Fiche de perso est une rubrique dans laquelle nous tirons le portrait d’acteurs du jeu vidéo, réels ou fictifs, qui pèsent ou ont pesé sur l’industrie.
Institutionnelles, associatives, ou particulières, de nombreuses initiatives ont vu le jour pour permettre d’assurer la conservation des œuvres vidéoludiques. Parce qu’elles restent encore trop méconnues, cet article vise à mettre en lumière un de ces projets de passionné·e·s.
Le premier jeu vidéo permettant d’incarner une héroïne fut Wabbit, en 1982. Il s’agissait d’un shoot’em up « fermier » dans lequel on incarnait Billie Sue, personnage dont le but était de repousser des vagues de lapins avides de carottes, en leur jetant des œufs pourris au museau. Une particularité notable de ce jeu, en dehors de sa difficulté notable, est qu’il fut développé par une femme dont on avait perdu la trace, jusqu’à un récent article de la Video Game History Foundation.
Une consœur de Polygon s’était déjà intéressée, l’année dernière, à l’histoire mystérieuse de la disparition de Ban Tran, la développeuse derrière le jeu, sans parvenir à retrouver la trace de l’intéressée. Une des (nombreuses) difficultés de cette recherche tenait au changement de nom de famille de la programmeuse après son mariage, véritable problématique sociétale pour nombre de créatrices.
C’est là que sont intervenus les contributeurs de la Video Game History Foundation : communiquant dans un channel du Discord officiel de l’organisation, leur dévouement leur aura permis de mettre un terme à cette enquête.
Après avoir traversé des archives administratives liées à la banqueroute du studio derrière le jeu, ils ont ainsi pu remonter le cours des événements, et déceler une erreur dans l’écriture du prénom fourni par ses anciens collègues. De fil en aiguille, ils ont ainsi pu retrouver Ban Van Tran, Van Mai de son nom d’épouse, et l’interviewer sur son parcours et la place qu’aura eu la création de Wabbit dans sa vie.
C’est un véritable morceau de l’histoire du JV que ces archéologues vidéoludiques sont parvenus à mettre à jour, à l’image de ce que fait la fondation.
Créée en 2017 par Franck Cifaldi, développeur et archiviste/activiste du jeu vidéo, la Video Game History Foundation est née de son souhait de préserver non seulement les jeux vidéo et les supports permettant d’y jouer, mais également la connaissance du contexte autour de leur création.
La fondation archive ainsi le code source, les documents de conception, dossiers de presse, affiches, cassettes vidéo, journaux et photographies. Elle travaille en collaboration avec certains musées et archives, auxquels elle retransmet ses biens après les avoir numérisés.
Loin des NFT, des cryptomonnaies, ou de la spéculation abusive sur des jeux sous scellés, c’est bien la passion pour notre média de cœur qui anime les discours évangélistes et les actions des membres de la Video Game History Foundation. Avec pour but annoncé de créer une véritable « bibliothèque open-source » du jeu vidéo, probablement plus raffinée que celle de l’Internet Archive, le futur de l’association nous fait rêver. En attendant, nous vous invitons à jeter un œil (anglophone) à son blog, ainsi qu’à ses podcasts, riches en histoires méconnues, mais ô combien enivrantes.