Après moult reports, il est enfin là. Assassin’s Creed Shadows est entre nos mains. Suite aux nombreux déboires entourant la gestation du jeu nous commencions à désespérer de le voir sortir un jour. Depuis quelques mois, nous sommes abreuvés de différents trailers, images et annonces de fonctionnalités encore inédites ou trop peu utilisées dans les épisodes de la saga. Est-ce que l’attente en valait la peine ? Assassin’s Creed Shadows est-il le renouveau tant espéré de la saga ? Les aventures nippones de Naoe et Yasuke arriveront-elles à redonner un nouveau souffle à Ubisoft ?
Après avoir empêché la fin du monde aux côtés de Desmond Miles, sillonné les mers chaudes des caraïbes dans les haillons de pirate d’Edward Kenway ou encore mis le feu aux poudres de la révolution française sous la capuche d’Arno Dorian, préparez-vous à forger votre propre justice depuis l’ombre à l’aide des kunais de Naoe et du sabre de Yasuke. Allongez-vous confortablement dans l’animus (ou dans votre canapé, au choix) et commencez votre voyage en plein XVIe siècle lors de l’époque Sengoku. Bienvenue dans Assassin’s Creed Shadows !
(Test d’Assassin’s Creed Shadows réalisé sur sur Playstation 5 à partir d’une copie fournie par l’éditeur)
La justice se forge dans l’ombre
Après un retour aux sources des plus agréables avec Assassin’s Creed Mirage, les joueurs étaient dans l’expectative. Depuis plusieurs années maintenant, le public fantasmait de parcourir les plaines ensablées de l’Egypte, de se prendre pour un Viking ou encore d’aller se frotter à la mythologie grecque. Ubisoft a répondu à toutes ces attentes. Mais il restait encore une époque, une chimère tapie quelque part dans l’esprit des joueurs : parcourir le Japon féodal tel de vrais samouraïs et shinobis engagés sur le credo de ceux qu’on ne voit pas.
Les protagonistes de cet épisode sont Naoe et Yasuke. L’introduction du jeu nous met dans la peau de ce dernier lors de la signature d’un accord entre les colons portuguais et le daimyo Oda Nobunaga. Mais lors de l’échange Nobunaga remarque un homme étrange, un colosse à la peau noire qui accompagne le représentant portugais. Intrigué par sa maîtrise de la langue, son calme et son allure, le chef de guerre japonais décide de garder l’étranger avec lui. Commence alors un long apprentissage pour Diogo qui au fil de son odyssée deviendra le noble samurai Yasuke. Et quelques mois plus tard, la bande de guerre de Nobunaga entreprend d’attaquer le village de la communauté Igan.
De ce village tente de fuir une certaine Naoe accompagnée de son père. Sur le chemin de la fuite, le père de la jeune femme lui confie une étrange arme à fixer à son poignet et lui intime l’ordre de sécuriser une boîte renfermant un objet énigmatique. Mais malheureusement la boîte finit par se faire voler par une escouade de mercenaires masqués et le père de Naoe meurt de la main de l’un d’entre eux.
Aveuglé par un désir de vengeance et de justice, Naoe ferait tout ce qui est en son pouvoir pour retrouver ces mercenaires. Pour Naoe et Yasuke, la justice se forgera dans l’ombre et comme de vieux amis encapuchonnés, ils agiront dans l’ombre pour servir la lumière.
Un système d’enquête poussé et intéressant
Comme depuis les aventures d’Altair en 2007, vos cibles ne seront dévoilées et vulnérables qu’après avoir mené une enquête. Au fur et à mesure des épisodes de la saga, la recherche d’indices pouvait, d’une fois sur l’autre, être poussive et rébarbative. Mais dans Shadows, vos enquêtes et phases de recherches seront guidées par des choix que devez faire lors des dialogues, et ces choix sont importants pour le bon déroulement de l’assassinat prévu. Votre traque du Shinbakufu (le groupe de mercenaires antagonistes) sera ponctuée et guidée par différentes rencontres avec des profils qui le sont tout autant.
