VideoGamer publiait il y a peu un article résumant la discussion entre la rédaction et David Brevik. Le créateur de tout un pan du jeu vidéo (Diablo, Diablo 2) fut l’un des piliers de Blizzard North mais également un des personnages qui ont créé ce qu’on appelle aujourd’hui le loot. Si pour un jeune joueur de Fortnite le commun est gris et le légendaire est orange, c’est en partie grâce à cet acteur. Acteur qui est aujourd’hui un peu agacé de ce qu’est devenu le genre de l’Action RPG.
Comprendre par là ce qu’on appelait autrefois hack’n’slash, le genre de jeu dans lequel on contrôle un personnage annihilant des hordes de monstres pour engranger de l’expérience et des objets. En effet, Brevik trouve que le rythme des formules plus récentes est généralement trop rapide.
“Je pense que les RPG en général ont commencé à se diriger vers ceci : abattre de gros groupes de monstres un peu partout et extrêmement vite. Votre build ne sert qu’à tuer, récupérer des objets, des niveaux, l’écran est envahi de choses dont vous vous fichez.”
De la même manière, l’intervenant a également donné son avis sur les MMORPG en indiquant que ce genre a “définitivement pris cette direction” en poussant les joueurs à gravir le mont XP le plus vite possible afin d’aller toucher le endgame, là où tout commence vraiment, le plus vite possible.
Le genre a-t-il évolué depuis Diablo 2 ? Inévitablement, toute pratique artistique évolue en suivant les tendances et en s’inspirant des autres œuvres plus ou moins proches. Il est vrai que l’ombre du roi dirige indubitablement le zeitgeist du genre en offrant aux joueurs tous les éléments apportés par le jeu de Brevik, il est également vrai que plusieurs propositions se sont cassé le nez sur l’énorme mur que forment les retours critiques des joueurs, espérant tant et toujours retrouver leur petit plaisir d’adolescence que serait un digne successeur de Diablo 2. Force est tout de même de constater que l’A-RPG n’a pas beaucoup évolué en une vingtaine d’années, il s’est contenté d’un petit saut, les représentants majeurs du genre étant peu nombreux.
En revanche le genre a su évoluer dans son aspect technique et dans la surenchère, on déchire toujours plus de tissus musculaires et on écrase bien plus de crâne qu’avant. Les personnages se diversifient de jeux en jeux et les nouvelles manières d’annihiler toujours plus de monstres à l’écran montrent tout de même une certaine avancée, et les artistes fx et les sound designers nous inondent de toujours plus d’effets grandiloquents.
Cette course effrénée à l’inflation grand-guignolesque a donné naissance à un nouveau genre : le Vampire Survivors, dont le plus illustre représentant n’est autre que le jeu éponyme, conçu par un ancien tech director, Luca Galante, qui a su profiter de son expérience sur les jeux de casino. Une influence clairement visible sur un game design qui bombarde le joueur de micro événements et de choix accompagnés d’une myriade d’effets visuels et sonores qui misent sur les petits plaisirs ponctuels plutôt que la récompense au long terme.
Un rythme effréné qui condense toute la progression d’un personnage d’A-RPG en une quarantaine de minutes, grand maximum. Ici il n’est pas question d’avoir des briques de gameplay complexe, dans la majorité des têtes d’affiches du genre Vampire Survivors on se contente de se déplacer, notre personnage fait le reste tout seul.
Les différentes variations du genre pullulent, ce qui s’explique par leur simplicité de développement, et ceux qui sortent du lot affichent généralement une généalogie toute tracée : des jeux comme Halls of Torment dont l’esthétique est très clairement inspiré de Diablo 2, jusqu’à Death Must Die dont les différentes briques de gameplay construisent petit à petit une expérience à mi-chemin entre l’expresso et l’allongé. Mais ce nouveau genre fédère son propre public ou, à défaut, attire les joueurs lassés d’A-RPG .
Interventions marketing mises à part, le souci dont le genre est accusé ne vient pas des jeux en eux même, un shop in-game invasif ou une monétisation à outrance est un problème majeur, mais ce que soulève David Brevik ici n’est qu’une prise de position un peu tiède qui cache une idéologie plus globale : le problème vient des joueurs. L’utilisation du pluriel est importante, un seul joueur devant son écran cathodique en 2001 profite d’un jeu en avance sur son temps, le fameux Diablo 2. En 2025 le joueur lambda de Path of Exile 2 s’instruit avant même de commencer à jouer, il s’inspire des différents builds mis au points par d’autres joueurs mieux renseignés que lui, son temps est précieux et il ne veut pas perdre une seule seconde, il veut être compétitif, de fait, il entre dans une pluralité. Un groupe qui va créer et utiliser quasi quotidiennement des sites en ligne pour mesurer des performances, OPGG, WarcraftLogs, PoeNinja, tous les jeux y passent.
Ce qui est en cause dans ce constat, c’est la compétitivité des joueurs et la diversité des outils, chacun consomme le jeu vidéo comme il l’entend et c’est bien normal. Mais sur certains genres de jeu (principalement en ligne) il est de bon ton de participer à la fête en étant bien costumé, une belle optimisation, un joli savoir faire et si possible une bonne connaissance de son environnement avant d’entrer dans la salle de bal. Dans un World of Warcraft de haut niveau vous seront demandés toutes les notions nécessaires avant de commencer, ruiner un donjon c’est gaspiller le temps de cinq personnes différentes et la pression de la réussite pousse les chefs de groupe à ne recruter que les meilleurs, tant pis pour les autres.
Les performances sont calculées en percentiles et jouer une classe considéré “hors méta” fait de vous un joueur plus occasionnel, moins compétitif. Alors oui c’est une vision un peu dystopique du jeu vidéo mais est-ce que cela doit vraiment changer ?
Les joueurs dirigent le marché avec leurs choix. Oui, un joueur actuel est plus intéressé par le endgame que la longue monté en puissance de son personnage. La consommation du jeu vidéo est également plus volatile : on passe d’une saison à l’autre, d’un jeu à l’autre, tous les mois quelque chose de nouveau apparaît ailleurs alors les masses se déplacent, se divisent. Les marchés n’ont jamais été aussi saturés de propositions variées et pertinentes.
Non, Diablo 4 n’est pas Diablo 2, mais le genre s’est-il réellement “appauvri”, ou s’est-il affiné au fil des années pour devenir ce que les joueurs voulaient qu’il soit ?
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