisation molle des cinématiques. Il s’en dégage un manque de pep’s que n’arrangent pas les personnages mono-expressifs. Le manque de charisme du héros vient en rajouter une couche. Les développeurs ont par ailleurs fait l’erreur de le rendre muet, ce qui ne facilite pas franchement l’identification. C’est d’autant plus dommage que le doublage coréen est plutôt correct. Enfin, la traduction française est très perfectible, multipliant des fautes qui feraient bondir Azaliz et City, nos intrépides correcteurs.
En termes de gameplay, les défauts viennent également s’accumuler. La maniabilité est aussi rigide que les animations, et le titre n’est pas très agréable à prendre en main. Cette jouabilité tatillonne ne se privera d’ailleurs pas de vous trahir lorsque vous serez poursuivi et que vous vous retrouverez immobilisé parce que le mini-curseur n’était pas exactement placé sur la poignée de la porte que vous aurez tenté désespérément d’ouvrir. Le jeu propose plusieurs fins différentes (14) qui se décident en fonction de vos réponses lors des dialogues. Cependant, les conséquences de vos choix ne seront pas directes. Ainsi, lorsqu’une fille vous demande de lui chercher des éléments, vous pourrez l’envoyer paître si vous le voulez. Néanmoins, vous vous retrouverez tout de même à lui obéir.
Enfin, le Gardien, s’il permet d’instaurer une bonne tension, sera vite plus agaçant que flippant. Une fois qu’il vous aura retrouvé, il ne vous lâchera plus. Même si vous parvenez à le distancer, même si vous fermez toutes les portes derrière vous et que vous vous planquez derrière un bureau dans une salle obscure. Il ne nous est arrivé qu’une seule fois de parvenir à nous défaire de lui efficacement, à la faveur d’une planque dans les toilettes. Et encore, il nous est retombé sur le râble à peine sorti. Par ailleurs, si le vieux chauve est boiteux, vous constaterez qu’il est plutôt rapide, l’animal. Ne croyez pas que sprinter vous permettra de le distancer. Plus que le spectre de la peur, c’est le spectre du rage quit qui pourrait bien flotter au-dessus de la tête du joueur à la patience limitée.
Conclusion White Day: A Labyrinth Named School.
White Day: A Labyrinth Named School est un jeu très intéressant à bien des égards. Son atmosphère, vraiment flippante, notamment grâce à un sound design de qualité, devrait faire la joie des amateurs de survival horror à énigmes et aux amoureux d’horreur à l’asiatique. Ceux qui recherchent des sensations fortes ou qui veulent avoir peur verront leurs souhaits exaucés. Cependant, le jeu souffre de tares assez sévères qui nuisent à l’immersion, ce qui, dans un jeu à ambiance, constitue un très grave défaut. Les fans de la première heure, qui ont joué au titre en 2001, pourraient vouloir se pencher sur le jeu, de même que les amateurs du genre. Cependant, les autres peuvent passer leur chemin sans regret. White Day: A Labyrinth Named School semble s’être perdu dans son propre dédale.