Attendu depuis près de vingt ans, Vampire: The Masquerade – Bloodlines 2 ne débarque pas sans bagage. Adaptation d’un jeu de rôle sur table cultissime, il succède à un premier opus devenu culte non pas pour son succès commercial, mais pour l’impact qu’il a laissé dans l’esprit de celles et ceux qui l’ont découvert. Sorti en 2004 dans l’ombre de Half-Life 2 et affaibli par des problèmes techniques, le jeu aurait pu disparaître. Au contraire, il a été chéri par sa communauté : patchs non officiels pendant plus d’une décennie, mods narratifs, discussions continues sur forums et réseaux. N’ayant jamais quitté les esprits passionnés, il a été préservé, nourri et transmis par les fans qui refusaient de le voir s’éteindre. Cette force communautaire explique le poids symbolique qui entourait son retour.
Un accueil façonné par la nostalgie
Le développement mouvementé de Vampire: The Masquerade – Bloodlines 2, (entre des changements d’équipe, une réécriture en plein chantier et des reports successifs) a peu à peu créé autour du jeu une aura presque « maudite ». En parallèle, l’affection portée à son prédécesseur est devenue omniprésente, presque étouffante. Elle porte l’espoir que son héritier soit à la hauteur du mythe : non pas simplement une suite à un RPG aimé, mais une manière d’incarner la nuit et ses sombres desseins au cœur d’une politique vampirique complexe.
Dix jours après sa sortie, ce qui frappe, ce n’est pas une vague d’enthousiasme ni une déception brutale, mais un accueil mitigé. Sur les streams, les let’s play et les discussions en ligne, une esquisse se dessine progressivement : celle d’un jeu qui existe dans la nuance, dans un entre-deux. On découvre une Seattle sombre, parfois presque vide, qui divise selon les sensibilités. Certain.es y voient une limite de production, un manque de temps, d’autres y lisent une cohérence tragique dans la métaphore d’une ville hantée plutôt qu’habitée par les créatures sans vies qui la peuplent. La mise en scène des dialogues, souvent sobre, parfois même trop épurée (des plans superposées et des zooms sur des visages peu expressifs) participe elle aussi à cette lecture en demi-teinte.
Les studios rencontrent des échos empreints de frustration, répercussion directe du lancement d’un projet encore perfectible avant sa sortie. Des bugs, comme des PNJ absents ou ayant des comportements erratiques, certaines quêtes inaccessibles, des sauvegardes capricieuses ont été relevés dès les premières minutes de jeu. Cela ne constitue pas un jugement de valeur mais un fait : la réception du public s’est construite en réponse à ces défauts techniques, influençant sa popularité dans les espaces de discussion.
À l’inverse, d’autres caractéristiques attirent l’attention : la narration reste un point d’attache fort. L’historique des clans, la politique de la Mascarade, l’ambiance film noir ou encore la présence d’une voix intérieure (sans nous rappeler les figures mentales de Cyberpunk 2077 ou Baldur’s Gate 3) créent une expérience narrative prenante, presque théâtrale. Par ce biais de dédoublement scénaristique, l’expérience se divise. D’un côté, des séquences d’enquête, lentes, atmosphériques qui s’inscrivent dans la continuité du premier volet, de l’autre, des phases de combat plus directes, sanguinolentes et mécaniques parfois en décalage avec l’ambiance insidieuse du titre. Cette dualité de gameplay laisse entrevoir deux aventures distinctes, intéressantes, mais qui ne se complètent pas toujours.
Tout cela révèle un point essentiel : le descendant de Bloodlines n’est pas jugé comme un jeu sortant en 2025. Il est jugé face à un souvenir, face à une histoire collective, face à vingt ans d’imaginaire partagé. Cela soulève alors plusieurs interrogations trouvant leur source dans la promesse d’une suite fidèle à ses racines. Peut-on répondre à une attente qui s’est construite au-delà du jeu lui-même? La nostalgie suffit-elle à apprécier un titre malgré ses imperfections?
Ce deuxième volet doit affronter son passé pour exister. Il ne revient pas seul : il arrive chargé de souvenirs, d’attachements et de projections nées lors de deux décennies d’absence. Il avance sous une attente qui enserre, celle d’un jeu que l’on voudrait retrouver tel qu’on l’a fantasmé plutôt que tel qu’il peut être. Comme les vampires qu’il met en scène, Vampire: The Masquerade – Bloodlines 2 progresse à pas feutrés, observé autant que désiré, prisonnier de l’ombre de son aîné et la nécessité de s’en détacher. Ce n’est peut-être pas dans l’instant qu’il trouvera sa place, mais dans un futur hypothétique : là où les oeuvres ne sont plus comparées, mais réinvesties, discutées, et, peut-être, habitées de nouveau.
En réponse aux critiques, les développeurs ont proposé une mise à jour gratuite le 29 octobre, déployant une série de correctifs destinés à améliorer la stabilité du jeu et à résoudre plusieurs problèmes techniques. Avec ceci s’ajoute un cadeau de saison plus chaleureux : de nouvelles options de personnalisation pour Phyre, votre cher vampire. Une consolation bienvenue, qui apaise légèrement les joueur.euses sans prétendre mettre fin aux discussions en cours.

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