Plutôt discret dans sa communication jusqu’à sa sortie récente sur PS5, Xbox Series et PC, Wild Hearts n’en avait pas moins attiré le regard d’aficionados de Monster Hunter en manque de chasse. Il faut dire que la promesse est belle. Des monstres gigantesques, un gameplay moins rigide et, disons-le aussi, archaïque, et l’expertise de Koei Tecmo et d’Omega Force, globalement cantonné aux Musô (Fire Emblem Warriors, Persona 5 Scramble, Dynasty Warriors…), pour nous pondre des mécaniques de jeu redoutables. Et surtout, un « label » EA Originals qui, rappelons-le, a aussi été apposé sur le GOTY 2021 It Takes Two.
Des bases donc très engageantes sur le papier, mais qu’en est-il vraiment ? On ne marche pas aussi facilement sur les plates-bandes d’un Monster Hunter seul et tout puissant sur cette niche vidéoludique. Wild Hearts a-t-il vraiment les reins assez solides pour faire de l’ombre au titre de Capcom ? Notre guilde de guerriers est donc partie découvrir ce nouveau terrain de chasse, cet eldorado à conquérir, et ses rapports viennent de nous parvenir. Alors, simple escale ou destination finale ?
(Test de Wild Hearts sur PS5 réalisée à partir d’une copie fournie par l’éditeur)
Rapport n° 17 – La chasse est ouverte
Nous sommes enfin arrivés. La fraîcheur de la nouveauté fait son office. Nous nous baladons dans l’espace offert pour nous faire la main sur les premières mécaniques de jeu. Ici, tout va tellement plus vite, tout est tellement plus souple. Nous avons même pu nous relooker complètement. Les possibilités sont grandes, le rendu de nos visages et ceux de nos compagnons sont vraiment très réussis et on se surprend à prendre le temps de nous confectionner notre nouvelle identité pendant de longues minutes. Mais après cette parenthèse ludique, il est temps de sortir de cette grotte et d’aller explorer le monde.
Et que dire de ce monde… La lumière nous assaillit et nous découvrons un univers qui s’annonce aussi grandiose que dangereux. Notre première chasse approche : un loup gigantesque, magnifique. Nous nous sommes bien rendu compte que notre intrépidité risquait de nous tuer, mais nous avons foncé tête baissée, à vouloir découvrir ce que ce monstre, bien trop puissant pour nos bras de novices, avait dans le ventre. Puis ce fut le flou le plus complet.
Tout ce que l’on peut dire, c’est que cette entrée en matière dans Wild Hearts fut époustouflante, un quasi sans-faute et une première heure qui nous a donné envie de nous immerger sans réserve dans cette région.
Nous sommes à présent accueillis dans le village local avec enthousiasme, et celui-ci sera notre lieu de villégiature principal. C’est que cela fait bien longtemps qu’ils n’ont pas rencontré de chasseurs chevronnés et leurs problèmes majeurs concernent la faune alentour qui semble pouvoir à tout moment envahir cet espace pour en faire son territoire.
D’autant que notre capacité à utiliser librement les fils Karakuri, une ressource rare et précieuse, pourrait être la clé de leur survie. Nous n’avons pas tout compris, mais soit, tant que nous pouvons chasser du gros monstre et améliorer notre équipement au fil de nos excursions, nous somme prêts à aider chaque habitant ayant de nombreuses quêtes à nous confier. De quoi offrir un objectif supplémentaire à nos chasses, même si on parle plus de prétexte finalement.
Quel plaisir ! Quel enchantement de découvrir les monstres concoctés par les développeurs. L’une des forces de Monster Hunter est d’avoir réussi à créer une faune monstrueusement crédible, défendant bec et ongle son territoire. Omega Force l’a bien compris et nos premiers affrontements sont un plaisir sans cesse renouvelé.
Les attaques de nos adversaires sont redoutables, certes, mais nos propres assauts ne le sont pas moins, et au fur et à mesure du combat, le Kemono, comme il est appelé ici, est couvert des stigmates de nos attaques. Il est épuisé, boite et trébuche même parfois, emporté par son élan et ayant perdu la force nécessaire à son équilibre.
