Le jeu vidéo français n’est pas que Clair Obscur, et le jeu indépendant n’est pas qu’Hollow Knight. On découvre parfois de petits studios et des productions discrètes simplement en se promenant dans les méandres de Steam ou au fil de longues divagations sur les réseaux sociaux. Aujourd’hui, c’est Monsters Are Coming qui nous a tapé dans l’œil. Le titre, développé par Ludogram et édité par Raw Fury, se présente comme un Tower Survivor. Voyons ensemble si l’originalité vendue réussira à tenir la cité en place.
(Test de Monsters Are Coming ! sur PC via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Le Château ambulant
Comme précédemment mentionné, Monsters Are Coming se targue d’être un Tower Survivor, et c’est plutôt exact. L’équipe en charge du marketing a évité l’écueil principal qui aurait été de placer un maladroit « tower defense » au profit de cette description difficilement remplaçable par d’autres mots.
Nous avons là un cocktail très bien résumé : on se promène dans un scrolling vertical forcé et l’on collecte des ressources qu’il faut rapporter à la cité qui avance inexorablement. Le bois améliore les capacités offensives tandis que la pierre permet de réparer la durabilité. Ajoutons à cela de l’expérience, qui se présente comme dans tout bon Survivor, permettant ainsi d’ajouter des bâtiments à l’amalgame ambulant.
Le petit twist sympathique de ce côté « tower » du survivor, c’est la possibilité de placer adroitement les différentes tuiles que le jeu nous accorde. Ainsi, une ferme générera plus d’or si elle est adjacente à d’autres fermes (et réciproquement), et une manufacture de munitions augmentera la vitesse d’attaque de toutes les tours qui s’y collent, offrant ainsi tout un ensemble de synergies intéressantes.
Mais, hélas, le système s’arrête là. Une fois que les tours sont habilement placées sur la grille, il n’y a plus rien qui nous pousse à y réfléchir un peu plus ou à nous sortir de la zone de confort. On aurait pourtant pu imaginer des tuiles en L ou des ensembles plus gros pour complexifier le placement. Pire encore, le jeu nous place presque nécessairement dans un archétype : si l’on reçoit une tour d’invocation dans les premiers roulements, il est souvent plus rentable de continuer sur cette voie que de tenter de changer de build, tant l’interaction entre certaines tours est groupée.
Cet effet est encore accentué puisque, naturellement, on débloque de nouveaux éléments qui vont de pair avec ce qui a été utilisé pour le débloquer : jouer avec de la glace débloquera surtout des tours de glace, influençant encore un peu plus vos parties de sorte à vous enfoncer dans cet archétype. Rassurez-vous néanmoins, il y a tout de même une belle ribambelle de choix variés qui viendront titiller votre réflexion.
Maison de brique, progression de paille
L’autre principal point négatif est le système de méta-progression. Le survivor est généralement un genre où le contenu fait foi, tandis que les chiffres (bien que la partie la plus importante) sont considérés comme une acquisition un peu moins « fun ». Avec Monsters Are Coming, cela ne manque pas : on déverrouille des boussoles avec lesquels on peut améliorer nos compétences globales.
Le système en lui-même est ici un désavantage certain du titre. Les améliorations chiffrées ne sont pas assez visibles une fois en jeu et nécessitent un laborieux travail de collecte. Plus on avance dans la partie, plus on déverrouille de cette monnaie, à raison de 5 % par 5 % dans la majorité des cas. Autant dire que pour un système qui se veut être une aide à la progression, c’est raté.
Cette méta-progression devient plus intéressante au fur et à mesure de l’avancée dans les difficultés, car si l’on décide d’améliorer son héros par ce système, il vaut mieux choisir des tours qui correspondent à cette façon de jouer. C’est stratégique, mais c’est aussi un peu tard : il aurait fallu être pertinent dès le début.
Des fondations solides
Nous ne sommes pas là pour tabasser le jeu dans une ruelle, même si nous n’avons pas été très tendres jusqu’ici. Passé l’aspect frustrant des systèmes qui auraient pu être excellents, le titre est incroyablement addictif. Terminer une partie nous laisse toujours avec l’envie d’en relancer une, que la précédente ait été une réussite ou non.
Perdre dans Monsters Are Coming est un processus qui prend du temps, on a généralement le temps de voir l’échec venir. C’est un peu fataliste, mais en voyant la ville ambulante perdre ses points de vie et le chemin qu’il reste à parcourir, on sait plus ou moins si l’on est sur la bonne voie.
C’est ce momentum qui donne envie d’y retourner, d’autant plus que toute la partie active du titre est très bien ciselée grâce à des prises de décisions permanentes basées sur nos choix précédents. On se pose presque constamment une question : faut-il aller chercher du bois, de la pierre, de l’or, cet événement sur le côté, ou attaquer les monstres à l’arrière ? C’est un véritable casse-tête qu’il est à la fois satisfaisant de défaire et peu frustrant si l’on n’y arrive pas, tant les options disponibles justifient un nouvel essai.
Le titre de Ludogram pourrait finalement se résumer à bien peu de mots : c’est un jeu super enrobé d’une méta-progression bien en deçà de son potentiel. Certes, le système est vu et revu chez les concurrents, il paraît donc logique de rester dans les clous par souci de sûreté. Il est néanmoins dommage de ne pas avoir voulu y injecter un peu plus d’originalité.
Et pourtant, une fois en jeu, Monsters Are Coming coche toutes les cases : c’est fun, addictif et assez original pour être recommandable à quiconque apprécie l’un ou l’autre des deux genres abordés. La majorité des problèmes soulignés n’en font pas un mauvais jeu, tout ce qui concerne la progression peut facilement être amélioré par le biais de petites mises à jours et il serait dommage de pas se laisser tenter, d’autant plus que le prix sur l’étiquette n’est pas bien élevé pour un titre de cette qualité.


