Depuis quelques temps et l’explosion de YouTube avec des joueurs se filmant en surjouant bien souvent l’effroi, les petits jeux indépendants d’horreurs plus ou moins réussis pullulent sur Steam et donc majoritairement sur PC. L’avènement du développement participatif via des sites tels que Kickstarter n’a pas aidé non plus a évité de se taper des torrents de médiocrité en pleine poire.
Nous qui sommes rédacteurs, mais avant tout passionnés de jeux vidéo, avons vu ces dernières années défiler des immondices sur lesquelles nous ne préférons pas revenir – Agony es-tu là ? -. Non, nous préférons nous concentrer sur les jeux qui en valent la peine, des jeux comme celui que nous allons traiter aujourd’hui, qui nous vient tout droit de SadSquare, petit studio canadien, et qui se nomme Visage.
SadSquare Studio c’est l’histoire de deux potes, Jonathan Vallières et Jonathan Gagné, qui ont décidé un jour de se lancer dans le développement d’un jeu d’horreur censé offrir aux joueurs ce qu’auraient dû être le Silent Hills annulé de Kojima et Del Toro.
Parce que oui, le jeu s’inspire en grande partie de la démo P.T. qui avait horrifié nombre de joueurs et laissé entrevoir un avenir radieux pour la licence survival-horror de Konami. Alors effectivement, le début de l’aventure Visage fait furieusement penser à cette ébauche made in Kojima, mais réduire le jeu de SadSquare a un simple copié / collé serait de la pure bêtise.
Visage – L’autre versant de l’horreur
Il n’y a rien de bien original dans la recette horrifique de Visage, mais ce qu’il fait, il le fait bien. Dès le départ et après une introduction à la fois nébuleuse et convenue, on est plongé au cœur de l’horreur, du fait d’une maîtrise parfaite des outils de la peur utilisée ici par les développeurs.
Une maison somme toute classique, des ampoules qui pètent, des portes qui se ferment seules, des bruits angoissants, des râles glauques qui effleurent nos oreilles, l’ambiance est très clairement la chose sur laquelle le studio a le plus misé. Rien que le cadre très lambda est un élément de peur important, car tout ce qu’on y trouve nous semble tellement commun, que la moindre chose qui détonne fout une trouille bleue. L’ambiance sonore est elle aussi des plus réussies, nos pas étant rythmés par la pluie battante au-dehors, le cliquetis des aiguilles d’une horloge, et surtout par les quelques effets stridents venant briser le calme plat du lieu et glaçant immédiatement le sang.
De plus, les graphismes sont vraiment très bons et le photo réalisme ambiant n’est pas pour faire retomber la pression. Visage ne multiplie en rien les jumpscare et autres procédés putassiers pour faire sursauter sur sa chaise l’auditoire.
Ici on travaille l’horreur, on fait monter progressivement la pression jusqu’à ce qu’elle arrive à son paroxysme et à l’apparition menaçante d’une silhouette féminine aussi effrayante que mortelle. S’en suit alors un jeu du chat et de la souris terrifiant et haletant, entrecoupé de moments plus calmes et nous permettant de respirer un bon coup. Il faut bien laisser place au scénario de temps en temps après tout, et nous présenter de nouvelles raisons d’avoir peur.
Le jeu est divisé en différentes intrigues racontant l’histoire de la famille qui vivait dans la demeure que l’on visite. Entre hallucinations, indices et déductions, on commence à comprendre le drame qui s’est déroulé en ce lieu. Néanmoins, la partie scénarisée est celle qui nous a pour le moment le moins convaincus. Il faut dire que Visage n’est pour le moment disponible qu’en early access et que de ce fait tout ne nous est pas accessible. Nous attendrons donc avant d’émettre un avis plus réfléchi sur la question.