Pour rendre cela plus clair, l’une des premières cibles à approcher sera présente à une cérémonie du thé. Naoe n’étant pas familière avec cet art, elle devra se former auprès d’un professionnel. Ce dernier vous apprend donc comment vous incliner, comment tenir votre bol, comment vous présenter face à votre hôte… Et tout cela, une fois retenu, devra être reproduit pendant la mission. Il ne s’agit pas d’une simple cinématique, la prudence est donc de mise.
Et dans le monde de Shadows, l’Histoire avec un grand H se mêle parfaitement à l’odyssée de nos deux héros. À l’occasion de plusieurs quêtes liées à l’histoire ou seulement à des événements aléatoires, plusieurs références historiques et/ou culturelles sont faites. Les dilemmes et conflits politiques sont au cœur de l’aventure et tout comme dans Assassin’s Creed 3, ils influent sur le déroulement du jeu. Le travail historique conséquent délivré par Pierre-François Souyri et ses équipes permet d’être entièrement immergé dans l’ère Sengoku. Que vous soyez passionné ou non de cette période historique, le voyage proposé reste des plus captivants.
Naoe et Yasuke, les deux faces d’un même sabre
Bien que diamétralement opposés de par leurs origines, leurs motivations et leurs approches des situations, Naoe et Yasuke sont des personnages complémentaires. Les différentes missions de l’histoire, mais également les quêtes annexes, proposées par le jeu peuvent être abordées par les deux compères mais avec des méthodes très différentes.
Naoe est un personnage rapide, tant au niveau du parkour que des combats, le plus rapide de l’univers Assassin’s Creed jusqu’à présent. Agile et discrète, la shinobi peut se mettre à plat ventre ou encore utiliser un grappin pour atteindre des zones en hauteur, soit plus rapidement, soit qui seraient inaccessibles avec le parkour. La mécanique du grappin est entièrement repensée et est moins contraignante que dans Syndicate, l’outil n’est qu’un plus pour faciliter l’infiltration et/ou l’escalade. Le reste du gameplay côté Naoe ne vous sera pas étranger : objets de lancer, grenades fumigènes, possibilité d’alterner entre deux armes… Classique, mais efficace !
Yasuke, quant à lui, est une curiosité dans le modèle Assassin’s Creed. Le personnage est lourd, fort, et ne passe pas inaperçu. Avec lui, exit l’infiltration, privilégiez Yasuke si vous souhaitez plonger au cœur de la mêlée et participer à des combats intenses. Le parkour est également à proscrire, notre bon samurai n’arrivera qu’à escalader certaines parois mais pas sans mal. Contrairement à Naoe, le guerrier à la peau d’ébène peut absorber plus de dégâts en posture de parade et infliger beaucoup de dommages à ses adversaires lors des attaques.
Subsistent, avec Naoe comme Yasuke, quelques problèmes de caméra et de verrouillage des ennemis lors des affrontements, rien de foncièrement handicapant, mais attention tout de même dans les endroits confinés.
Mais n’oubliez pas, dans Assassin’s Creed Shadows, vous êtes libre de parcourir l’aventure avec le héros que vous préférez. Après avoir parcouru un segment assez important de l’histoire aux côtés de Naoe, vous aurez enfin la possibilité d’incarner à l’envie soit la jeune femme, soit le samurai renégat.
La boucle du jeu est pensée pour que les joueurs puissent changer à loisir de personnage. C’est pour cela que les différents segments des villes sont agencés de manière à pouvoir exploiter les deux gameplays. Des passages dérobés, des égouts, des trous dans les murs ou encore des points en hauteur pour faciliter l’infiltration de Naoe et à l’inverse des portes et structures à défoncer, et des fossés dans lesquels projeter les ennemis pour Yasuke. Infiltration ou action pure, cette décision est la vôtre et cette sensation de choix n’est pas artificielle. Les possibilités, sans être infinies, proposent un vrai renouvellement dans la boucle de gameplay et dans un Assassin’s Creed la proposition est séduisante.
Toutefois, lors de votre traque des membres du Shinbakufu, vous devrez changer de personnage selon l’orientation que prend l’histoire. Certains segments de la chasse auront un rapport avec le passé de Yasuke ou de Naoe, se faisant il sera impératif d’incarner l’un ou l’autre pour réaliser les objectifs.
