Voilà vingt ans jour pour jour que Microsoft tient tête à la concurrence. S’entête, diront certains. Si la génération précédente est partie du mauvais pied, n’a jamais vraiment réussi à rattraper le coup et a de ce fait passablement écorné l’image de la marque, Xbox revient très fort avec des consoles tout aussi sold-out que la championne PlayStation 5, et surtout une offre qui vient renverser la table : le Game Pass.
Seulement voilà, stratégie marketing et image de marque ne valent rien sans un catalogue digne de ce nom, et les équipes derrière la Xbox One l’auront appris à leurs dépens. Cependant, en vingt ans d’existence, Microsoft et Xbox auront quand même réussi à proposer bon nombre de jeux sortant du lot. Et bonne nouvelle, grâce à la rétrocompatibilité rendue possible sur les dernières machines de la marque, vous pouvez revivre directement et en personne ce petit bout d’Histoire des jeux vidéo.
En route, donc, pour un petit tour d’horizon des pépites proposées par Xbox, oubliées ou passées inaperçues, et toujours jouables aujourd’hui.
OG Xbox
… pour Original Xbox : la première, la très grosse, celle-là même qui est sortie il y a vingt ans. Tiens, fun fact : le nom Xbox vient du fait qu’elle devait d’abord s’appeler DirectX Box, du nom des bibliothèques qui permettent de faire tourner nos jeux sous environnement Windows. C’est en effet l’idée des programmateurs d’amener ces bibliothèques destinées au PC « dans le salon » qui a engendré ensuite le développement de la console !
On aurait voulu partager ici des souvenirs de Jet Set Radio Future, exclu Xbox qui venait alors récupérer un certain héritage Dreamcast, ou Steel Battalion et son énorme contrôleur dédié (mix de console de mixage DJ et de contrôleur pour Flight Simulator, le tout avec un pédalier !). Mais ces titres ne profitent pas de la rétrocompatibilité sur les consoles de la génération actuelle.
On commencera donc par Blinx, déjà évoqué dans notre premier article sur les licences phares de Microsoft. Ce jeu de plateformes en 3D, très attendu à sa sortie, avait pour ambition d’installer un petit personnage qui aurait pu devenir pour un temps la mascotte Xbox, à l’instar de Sonic ou Sackboy pour la concurrence. Malheureusement, malgré une réalisation de haute volée, qui mettait bien la machine en valeur, et des idées originales (les allers-retours dans le temps), le jeu s’est pris les pieds dans un gameplay qui manquait de finition. Il aura quand même eu droit à une suite, Blinx 2, toujours sur Xbox Original.
En plus d’être rétro-compatible, Blinx figure au catalogue du Game Pass. Ne vous gênez donc pas pour aller revivre ce petit moment d’histoire de la boîte noire.
Également au menu du Game Pass, Crimsom Skies est un jeu de pilotage très orienté arcade et shoot. Tiré d’un jeu de plateau du même nom, le titre se base sur un univers riche créé par Jordan Weisman (Battletech, Shadowrun…), des années 30 alternatives dans lesquelles le transport aérien a pris le pas sur le transport routier. Mais ce qui permet à Crimsom Skies de se démarquer, c’est son côté open world, avec une navigation libre et un choix d’activités multiples à réaliser selon les envies du joueur.
Et on reste dans les airs avec cette troisième exclu Xbox oubliée : Panzer Dragoon Orta. Considéré comme le quatrième épisode de la saga de shoot’em up à dos de dragon, Panzer Dragoon Orta assoit un certain héritage de SEGA chez Xbox, évoqué avec Jet Set Radio Future. Un héritage entériné vingt ans plus tard avec les accords récents de collaboration entre SEGA et Microsoft. À sa sortie, le jeu avait divisé, parce que respectant « trop » les jeux précédents de la franchise. En résulte un jeu un peu raide (le premier Panzer Dragoon était sorti en 1995 sur Saturn), mais toujours aussi fascinant. Alors que le retour de la franchise ne s’est pas fait sans heurts (Panzer Dragoon: Remake, l’an dernier sur Switch), on ne saurait que vous conseiller de vous plonger dans cette expérience doublement rétro.
Xbox 360
Après une entrée remarquée sur le marché, la Xbox 360 va venir confirmer la position de Microsoft, qui viendra définitivement prendre le siège laissé vacant par SEGA aux côtés de Sony et Nintendo. La console sortira quasiment un an et demi avant la PlayStation 3 en Europe, une éternité à l’échelle du jeu vidéo, et aura ainsi le temps d’installer son catalogue riche et varié.
Parmi les jeux plus modestes, mais valant définitivement le coup d’œil, on s’arrêtera un instant sur Geometry Wars: Retro Evolved. Twin-stick shooter aux accents d’Asteroid, le jeu est complètement épuré graphiquement, mais accroche les joueurs dès les premières secondes grâce à un gameplay aussi simple que bien pensé. Étonnant, on retrouvera un cas Geometry Wars à la génération suivante, avec Resogun, signé Housemarque (Returnal). Sorti sur une PlayStation 4 encore toute fraîche, le jeu, un shooter là encore, détonnait par son style graphique dépouillé (alors qu’on attendait des millions de triangles et de particules), mais a convaincu immédiatement avec son gameplay millimétré.
Blue Dragon est un J-RPG sorti en exclu sur Xbox 360, et rétro-compatible sur les consoles de la nouvelle génération. Soigné et fun bien qu’un peu classique, il entre dans notre sélection aujourd’hui essentiellement parce que c’est le tout premier titre sorti des studios Mistwalker, montés par Hironobu Sakaguchi, légendaire créateur de la saga Final Fantasy. Le même studio Mistwalker qui signera en 2020 le chef-d’œuvre Fantasian pour Apple Arcade.