Dans cette première région, nous avons même découvert de nombreux Tsukumos, une sorte de forme de vie mécanique qui nous aide concrètement durant le combat en attaquant par exemple directement le Kemono afin de détourner son attention de nous, nous permettant par exemple de nous soigner ou même simplement le prendre à revers. Bien utile quand nous souhaitons cibler une partie spécifique de la créature, sa queue notamment, afin de la découper pour en récupérer ses ressources uniques indispensables pour renforcer notre équipement. La chasse est ouverte et la proie devient alors le prédateur, pour notre plus grand plaisir.
Rapport n° 93 – Tout un monde à bâtir
Voilà des jours que nous baroudons. Les mécaniques de jeu s’affinent et chaque nouvelle créature rencontrée est un prétexte à un nouvel apprentissage. Ici, on ne fait pas que tuer du monstre. Cela reste évidemment notre activité centrale, mais pour survivre, il nous faut aussi bivouaquer, et donc construire tout ce qui peut nous aider et nous protéger durant nos longues aventures. En explorant les différentes régions, nous avons découvert plusieurs fosses draconiques, des sortes de puits d’énergie nous permettant d’acquérir les ressources nécessaires à la fabrication d’un camp.
Pas forcément simple à appréhender, d’autant que les explications se sont révélées assez lacunaires sur certains points, la construction de camp est pourtant centrale dans Wild Hearts. En effet, pour ne citer que ces exemples basiques, nous avons pu fabriquer une antenne parabole permettant de détecter notamment les monstres majeurs dans un secteur défini, et donc à placer judicieusement pour bien quadriller toute la carte, ou même nous créer une forge permettant de changer d’équipement, le titre ne proposant malheureusement pas de s’équiper d’une seconde arme.
En combat, les constructions sont aussi primordiales pour tenir tête aux Kemonos monstrueux. On débute avec quelques tremplins basiques, à créer à la volée pour échapper à diverses attaques ou simplement attaquer d’un autre angle, mais rapidement, celles-ci se complexifient et on se retrouve assez rapidement à devoir apprendre certaines combinaisons de touches, pas toujours simples, pour fabriquer murailles, bombes ou autres éléments offensifs et défensifs.
La construction, c’est clairement la bonne idée de Wild Hearts qui permet de varier significativement les approches. Dans le feu de l’action, quand un sanglier géant nous fonce dessus, nous avons donc la possibilité de l’esquiver par le côté, de sauter par-dessus grâce à un tremplin bien à propos, ou donc créer un mur solide pour qu’il s’y heurte et ainsi nous offrir une belle opportunité de contre-attaque. Toutes les mécaniques s’imbriquent parfaitement pour offrir un maximum de solutions à nos chasses, une vraie réussite.
Pourtant, nous commençons à voir poindre de nombreux problèmes dans nos quêtes, à commencer par la technique. Si la direction de Wild Hearts est particulièrement réussie, le design des environnements, et surtout des monstres, étant remarquables, on ne peut malheureusement pas en dire autant de la technique.
Les bugs sont légion. Si on peut facilement accepter que certaines textures soient disgracieuses, ou que l’on se retrouve parfois en équilibre sur du vide lors de grimpettes, voire même à passer à travers certains éléments, il est beaucoup moins acceptable que la caméra soit aussi folle par instant, à se glisser dans les pires endroits possibles, et pas seulement dans les lieux exigus, rendant la lisibilité de l’ensemble pénible.
Pire encore, l’enrobage sonore, s’il reste très qualitatif que ce soit en termes de composition ou de bruitage, souffre lui aussi d’un bug que nous considérons comme majeur, presque rédhibitoire. En effet, lors des combats « scénarisés », la musique s’emballe pour offrir à la quête un souffle épique, mais provoque aussi un décalage des autres bruitages.
