À peine un an après la sortie de Like a Dragon: Infinite Wealth, le studio Ryu Ga Gotoku sort déjà Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii. Mettant en scène Goro Majima, le fantasque meilleur ennemi de Kiryu Kazuma, le jeu est un peu ce que les épisodes Primal et New Dawn sont à Far Cry 4 et 5 : un spin-off recyclant la carte du jeu précédent.
Si on est habitué à la grandiloquence de la saga, le titre de ce nouvel épisode est à lui seul une promesse d’immense WTF ! Alors le jeu est il un plaisir coupable un peu trop sucré, ou une variation dispensable exploitant le succès de la saga ?
(Test de Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii sur PC réalisé via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
« C’est pas l’homme qui prend la mer… »
Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii est un peu au jeu de pirate ce que la chanson de Renaud est aux chansons de marins : un pastiche rigolo. Dès le début du jeu, on comprend que rien ne sera sérieux quand le titre s’ouvre sur une mise en place qui vient parodier celle d’Infinite Wealth.
On se souvient de cette introduction durant laquelle Ichiban Kasuga est recraché par la mer sur une plage d’Hawaii, nu, et ne sachant ni où il est, ni ce qui lui est arrivé. Une entrée en matière répétée dans Pirate Yakuza, mais cette fois, c’est Goro Majima, le chien fou de Shimano et l’antagoniste éternel de Kiryu Kazuma, qui échoue sur le sable d’Hawaii, privé de sa célèbre veste en peau de serpent et de sa mémoire.
Une réinterprétation d’une même scène qui vient signifier la nature de cet épisode, lui-même une reprise du jeu précédent. On y retrouvera ainsi la même carte d’Honolulu, et de nombreuses activités secondaires et personnages que nous connaissons déjà, pour un jeu hors-série, titre intermédiaire entre deux épisodes principaux comme l’était The Man Who Erased His Name.
« Que le Diable nous emporte, on n’a rien trouvé de mieux… »
Le générique du jeu mis en scène comme un extrait de comédie musicale, avec un Majima en costume de pirate, mais de pirate de carnaval ; le titre du jeu lui-même, alignant des termes qui n’ont rien à faire les uns avec les autres (Pirate/ Yakuza/ Hawaii ?!!) ; ou encore le choix de Goro Majima comme personnage principal, le Goro Majima capable, tel un Droopy sous ecsta, de sortir d’une bouche d’égout ou d’une poubelle pour surprendre et défier Kiryu dans les missions « Majima Everywhere » des premiers jeux ; tout cela nous indique que Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii abandonne pour un temps la gravité et le côté dramatique de la saga pour ne se concentrer que sur sa moitié burlesque.
C’est dans cet esprit que le studio use de la ficelle un peu grosse, voire caricaturale, d’un Majima amnésique pour s’autoriser tous les excès, comme celui d’en faire un pirate. Une idée qui, à tous les coups, est née d’une blague autour du cache œil qu’arbore le personnage…
Cette accusation en manque d’originalité ou d’imagination sera finalement à réévaluer à la toute fin du jeu, qui suggère que Majima a feint son amnésie pour pouvoir se lancer dans la chasse au trésor que raconte cette aventure… Mais nous n’en révélerons pas plus !
« Aux sombres héros de l’amer/ qui ont su traverser les océans du vide… »
Le scénario sera donc un prétexte à jouer au pirate avec Majima. On lui met deux épées dans les mains, on nous rend le système de beat’em up des premières heures de la série, et c’est parti pour deux à trois dizaines d’heures de « button mashing » à travers les vagues d’ennemis qui peuplent Hawaii et les îles environnantes.
Car le jeu demande d’alterner entre les phases à Honolulu, sur la carte du Like a Dragon précédent, et l’exploration des océans à la recherche de trésors de pirates. Sur les mers, dans des environnements restreints et un peu dépouillés graphiquement, on affronte des navires ennemis à coupe de canons. Ces derniers sont bien entendu sur les côtés du bateau, et nous obligent à composer avec l’inertie de la navigation en mer pour se positionner correctement afin de tirer, et pour échapper aux assauts des adversaires. Une mécanique de jeu pas très profonde, mais pas désagréable à jouer, et qui apporte un peu de nouveautés à un titre tout de même placé sous le signe du recyclage.
On participera aussi à des phases quasiment « muso », où il s’agira d’affronter des hordes d’ennemis particulièrement nombreux. Des phases hélas un peu illisibles, l’écran étant envahi de personnages et d’effets, durant lesquelles on tapera frénétiquement sur les touches d’attaques en espérant que la chance fasse partie de l’équipage.
« Tiens bon la vague et tiens bon le vent… »
Contrairement, pour une fois, à l’écriture, l’aspect que le studio Ryu Ga Gotoku ne néglige pas dans cet épisode, c’est la générosité, marqueur identitaire de la saga. On peut tout à fait imaginer ne jouer qu’à Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii pendant des semaines tant il y a de choses à y faire.
Aux côtés des traditionnels jeux de fléchettes, tables de billards, shogi (auquel on ne comprend toujours rien…), base ball, golf, karting, UFO catcher et jeux d’arcade SEGA (pour cet opus : Spike Out, Fighting Vipers 2, The Ocean Hunter, Sega Racing Classic 2, et Virtua Fighter 3) – ce qui représente déjà une belle quantité d’heures de jeu, nous avons accès dans les planques du jeu à une console Master System équipée de base de 5 jeux, et une dizaines de cartouches sont à retrouver en arpentant la carte.
Il sera ainsi possible de rejouer à Alex Kidd in Miracle World, aux Fantazy Zone, à (notre préféré) Penguin Land… Avec en plus un système de « rewind » propres au émulateurs modernes permettant de réellement profiter des jeux sans s’arracher les cheveux sur la difficulté de l’époque et l’impossibilité de sauvegarder… !
Enfin, le jeu propose aussi à Madlantis, le complexe de loisirs pensé pour les pirates ( ?!) des compétitions de batailles navales reprenant le système de combats décrit ci-dessus.
Like a Dragon: Pirate Yakuza in Hawaii est une récréation dans la série, un jeu mineur qui permet de retrouver pour un temps le système de combat des premières heures, et de suivre Goro Majima dans son délire de cosplay (on connait sa passion pour le travestissement depuis les tout premiers jeux !). On le déconseille plutôt aux joueurs ne connaissant pas la série, qui risquent de ne rien comprendre au délire grand-guignolesque que représente le jeu. L’habitué, lui, retrouvera avec plaisirs la foule d’activités qui fait à chaque fois le sel de chaque épisode, mais il lui manquera probablement une profondeur d’écriture et de mise en scène qui fait habituellement la marque de Ryu Ga Gotoku. On s’aperçoit aussi avec cet épisode que le moteur commence à vieillir.
On pourrait accuser SEGA d’exploiter éhontément la licence à l’aune de son désormais succès international. On trouve, au contraire, qu’il faut oser sortir un tel titre, presque illisible pour le néophyte, au risque de voir de potentiels nouveaux joueurs découvrir la saga avec cet opus et s’en détourner immédiatement ! Cela dit, il va falloir frapper très fort avec le prochain épisode pour que celui-ci retrouve la grandeur acquise avec les épisodes 6 et 7… Vivement !