Bien qu’étant devenue une composante de plus en plus présente des jeux d’action/aventure AAA, l’infiltration, en tant que genre à part entière, se fait au contraire de plus en plus rare. Alors, comme bien souvent lorsque l’on est à la recherche de rareté vidéoludique, il faut se tourner vers la scène indépendante. On peut ainsi y dénicher une œuvre telle que El Hijo: A Wild West Tale, un jeu d’infiltration pur jus, baignant dans une ambiance Western.
D’abord annoncé durant l’E3 2019, le titre développé par Honig Studio et Quantumfrog restera sous les radars jusqu’à l’été dernier, pour finalement sortir le 3 décembre 2020 sur PC via Steam et GOG, sans oublier Stadia. On notera que la trinité des consoles de salon ne sera pas en reste, malgré l’absence de date de sortie.
Mais pour l’heure, il est temps de se pencher avec attention sur ce jeu d’infiltration qui ne vous demandera pas d’enchaîner les coups de surins ou les étranglements façon Hitman, pour la simple et bonne raison que l’on y incarne un petit garçon de 6 ans. Alors rangez vos lames et sortez votre lance-pierre.
(Test d’El Hijo: A Wild West Tale sur PC réalisé via une version fournie par l’éditeur)
Comme dit précédemment, le jeu nous place dans la peau d’un jeune garçon de 6 ans déposé par sa mère dans un monastère suite à l’attaque de la ferme familiale. Un monastère où il ne fera pas long feu, se mettant in medias res en quête de sa chère maman partie régler leur compte aux bandits incendiaires.
La quête d’El Hijo (le fils en espagnol, bien que l’on puisse aussi voir un jeu de mots avec le terme anglais Hero) se découpe en une trentaine de niveaux en vue isométrique qui l’amèneront à traverser, discrètement, des environnements récurrents du Western : du monastère mexicain dans la roche au désert aride, en passant par la mine et le campement de bandits.
Désireux de créer un jeu d’infiltration accessible aux plus jeunes et par conséquent non-violent, Honig Studio a donc fourni son jeune protagoniste en armes non-létales. Ainsi, le fiston pourra user au choix d’un lance-pierre ou de soldats mécaniques pour détourner l’attention des ennemis, voire carrément de feux d’artifice et de bombes fumigènes pour les aveugler et passer sans encombre.
À cet arsenal de gadgets, on peut aussi ajouter la capacité du petit bonhomme à se cacher, mais également un petit oiseau permettant d’avoir une vision plus globale du niveau en plus de faire apparaître les cônes de vision des adversaires.
Tous ces éléments, couplés à la gestion du bruit et une interaction avec certains objets et personnages, permettent des approches variées de chaque niveau. Surtout que ceux-ci possèdent plusieurs chemins vers la sortie, avec des objectifs secondaires en la forme d’enfants qu’il faudra inspirer à la liberté via notre fugue. Trouver tous les enfants viendra allonger l’expérience de jeu jusqu’à neuf heures contre cinq heures en ligne droite.
Malgré tout, le jeu souffre d’une certaine redondance une fois quelques niveaux bouclés. Bien qu’amusantes et tout à fait ludiques, les différentes mécaniques de gameplay restent très classiques, en particulier pour un habitué du genre. De plus, s’il existe différentes voies à emprunter, le level-design reste assez dirigiste.
On ne manquera pas de relever quelques bugs divers comme la disparition de l’interface ou l’incapacité temporaire de se cacher qui viendront forcément irriter davantage, surtout si le niveau en cours semble déjà rébarbatif. Au passage, on vous invite à faire l’aventure équipé d’une manette, le jeu ayant clairement été développé pour être joué dans cette condition.
Néanmoins, plus que des défauts (les bugs mis à part), ce sont de véritables intentions de réalisation de la part des personnes derrière El Hijo: A Wild West Tale. Cette « simplicité » dans le gameplay corrobore le choix de créer un jeu non violent dans le but d’être accessible aux plus jeunes joueurs et joueuses. Une intention que l’on retrouve dans les autres aspects du titre.
À commencer par sa direction artistique qui, bien que baignant dans les mêmes teintes de jaune et d’orange, séduit sans peine grâce à une esthétique cartoon relativement épurée, faite de graphismes en cel-shading, tout en aplat de couleur. Les différents niveaux parcourus ressemblent alors aux chapitres d’un livre jeunesse, sans texte, et dont la narration passerait seulement par l’image.
Et c’est justement ce que fait El Hijo: A Wild West Tale. Totalement dépourvue de dialogues et hormis une poignée de cinématiques en dessin animé (magnifiques qui plus est) lors des moments clés, la globalité de la narration a lieu in-game. Car si la direction artistique semble épurée, cela n’empêche pas les niveaux de fourmiller de détails nous racontant une histoire un peu plus complexe qu’il n’y paraît. Une importance de l’aspect visuel que l’on ne retrouve hélas pas autant au son et à la musique.
Loin d’être mauvaise, cette dernière est tout de même trop discrète bien qu’elle colle parfaitement à l’ambiance Western spaghetti. Pourtant, au vu de la tradition musicale du Western au cinéma, l’on aurait aimé (au moins) un thème principal marquant, à l’image des grands thèmes musicaux d’Ennio Morricone.
Avec El Hijo: A Wild West Tale, Honig Studio et Quantumfrog nous narrent une aventure jeunesse où les seules armes nécessaires sont la ruse et la malice. Une aventure nous faisant traverser des décors sublimes couvrant tous les environnements habituels du Western dans un style visuel rappelant les ouvrages à destination des plus jeunes. Et un gameplay qui, s’il use d’éléments récurrents du genre de l’infiltration, permet une accessibilité et une fluidité dans la progression.
L’intention des créateurs de créer un titre accessible à tous et en particulier aux plus jeunes transpire dans chaque aspect du jeu. De ce fait, on lui pardonnera sa répétitivité et la simplicité de ses mécaniques de gameplay qui n’empêchent pas de passer dans l’ensemble un très bon moment.
On peut tout de même lui reprocher une musique un peu trop timide, mais surtout les quelques bugs rencontrés lors de ce test, seul point vraiment dommageable. Après, on laissera à chacun le soin de juger si les cinq à neuf heures de jeu proposées sont à la hauteur du prix de 19,99€. Reste que El Hijo: A Wild West Tale est un jeu porte ouverte vers ce qui fut un temps un genre à part entière, l’infiltration.