Alors que de nombreux joueurs s’attendaient à, au mieux, une adaptation creuse, et au pire, un charcutage en bonne et due forme, le jeu Robocop – Rogue City fut l’une des très bonnes surprises du printemps dernier. Respect strict de la licence, jouabilité cohérente, et un Unreal Engine 5 parfaitement maîtrisé permettant des qualités graphiques flatteuses pour un AA ont fait du titre un succès qui a peut-être étonné jusqu’à son éditeur, le lillois Nacon.
Il fallait battre l’Homme de Fer tant qu’il était chaud, et quelques mois seulement après la sortie, voici donc Robocop – Unfinished Business, à mi-chemin entre suite et DLC. Montez dans la SUX 6000, on retourne à Detroit.
(Test de Robocop – Unfinished Business réalisé sur Xbox Series X via une copie fournie par l’éditeur)
« J’te connais toi. On t’a tué. On t’a descendu ! »
Sous-titré Unfinished Business, ce nouvel épisode se situe entre la suite et le DLC, et adopte le format stand alone, c’est-à-dire qu’il peut être lancé (et joué) indépendamment de l’épisode précédent, Rogue City, que l’on possède ce dernier ou non. On peut d’ailleurs tout à fait y jouer sans avoir fait le premier épisode, l’histoire étant réellement indépendante. On pense au modèle adopté par Ubisoft pour Far Cry, avec Primal, qui « profitait » de Far Cry 4 (même moteur, même carte…), ou New Dawn avec Far Cry 5.
On replonge donc dans le Detroit rétrofuturiste (futuriste tout court, en 1987, date de la sortie du film, devenu aujourd’hui rétrofuturiste, avec la présence de ses disquettes ou de ses écrans cathodiques) pour une dizaine d’heures de jeu, modulo la difficulté pour laquelle on opte en début de partie. Une durée de vie relativement généreuse pour un DLC, lui donnant des allures de « vrai jeu ».
« Vous appelez ça une anicroche ?! »
Le décors de cet épisode est particulièrement intéressant : Robocop part à la poursuite d’un terroriste ayant volé du matériel à l’OCP, jusqu’au fauteuil informatisé qui sert à sa maintenance au commissariat de Metro West. Or ce dernier s’est barricadé dans une tour de la ville, protégé par une armée de mercenaires, tour dans laquelle des habitants essaient tant bien que mal de survivre, et même pour certains, de résister. Robocop devra alors grimper les étages pour espérer affronter le mystérieux personnage à la tête de cette organisation.
On pense à la cité de Kowloon, magnifiquement mise en scène dans le film City of Darkness (Soi Cheang, 2024). On pense aussi évidemment à The Raid (Gareth Evans, 2011) ou même à Dredd, dans sa version cinéma de 2012 incarnée par Karl Urban (qui est finalement une sorte de Dark Robocop). Dommage : la verticalité, les jeux de niveaux entre étages, ne sont pas très bien rendus en jeu, et on a l’impression d’une progression classique, horizontale, même si des passages par la case ascenseur, ou des passerelles intérieures nous rappellent parfois la situation.
Malgré le fait que le jeu raconte une histoire originale et indépendante, l’ancrage dans l’univers du film de 1987 reste important. Des tags rappellent certaines punchlines du film (« I’d buy that for a dollar »/ « j’en prendrai pour 1 dollar » !), quand le scénario recolle aux origines du projet Robocop à l’OCP, Bob Morton (le personnage du jeune loup ambitieux qui a imposé son idée d’un policier cybernétique, interprété par Miguel Ferrer) est ainsi mentionné, tout comme, au détour d’un document, on retrouve le nom de Clarence Bodicker (le grand méchant du film). Un dialogue avec l’un des habitants, fan de Robocop, deviendra même un quizz à destination des amateurs du film !
Le ton acide du métrage n’est pas non plus oublié, et sans faire du jeu un objet politique qu’il n’est pas tout à fait, la situation des habitants du bâtiments donne lieu à une certaine critique sociale, comme les commentaires sur l’OCP. Les publicités et autres éléments de décors sont aussi l’occasion de commentaires cyniques ou teintés d’humour noir, comme cette affiche pour une crème solaire qui dit « Pas de couche d’Ozone ? Pas de problème ! ».
« Vous êtes un excellent tireur, jeune homme. Vous vous appelez ? »
En tant que stand alone, ce Robocop : Unfinished Business reprend exactement le système de jeu du premier. Même « lourdeur » du personnage dans ses déplacements, même système de visée, même fiche de personnage avec sa progression en deux temps : les point d’expérience qui permettent de débloquer des capacités spéciales, et les cartes électroniques à récupérer en explorant les niveaux qui permettent, via une sorte de mini-jeu, d’augmenter les statistiques du personnage.
La nouveauté ici, c’est le niveau qui permettra de contrôler l’ED209, le bipède lourdement armé, projet concurrent de Robocop à l’OCP, incapable de monter ou descendre des escaliers ( !). En l’introduisant comme personnage jouable (lors d’une unique séquence jouissive), le développeur s’adresse évidemment directement aux fans de la licence, et du film de Verhoeven en particulier !
On notera quand même des petits ralentissements parfois désagréables au moment du chargement des niveaux, et un fondu au noir systématique entre les cinématiques et les phase de gameplay, même quand les cinématiques en question sont réalisées avec le moteur du jeu. Cela dit, ce sont des défauts très mineurs et qui n’entachent en rien le plaisir.
Quiconque a aimé Robocop – Rogue City devrait replonger avec plaisir dans ce DLC aux allures de suite. Les qualités du premier jeu sont toujours là, Peter Weller reprend le rôle qui l’a rendu célèbre, et des petites sucreries viennent attirer le fan, comme la possibilité de contrôler d’une façon éphémère l’ED209.
Le studio Teyon gère toujours aussi bien son sujet, et malgré des légers ralentissement observables de temps à autre, le titre tient très bien la route. Une (nouvelle) excellente adaptation de la licence, qui ne révolutionne pas le genre, ni ne fourmille d’idées originales, mais qui réussit parfaitement ce qu’elle tente de faire.