On évoquera aussi Rumble Rose XX, jeu de catch féminin qui repousse les limites et le mauvais goût de Dead or Alive (qui avait déjà étendu son territoire shameless avec Dead Or Alive Xtreme Beach Volley, en 2003, toujours sur Xbox). Le propos du jeu ? On en aura un aperçu avec cet extrait de la fiche descriptive que l’on trouve encore sur la boutique Microsoft : « Personnalisez non seulement la poitrine, la taille et les hanches de votre personnage, mais aussi ses muscles et costumes ! ». Un intérêt côté gameplay assez limité, mais un jeu qui représente aussi bien son époque.
Enfin, vrai succès et vraie exclu Xbox 360 qui a été oubliée un peu trop vite : Shadow Complex. Signé Epic Games avant la folie Fortnite, le jeu est écrit par Peter David, qui a œuvré pour Marvel et DC, et reçu un prestigieux Eisner Awards pour son Hulk en 1992. Il s’agit d’un platformer 2,5D avec des éléments d’infiltration et de metroidvania. Tout, de l’écriture à la D.A. en passant par le gameplay, était particulièrement soigné dans ce jeu. Il a depuis bénéficié d’une version remaster sortie sur toutes les machines, et les deux versions de ce hit restent compatibles avec les dernières consoles Xbox.
Enfin, on ne peut clore ce chapitre Xbox 360 sans un clin d’œil à Kinect, l’expérience de motion gaming aussi réussie technologiquement qu’inefficace en termes de gameplay. Un titre pourtant profite de la techno de reconnaissance de mouvements de Microsoft : Just Dance, qui ne sera jamais aussi fun qu’avec Kinect ! Néanmoins, le titre est disqualifié pour notre sélection, puisque Microsoft a officiellement enterré le Kinect, et que les consoles Series X|S ne disposent pas des ports permettant de recevoir la caméra.
Xbox One
Ouch ! On s’attaque là à un chapitre douloureux du mariage de Microsoft et du gaming. Après une entrée sur le marché remarquée avec la Xbox, et confirmée avec la Xbox 360, Microsoft prend le melon et entend remplacer toutes les « box » de votre salon par la sienne, la seule, la « One ». La Xbox One a ainsi été conçue comme un outil de divertissement audio-visuel général, permettant de regarder la télé, de s’abonner à des plateformes de streaming, de louer et de regarder des films, et accessoirement… de jouer.
Mal pensée d’entrée, les joueurs achetant des consoles en priorité pour jouer, la machine s’est qui plus est vautrée dans un lancement complètement raté, le constructeur étant tellement concentré sur la lutte contre le piratage de ses jeux qu’il en est venu à presque empêcher les joueurs de pouvoir jouer !
Le catalogue rachitique de la console aura fini d’en faire un échec. On notera quand même parmi les quelques exclus Ryse: Son of Rome, qui joua le rôle que The Order avait sur PS4. Le jeu, boudé à sa sortie, a récemment retrouvé grâce auprès des joueurs qui le redécouvrent avec la rétrocompatibilité et sa présence sur le Game Pass.
Quantum Break est un jeu à gros budget signé Remedy (Control), qui contient déjà la patte du studio. Mis en scène comme une série télé, avec des acteurs à la carrure hollywoodienne (Dominic Monaghan, de Lost ou LOTR ; Lance Reddick, de The Wire ou John Wick…), le jeu alterne cinématiques en prises de vue réelles et phases de cover shooter. Plutôt réussi, avec un scénario qui tient la route (mais pas tout à fait les promesses de choix déterminants – on est habitué, hélas) et un gameplay encore tout à fait jouable aujourd’hui, c’est un titre que l’on conseille. Alors, non, ce n’est pas tout à fait une pépite passée inaperçue, mais le choix est maigre sur Xbox One, et on a des colonnes à remplir.
Enfin, pour terminer cette sélection, on fera le choix contestable de D4, pour Dark Dreams Don’t Die. Un titre dont le principal intérêt reste sa signature : Hidetaka Suehiro, dit SWERY, l’homme à la ludographie aussi célébrée que « pétée », de Deadly Premonition au récent The Good Life. On y suit les aventures d’un flic qui voyage à travers le temps pour résoudre et empêcher le meurtre de sa femme. Petite singularité : le jeu reste inachevé ! Sorti au format épisodique, SWERY a quitté le studio qui produisait le jeu avant que la fin de l’histoire ne soit réalisée. D4 fut conçu pour être joué avec Kinect, mais une version PC est sortie avec des contrôles plus traditionnels. Le Microsoft Store indique une compatibilité Xbox Series X|S, qui reprend probablement ces contrôles ? Attention ! C’est sans garantie, nous n’avons pas testé le jeu sur les dernières machines de Microsoft. Et puis, c’est un jeu SWERY, alors le doute doit vous guider…
« De route ? Là où on va, on n’a pas besoin de route »
On s’arrête là pour ce voyage dans le passé, mais l’histoire de la Xbox, elle, continue. Avec des propositions complètement nouvelles, comme le Game Pass ou le Xbox All Access, la mise en place de ses solutions cloud, ou le rachat massif de nombreux studios, Microsoft a clairement l’avenir en ligne de mire, et semble considérer sa branche Xbox comme un rouage essentiel de son système. On se retrouvera donc probablement dans vingt ans pour évoquer rétrospectivement les deux décennies à venir !