On se retrouve ainsi à avoir le retour sonore de nos coups parfois une dizaine de secondes après l’avoir lancé. Même la synchronisation labiale lors de certains dialogues est parfois en souffrance, avant de reprendre convenablement, comme si de rien n’était… Pas toujours simple donc de s’intéresser à l’histoire de Wild Hearts. D’autant que le scénario, très présent, est un peu à la Nioh : complexe et ni très intéressant, ni très compréhensible.
Rapport n° 212 – De monstrueuses lacunes
Voilà des jours que nous sommes arrivés. Nous avons exploré de nombreuses régions, découvert plusieurs nouvelles créatures, tissé d’étroits liens avec les habitants de la ville et les problèmes nous sautent à présent aux yeux. Si nos premiers instants dans Wild Hearts permettaient de les camoufler grâce aux très belles qualités du titre, ils ne suffisent à présent plus entièrement à faire illusion. En effet, très – sans doute trop – rapidement, le bestiaire ne se renouvelle quasiment plus. On se retrouve face aux sempiternels mêmes monstres, certes excellents, mais nous aurions préféré découvrir d’autres créatures et non pas de simples « color-swap ».
Plus problématique encore, l’équilibre ne nous semble vraiment pas optimal. Il n’est pas rare de nous faire tuer en un coup, provoquant ainsi une frustration désagréable. C’est d’ailleurs à mettre en parallèle avec le système de forge. La montée en puissance, ou en défense d’ailleurs, n’est pas suffisamment notable. On a beau améliorer notre équipement, pourtant varié, avec un alignement de compétences soit vers l’humain, soit vers le Kemono, on ne gagne pas tant que ça de quoi pouvoir tenir tête aux adversaires du moment, surtout en solitaire. À moins que ce ne soit aussi, en partie, la faute à un trop grand nombre de mécaniques restées obscures jusqu’au bout alors qu’elles auraient pu nous aider à faire front.
Cela nous a néanmoins amenés à penser que Wild Hearts est un peu trop orienté vers le multijoueur. Tout est d’ailleurs fait pour le rendre le plus souple possible. Pas d’interface complexe, on peut accéder aux parties d’autres chasseurs, ou en accueillir nous-mêmes, d’une simple pression de touche à la sélection de mission. Un système de « drop-in / drop-out » qui permet d’accélérer et faciliter les assauts. Cependant, n’aurait-il pas été préférable de rendre les monstres moins punitifs pour les chasseurs solitaires, et de leur conférer plus de résistance selon le nombre de compagnons dans l’équipe, un peu comme dans les Dark Souls où les boss disposent de plus de vie selon le nombre de joueurs ?
Rapport final – La chasse gardée de Monster Hunter
Wild Hearts résonne en nous comme une occasion manquée. Pourtant, tout était là pour faire un grand jeu. Une direction artistique de toute beauté, des monstres incroyables à découvrir et un gameplay faisant ressortir l’anachronisme des affrontements de Monster Hunter. La possibilité de fabriquer de nombreux outils et constructions selon nos besoins offre une dynamique nouvelle et très agréable à expérimenter.
Pourtant, ces qualités peinent à la longue à cacher les très gros soucis, notamment techniques, du titre d’Omega Force. Les bugs sont nombreux et parfois très gênants, et si on ne doute pas que les plus problématiques seront rapidement corrigés, ils restent encore bien présents au moment d’écrire ce rapport.
Là où hélas rien ne pourra être changé, c’est au niveau du bestiaire. Non pas son côté qualitatif, mais plutôt au niveau de la quantité. On ne rattrape pas comme ça les années qu’ont passées les équipes de Capcom à concevoir un bestiaire étendu. En résulte donc une expérience très sympathique qui pourra faire patienter nos chasseurs les plus addicts, qui risquent cependant de n’y voir qu’une parenthèse avant qu’une nouvelle mouture de la saga de Capcom ne voie le jour.
On ne marche pas comme ça sur les plates-bandes de Monster Hunter. Mais qui sait, les développeurs d’Omega Force pourraient bien se servir de Wild Hearts comme tremplin, sur une éventuelle suite, pour arriver à bousculer un leader parfois sans doute trop passéiste…