L’exploration semble réellement importante pour réussir à glaner des informations nous permettant d’assembler les pièces de ce puzzle macabre et il faut parfois prendre son temps et fouiller l’environnement, sans jamais oublier la menace qui se tapit là, près de nous.
Au niveau de son gameplay, là encore rien de bien original à se mettre sous la dent. Bien entendu, on n’a aucun moyen de défense face à la menace paranormale, si ce n’est se coller aux sources lumineuses. Rester dans la lumière est un impératif pour ne pas virer dingue et que les manifestations paranormales ou poltergeist ne se démultiplient. Une jauge de sanité est d’ailleurs au rendez-vous, ce qui rappellera de bons souvenirs aux amateurs du premier Amnesia.
Comme vous le devinez surement, il devient de plus en plus délicat de s’éclairer, on utilise bougies et briquets à outrance, et lorsque l’on découvre une pièce on cherche directement le ou les interrupteurs permettant de l’éclairer.
Il y a un inventaire assez peu pratique à utiliser il faut l’avouer et on peine à jongler entre les divers objets et les assigner comme on le voudrait. Il est possible dé’équiper un objet à chaque main et là encore l’ergonomie laisse à désirer, on espère que tout ceci sera revu dans un futur proche. Très vite on tombe aussi sur un appareil photo qui deviendra vite à la fois notre meilleur ami et ennemi.
Au bout d’un moment, il s’agira de notre source de lumière principale, on avance en s’éclairant à coup de flash et c’est franchement terrifiant, d’autant plus que l’environnement devient de plus en plus glauque et que les phénomènes paranormaux et autres apparitions se font de plus en plus pressants. Dernier recours, des pilules nous permettant de faire remonter notre jauge mentale, permettant ainsi d’être moins vulnérable, mais il ne s’agit là que d’une solution temporaire.
Enfin, s’il y a bien une chose qui nous a laissés sur notre faim, c’est les mécaniques d’avancées. Si elles convainquent au départ, nous demandant de titiller du surnaturel pour prolonger l’expérience, par la suite elles deviennent un peu trop classiques. il faut bien souvent trouver une clé pour continuer sa route, tout en évitant de se faire coincer par une saleté de spectre.
Alors certes, parfois il y a des surprises, des environnements inattendus qui popent d’un coup nous sortant de la bâtisse et nous plongeant un temps dans un enfer différent, à grand renfort de décors délirants, mais les mécaniques sont trop usées aujourd’hui pour tenir sur le long terme.
Le visage de la peur
S’il ne fallait retenir qu’une chose de Visage donc, c’est bien la qualité de l’ambiance et des éléments de peur. On est pris continuellement aux tripes et on se tient à sa chaise du début à la fin. Le jeu monte en puissance graduellement, et ce de façon très bien dosée, sans que la pression ne retombe réellement jamais. On devient comme la grand-mère qui épie le moindre faits et gestes des passants à sa fenêtre, jamais sereine et toujours sur ses gardes.
Néanmoins, il y a encore des petites choses à revoir comme l’ergonomie de l’inventaire, ou encore quelques petits soucis au niveau de ce que l’on tient ou non en main, mais hormis cela, il n’y a presque rien à reprocher à cette early access plus que prometteuse pour ce jeu d’horreur psychologique. Visage réussi avec brio a mettre en place une ambiance effrayante et jouer avec notre psychologie jusqu’à réveiller en nous nos peurs d’enfants, du grand art.
Cela faisait longtemps qu’un jeu d’horreur ne nous avait terrifiés à ce point, on a vraiment failli lâché le gros paquet dans notre couche. Et on espère que SadSquare Studio continuera sur sa lancée pour nous pondre pourquoi pas l’un des grands jeux de 2019. En attendant, nous pouvons juste vous indiquer que des versions PlayStation 4 et Xbox One sont prévus pour l’année prochaine, à une date encore indéterminée, alors que le jeu sera bientôt jouable en VR, enfin pour les plus courageux d’entre vous.