Les arbres de compétences mis à disposition diffèrent également selon le personnage que vous incarnez. Moins complexes et poussifs que dans Valhalla avec ses chemins de compétences à rallonge, ceux de Shadows témoignent d’une volonté de simplification : un point de compétence correspond à une nouvelle amélioration ou à son perfectionnement. Il en est de même pour le côté light-RPG du jeu.
Depuis Origins, vous avez la possibilité de trouver ou de remporter, lors des quêtes, des nouvelles pièces d’armures ou de nouvelles armes pour vos héros, accentuant la facette RPG de la saga. Mais depuis Odyssey et Valhalla, nous étions obligés de changer d’équipement très, voire trop, souvent par rapport aux différentes statistiques. Ici Ubisoft a mis un frein à cette quête permanente du meilleur équipement. L’obtention et la montée en niveau sont plus fluides et moins contraignantes dans ce Japon féodal nous permettant de passer moins de temps dans les menus et plus sur le terrain pour notre plus grand plaisir.
Un monde plein de vie, cohérent et tangible
L’immersion est totale dans ce nouvel environnement. Dans les goguettes de Naoe ou les épaisses bottes de Yasuke, vous avez l’impression d’être au Japon, de fouler la gadoue toute fraîche, de courir entre les cerisiers en fleurs, de vous frayer un chemin entre les bambous, mais également de découvrir des villages et des villes pleins de vie, de sons et d’interactions.
Comme jamais auparavant, le monde d’Assassin’s Creed semble vivant et tangible. Les routines des PNJs, les dialogues aléatoires, les événements fortuits, la présence des gardes et des différentes factions à différents endroits de la carte, tout est là sous nos yeux et nous pouvons interagir avec l’entièreté de cet univers mis à notre disposition.
Et cela se confirme avec l’arrivée d’une nouvelle mécanique, celle des saisons. Dans Assassin’s Creed Shadows, votre quête sera longue, suffisamment longue pour que les saisons défilent sous nos yeux. À intervalles réguliers, le mode dynamique imaginé par Ubisoft déclenche une cinématique. Cette dernière nous informe du passage d’une saison à une autre et l’environnement, tout comme le comportement des personnages et le placement des soldats s’en retrouve modifié.
L’automne réduit notre champ de vision à cause des fortes pluies, l’hiver nous permet de nous infiltrer plus souvent et plus discrètement grâce aux nuits plus longues mais entrave nos mouvements dans la neige contrairement à l’été qui ne facilite pas notre travail de tueur d’élite mais nous permet de rencontrer plus de monde et de commerçants au détour d’une rue.
Assassin’s Creed oblige, la carte regorge d’activités annexes comme les fameux points de synchronisation, mais également des temples de prières, des chasses aux trésors et aux pièces d’armures, ou encore des sauvetages de civils. Mais ce Shadows propose une nouveauté, sorte d’extension de la construction du camp de base de Valhalla.
Ici, vous aurez l’occasion de construire un véritable petit village pour les opprimés et les sympathisants de la cause de Naoe et de Yasuke. Les différents ajouts que vous pourrez faire tout au long de l’aventure auront un impact sur le gameplay : plus d’éclaireurs à disposition, la possibilité de forger ou améliorer des armes, plus d’indices à disposition lors de vos enquêtes… Ce refuge est entièrement personnalisable, des bâtiments aux chemins en passant par les arbres et la décoration, tout peut être rendu plus coquet selon vos désirs.
Assassin’s Creed Shadows est une réussite se hissant au niveau du meilleur de la saga. Quelque part entre Assassin’s Creed 3 et Origins (les opus préférés de votre rédacteur du jour), Shadows arrive à lier une immersion de tous les instants à un scénario simple mais qui arrive à créer un attachement immédiat aux personnages. Combinez cela à un système de combat et d’amélioration jouissif et simple d’accès et vous obtenez l’un des meilleurs jeux d’action en monde ouvert du moment !
Assassin’s Creed est bel et bien de retour et Ubisoft a livré un travail remarquable pour livrer une aventure que vous n’êtes pas prêts de lâcher de si tôt, suffisant pour remonter la pente ? La question demeure.