Après des mois de rumeurs, de fuites plus ou moins discrètes et d’espoirs, Bethesda nous a enfin lâché la bombe tant attendue. The Elder Scrolls IV: Oblivion Remastered est arrivé sur PC, PlayStation et Xbox, le jour même de son annonce officielle. Le retour « surprise » de ce monument du RPG occidental a réussi à provoquer son petit effet : des dizaines milliers de spectateurs en direct sur le stream d’annonce, des cris de joie dès les premières notes du thème principal lors de la révélation (nous aussi, on a eu un petit frisson en l’entendant), et des ventes qui explosent. Oblivion Remastered est déjà troisième jeu le plus vendu de l’année 2025.
Le titre joue à fond la carte de la nostalgie. On nous avait promis une refonte graphique complète et diverses améliorations pour nous replonger dans l’aventure avec notre héros de Kvatch, tout en conservant l’essence du titre de 2006. Mais une fois les premières émotions passées, la question est de savoir si ce remaster était vraiment nécessaire. Le jeu tient-il toujours la route et surtout, à qui s’adresse cette version remise au goût du jour ?
(Test de Oblivion Remastered réalisé sur PC à partir d’une copie commerciale)
Retrouver ses premières amours
Pour quiconque a adoré le jeu original, il suffit de quelques instant sur Oblivion Remastered pour que la magie opère. On lance une partie, on se retrouve en prison, on crée son personnage et l’empereur Uriel Septim débarque dans notre cellule pour fuir ses assassins. Il connait notre visage (qui, en 2025, est enfin agréable à regarder) et finit par nous donner son amulette avant de mourir. Notre mission : retrouver son fils Martin et le conduire à sa destinée.
Comme à l’époque, la sortie du tutoriel dans les égouts et la découverte du monde ouvert qui s’offre à nous procurent le même frisson. La liberté totale, la musique, les voix (uniquement en anglais) des PNJs, le plaisir de se balader sans but et de tomber sur de nouvelles choses à faire : tout revient comme au premier jour.
On façonne son personnage (plutôt magicien, assassin, guerrier ? peu importe, tout est malléable), on monte ses compétences, puis on se régale en redécouvrant les quêtes annexes. Retrouver le fils de l’empereur devient vite secondaire quand on grimpe les échelons de la Confrérie Noire ou qu’on visite les ruines ayleides. Le jeu reste bourré de moments forts, et les redécouvrir avec cette refonte graphique complète est un vrai bonheur. C’est l’une des grandes réussites de cet Oblivion Remastered : la province de Cyrodiil n’a jamais été aussi agréable à parcourir.
Le sort d’illusion s’estompe ?
Si les fans verront ce remaster comme un retour à la maison, les limites apparaissent vite une fois l’effet nostalgique estompé. C’est bien là tout le problème : au fond, Oblivion Remastered, c’est juste Oblivion avec une couche de peinture neuve par-dessus.
Parlons d’abord des nombreux bugs, toujours présents. Rien de bien dramatique, mais entre les PNJs qui se coincent dans les décors, les animations qui partent en vrille, et les objets qui s’envolent sans raison, ça pique un peu. Certains y verront un charme rétro assumé, d’autres un manque de finitions qui n’est que trop habituel dans les jeux Bethesda.
Plus embêtant encore, les soucis de performance. Des chutes de framerates, du flou qui vient parasiter l’écran au point de rendre le tout complètement injouable après un chargement, des lags et quelques plantages… Autant de problèmes qui nuisent à l’expérience.
Et puis il y a le gameplay. Les combats sont toujours aussi flottants. Malgré la promesse d’un système plus dynamique avec des animations retravaillées, force est de constater que le résultat n’est pas vraiment au rendez-vous : les affrontements manquent d’impact et de stratégie. Les villes, elles, semblent figées et peu vivantes selon les standards actuels. Rien de honteux en soi, mais on sent que le jeu a vingt ans.
Une porte vers le passé
Quand Bethesda a montré les premières images du jeu, certains ont cru à un véritable remake tant les promesses étaient nombreuses. Mais après quelques heures passées à arpenter Cyrodiil, on comprend qu’Oblivion Remastered porte bien son nom. Un remaster généreux certes, mais un remaster quand même.
Est-ce un problème ? Pas forcément. Les fans de la première heure seront ravis de revivre les émois d’antan dans une version visuellement digne de leurs souvenirs. Tout ce qu’on aimait est là, et à ce niveau, c’est un vrai plaisir. Mais à condition d’accepter qu’il s’agit d’une relecture confortable d’un classique qu’on connaît déjà par cœur. Et dans ce cas, pourquoi ne pas simplement se tourner vers l’original ?
Pour les nouveaux joueurs, la proposition pourra sembler plus bancale. Oblivion reste un excellent RPG, un de ceux qui a marqué son époque, avec une écriture solide, un univers mi-sérieux mi-loufoque (parfois involontairement), et des quêtes mémorables. Mais il faut aussi accepter ses mécaniques rudes (par exemple l’alchimie ou tout simplement la navigation dans les menus) et ses combats datés. Si on découvre The Elder Scrolls aujourd’hui avec ce remaster, après des titres récents comme Baldur’s Gate 3 ou Kingdom Come: Deliverance 2, l’expérience risque de décevoir…
Alors finalement, à qui s’adresse ce remaster ? Les fans, clairement, y trouveront leur compte et se régaleront. Les curieux, eux, pourront apprécier à condition d’être prévenus : ce qu’ils ont entre les mains n’a rien à voir avec un RPG moderne, malgré les apparences.
Oblivion Remastered n’essaie pas de révolutionner quoi que ce soit. C’est une madeleine de Proust, qui réussit parfaitement son effet. Une madeleine bien dorée, avec un goût de reviens-y, qui réutilise tous les ingrédients de la recette d’époque, mais sans vraiment innover. Et surtout, une madeleine au prix d’un jeu moderne, alors que l’original, qui offre peu ou prou la même chose, ne coûte qu’une quinzaine d’euros.