Sorti le 8 février dernier, OlliOlli World est arrivé en grande pompe. Le jeu de skate du studio britannique Roll7 signe un renouveau complet de la série. Les ambitions du studio ont été revues à la hausse, et c’est peu de le dire. La différence entre les deux premiers OlliOlli et ce dernier opus se fait de suite sentir.
OlliOlli Word est bourré d’inspirations en tous genres, assumées pour la plupart. Que ce soit sur le scénario (certes pauvre), le gameplay, la direction artistique et la musique, le jeu est un savant mélange de pleins d’éléments qu’il transcende pour donner un jeu de skate unique. Rien n’a de sens, et c’est tant mieux ! Au bout de quelques heures, vous ressentirez un « flow » d’émotions un peu particulier, que l’on essaiera de pointer du doigt au fil de ces lignes.
(Test d’OlliOlli World sur PlayStation 4 réalisée via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Tout est bizarre, et on aime ça
Les premières impressions quand on lance le jeu, c’est clairement l’ambiance générale qui s’en dégage. OlliOlli World est un peu le « Rick et Morty » des jeux de skate. Il y a des références et des inspirations partout, et le produit final met le n’importe quoi à l’honneur. Dans l’aventure, tous les personnages sont un peu étranges. La squad, l’équipe qui nous accompagne, avec Mousseline, Mike ou encore Papa, est une belle bande de joyeux lurons. Il y a aussi les divinités du monde de Radlandia avec Technicolas par exemple qui représente à lui seul ce genre de personnage un peu bizarre, qu’on apprécie pour ça justement.
Rien n’a réellement de sens, l’histoire, complètement anecdotique et « skippable » (merci), se base sur un scénario classique de manga shônen. Toutes les x années, un élu du skate peut apporter la paix dans le monde et peut atteindre le Gnarvana ; des milliers de skateurs à travers Radlandia se battent alors pour remplacer Mousseline, le dernier maître skateur.
On ne va pas se mentir, le scénario n’est pas et ne doit pas être la raison de votre achat. À chaque début de stage, on peut directement partir dans le niveau sans avoir besoin d’écouter l’histoire ou de suivre les dialogues (souvent à rallonge). C’est d’ailleurs l’un des principaux défauts du jeu. L’enrobage scénaristique n’est là que pour faire beau, mais en même temps, est-ce qu’on est là pour ça ?
Le studio Roll7 s’est laissé aller en termes d’imagination. Rien qu’à la création de personnages, avec tous les cosmétiques et les habits disponibles, on peut soit créer un skateur de l’extrême, soit un monstre difforme dont vous pouvez choisir la couleur de peau. Le jeu n’est d’ailleurs pas genré. Vous ne créez pas d’homme ou de femme, juste un avatar à votre goût. Un jeu dans l’ère du temps. Un point à ne pas négliger aussi : OlliOlli World a cette ambiance un peu progressiste : rien n’est réellement connoté ou genré, tout le monde vit en harmonie, qu’on soit un homme glace, un poulpe, un humain ou n’importe quel organisme vivant.
Même au niveau de la musique, le jeu utilise beaucoup d’électro et de lo-fi. Le titre se la joue classe, stylé, moderne, et propose une ambiance « chill » pour qu’on ait envie de rester longtemps. Et spoiler : ça marche. On peut passer des heures à refaire les mêmes niveaux en boucle, en étant réellement impliqué, ou simplement en ayant envie d’être tranquille sur le jeu.
Mais cette ambiance un peu bizarre n’est pas là pour combler un gameplay pauvre en ressources ou en rejouabilité, bien au contraire. C’est là tout le cœur du jeu, un gameplay calibré tout le long du titre et qui en a toujours en réserve pour nous impliquer cognitivement, et on a ressenti un sentiment rare dans un jeu vidéo : le flow.
Big Flow et Olli(Olli)
Le flow est un sentiment de concentration extrême, que ce soit dans un jeu vidéo, mais aussi dans n’importe quelle activité. Ce concept a été pour la première fois utilisé par le professeur en psychologie Mihály Csíkszentmihályi dans son livre « Flow: The psychology of optimal experience ». Il définit l’état de flow comme un état de concentration extrême et une implication cognitive au maximum où la perception du temps est altérée. Plus concrètement : vous voyez ce moment où votre cerveau fait le vide, que vous ne pensez à rien d’autre qu’à l’action que vous êtes en train de faire, et que dans le cadre du jeu vidéo, vos doigts réagissent sans que vous vous en rendiez compte comme si cela était naturel ? C’est ça, l’état de flow.
Tous les jeux ne peuvent pas nous faire ressentir cela. On pense d’abord aux jeux de stratégie ou aux 4X par exemple, mais cela n’est évidemment pas leur but. Mais même les jeux nerveux ne nous font pas forcément ressentir le flow. Étant donné qu’il faut jongler entre la rejouabilité et l’apprentissage de toutes les commandes du jeu sans noyer d’informations le joueur, c’est un équilibre à atteindre. Et encore, chaque personne ne va pas forcément réagir de la même façon face au même jeu.
Mais OlliOlli World nous a fait ressentir cela. Comme on vient de le dire, la maîtrise de toutes les techniques est primordiale pour pouvoir être pleinement impliqué. Mais au début, le jeu peine à démarrer, et on a ressenti un grand moment de flottement pendant les dix premiers niveaux. Tout était simple et on s’est demandé où le jeu allait nous emmener. Mais c’était pour mieux nous attraper par la suite. Il existe un bon nombre de tricks qui ne dépendent que de votre stick gauche, mais il y a aussi les grabs, les manuals, les rotations, et bien d’autres techniques qui vont être distillées tout au long des six mondes de Radlandia. Ce qui fait qu’au final, on se retrouve à devoir jongler entre toutes ces commandes que l’on a apprises petit à petit, et même si cela est particulièrement difficile, on y arrive.
Plus qu’un jeu de skate, si vous voulez parcourir tranquillement les stages, vous pouvez prendre OlliOlli World comme un jeu de plateforme classique. Personne ne vous en empêche. Vous êtes libre comme l’air. Mais si vous êtes là pour la compétition, vous trouverez aussi votre compte. Quand on voit les fantômes des meilleurs temps mondiaux sur un niveau, ça fait peur. Il y a des joueurs et des joueuses qui ne sont pas là pour rigoler.
En définitive, OlliOlli World est une petite pépite de ce début d’année, et on pèse nos mots. Le jeu est rempli d’idées malines pour qu’on prenne réellement du plaisir au sens littéral du terme. Les personnages sont complètement barrés, l’univers étrange, et on se retrouve avec un OlliOlli doté d’une réelle proposition comparé aux deux premiers opus. L’ambition est là et l’expérience vaut le détour.
Roll7 s’est surpassé sur ce coup, et a très bien réussi à nous apprendre toutes les petites spécificités du jeu pour qu’on arrive à en profiter à fond. On regrettera seulement de ne pas avoir eu une histoire ou des dialogues un peu plus intéressants, mais honnêtement, est-ce que vous allez acheter OlliOlli World pour son histoire ? On en doute fortement. Nous, on repart faire des tricks !