L’éditeur français Microids s’est fait une spécialité ces dernières années d’adapter les classiques de la bande dessinée franco-belge en jeux vidéo : très récemment, Les Schtroumpfs, mais aussi Astérix et Obélix, Les Tuniques Bleues, XIII, Titeuf, Blacksad… et donc Le Marsupilami, créature née sous le crayon d’André Franquin (Gaston Lagaffe), et spin-off de la série Spirou et Fantasio. Sans actualité particulière autour du personnage, on se dit que le jeu pourrait échapper à la malédiction des adaptations ratées, non ?
(Test de Marsupilami : Le Secret du Sarcophage réalisée sur Xbox Series X via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Hoobadventure !
Le titre anglais du jeu est bien plus cool : Hoobadventure, d’après le cri du Marsupilami, « Hooba-Hooba ! ». Cependant, le titre français est plus honnête. « Le Secret du Sarcophage » est un titre basique au possible, ce qui correspond bien au scénario du jeu. Les Marsupilamis étaient en effet tranquillement en train de chiller sur la plage, quand le ressac leur apporte une relique étrange, qui libèrera sur la Palombie une malédiction que les… singes ? marsupiaux ? euh… que les Marsupilamis, donc, devront éliminer.
On ne connaîtra ni les motivations du spectre qu’on affronte dans le jeu, ni celles des marsus, qui se mettent immédiatement à courir derrière lui pour parcourir les trois mondes de ce jeu de plateforme en 2,5D.
Basique, la proposition ludique l’est aussi. Il s’agit d’un platformer à défilement horizontal, tout ce qu’il y a de plus entendu. On y trouve tout ce qu’on est en droit d’attendre d’un jeu du genre, avec les collectibles à récupérer pour finir le jeu à 100%, mais qui ne freinent pas totalement la progression si on ne s’en occupe pas, les « pièces » (des fruits, ici) qui, par centaines, donnent des vies supplémentaires, les accès un peu cachés recélant des coffres au trésor, etc.
Tout ce qu’on est en droit d’attendre, sauf peut-être une proposition un peu originale et quelques surprises. Seul un type de niveau, baptisé « dojo » et joué en ombres chinoises, présente un peu d’originalité.
Ré-trop ?
Alors attention, on ne dit pas que le jeu est mauvais. Simplement qu’on y a déjà joué mille fois, et sur toutes les consoles depuis la génération 8 bits. Cela nous rappelle d’ailleurs l’Astérix, par et pour Atari, en 1983. Non pas en termes de gameplay (on parle quand même de l’Atari 2600 !), mais au niveau de l’usage de la licence et du personnage. Pour rappel, l’Astérix de 1983 était en fait le jeu américain Taz (le Diable de Tasmanie des Looney Tunes – Bugs Bunny & co.) dans lequel on avait simplement remplacé le sprite représentant Taz par la tête du gaulois moustachu. Une décision marketing basée sur le sentiment qu’Astérix était plus populaire que Taz en Europe, et donc plus vendeur.
Ici aussi, on se dit que le Marsupilami n’est qu’un skin posé sur un jeu de plateforme quelconque. D’autant que la principale force du personnage, sa queue, n’est jamais réellement mise à profit. Certes, on peut puncher les ennemis ou les objets avec, mais c’est tout. On ne peut rien attraper ou lancer, on ne peut pas s’accrocher ou se balancer aux arbres, ou autres, on ne peut pas non plus rebondir dessus comme sur un ressort, un move pourtant classique du personnage. On n’a d’ailleurs vu aucune différence, si ce n’est graphique, entre les trois Marsupilamis qu’on peut choisir d’incarner.
Le jeu n’accompagne pas une sortie cinéma ou BD, ne met pas vraiment à profit le personnage qu’il met en scène, et ne fait même pas de proposition notable avec Le Secret du Sarcophage. On peut alors raisonnablement se demander ce qui a motivé le projet.
Un jeu d’enfant
On l’a dit, le jeu n’est pas spécialement mauvais, mais est vraiment trop générique. Là où il pourrait être intéressant, c’est auprès d’un public de très jeunes enfants, en tant qu’initiation au genre. Car le titre est aussi extrêmement facile. En ayant pris la précaution de démarrer l’aventure à la difficulté la plus grande, on a tout de même roulé dessus, obtenant très vite le nombre maximum de vies (le compteur bloque à 99), et ne le voyant diminuer qu’à de trop rares occasions. Seuls les deux derniers niveaux, sur la trentaine que compte le jeu, nous ont un peu résisté.
Le jeu peut par contre se montrer super accueillant pour un enfant encore peu habitué aux jeux vidéo et aux manipulations qu’exige un pad. De même, le bestiaire très réduit, ce qu’on aurait envie de regretter, leur permettra d’identifier très vite et très rapidement les dangers auxquels ils devront faire face.
Le design des Marsupilamis, tout en rondeur et en 3D, quelque part entre l’original de la bande dessinée et celui du film d’Alain Chabat, semble aussi avoir été calibré pour plaire aux plus jeunes. Un jeu qui pense aux enfants sans trop se présenter comme un produit infantilisant. On ne peut que saluer l’effort. Alors, c’est peut-être la raison d’être du jeu, et le taire au niveau du marketing risque de lui coûter cher, car en l’état, le grand public risque fort de lui tourner le dos…
Avec une histoire complètement transparente, voire inexistante, un personnage dont l’identité n’est absolument pas convoquée, et un gameplay tellement déjà-vu qu’on se croirait devant un jeu rétro, Marsupilami : Le Secret du Sarcophage ne risque pas de convaincre le joueur moyen. Ce sera par contre un très bon premier jeu de plateforme pour les très jeunes joueurs. Pour les plus vieux, on conseillera plutôt l’unique autre adaptation vidéoludique du Marsupilami, sortie en 1995 sur Mega Drive. Le jeu, un puzzle-platformer, tirait vraiment parti du personnage et de sa queue multi-usage.
Et puisqu’on en est aux recommandations, allez également jeter un œil à « La Bête », un très bon album signé Frank Pé et Zidrou sorti en 2020 et qui porte un œil vraiment neuf sur le personnage de Franquin. Ce qui aura manqué au jeu.