Depuis treize ans, le monde du tennis vidéoludique était orphelin de sa licence maîtresse. D’un point de vue plus global même, les amateurs de balles jaunes n’ont pas eu grand-chose à se mettre sous la dent dans l’intervalle, à part quelques tentatives ratées de titres comme Matchpoint, AO Tennis ou encore Tennis World Tour. Alors quelle ne fut pas notre joie de découvrir l’annonce surprise d’un Top Spin 2K25 en janvier dernier.
Rappelons-nous, dans les années 2000-2010, le maître du Tennis était Top Spin. Un savant mélange entre la technicité d’une simulation, avec des échanges demandant une maitrise des timings et de la position, et le plaisir immédiat de l’arcade. Bref, nous étions particulièrement enthousiastes à ce roi des courts, en espérant que ce Top Spin 2K25 soit un violent retour gagnant et non une nouvelle faute directe dans le monde du tennis virtuel.
(Test de Top Spin 2K25 sur PlayStation 5 réalisé à partir d’une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Le retour du roi
Depuis la mise en sommeil de la licence Top Spin, nous avons eu l’occasion de tester plusieurs autres tentatives de studios tentant d’occuper un marché à l’abandon, sans toutefois proposer suffisamment d’ingrédients dans le jeu pour que la mayonnaise prenne. Alors, il faut bien avouer qu’au lancement de Top Spin 2K25, nous étions à la fois impatients et craintifs.
Ainsi, passés nos premiers matchs, nos sensations se sont révélées excellentes. On retrouve dans nos premiers échanges contre l’ordinateur quelques vieux réflexes d’antan. On soigne nos placements, on prend nos marques pour envoyer de grosses claques de fond de court et on gagne nos premiers matchs.
Il faut dire que l’apprentissage se fait de manière très fluide, via l’académie Top Spin, accompagné par un John McEnroe numérisé pour l’occasion. Lifts, lobs, amortis, services… tout y passe via des modules à thème. Rien que du très classique, certes, mais il n’en faut pas nécessairement plus pour guider nos premiers pas.
On se lance alors à l’assaut du mode carrière, un incontournable des jeux de sport, et particulièrement du côté de 2K qui propose pour sa licence de basket un mode de jeu effectivement imparfait mais aux idées de mise en scène intéressantes. Et quelle ne fut pas notre déconvenue ! Top Spin 2K25 propose un mode carrière d’une indigence sans nom.
Imaginez-donc, une attente de près de treize ans pour obtenir un mode solo composé de trois tuiles (entrainement, sponsors et tournois) à enchaîner ad nauseum. Aucune espèce de forme de narration, aucun liant, juste du néant. Enfin presque. La création de notre avatar est plutôt réussie, mais à quoi bon si c’est pour participer à un mode exhibition qui ne dit pas son nom, avec pour seul changement réel une montée de niveau, et donc de statistique, et quelques cosmétiques sans grand intérêt.
Avec une icône comme McEnroe, pourquoi ne pas avoir au moins essayé de scénariser l’ensemble. Sans nous attendre à monts et merveilles, cela aurait fourni une épaisseur appréciable à ce mode de jeu. À titre d’exemple, même les FIFA il y a quelques années, alors qu’EA n’est pas particulièrement réputé pour ses prises de risque, avaient proposés quelques innovations sur ce point, avec notamment l’histoire d’Alex Hunter contée dans les épisodes 17 à 19.
À côté de cela, il y a les traditionnels modes en ligne pour faire des matchs d’exhibition, des tournois avec le casting de joueurs professionnels du jeu ou des matchs classés avec notre avatar virtuel préalablement créé (et issu du mode carrière). Et c’est tout. Top Spin 2K25 ne propose que le minimum syndical, et encore…
Mais sans sa couronne
Ce qui compte toutefois, et avant tout, c’est bien le feeling manette en main, et comme nous l’avons suggéré précédemment, nos premiers ressentis furent excellents. Il faut d’ailleurs relever la très bonne gestion du haut-parleur de la manette qui permet d’offrir un supplément d’immersion dans nos échanges.
Nos touchers de balle demandent avant tout un placement optimum afin de pouvoir faire gicler la balle de la manière la plus efficace, tout en gérant une jauge de frappe chargée qui permettra de maximiser à la fois la puissance et la précision de nos coups de raquette. Moins technique que cela semble de prime abord, il ne faudra que quelques échanges pour apprivoiser ces deux principaux aspects du jeu, ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle.
Une bonne nouvelle car le système, simple à comprendre, permet à tout un chacun de rapidement prendre du plaisir dans des matchs entre amis et permet de très vite pouvoir entrer dans des rallyes endiablés. Évidemment, les frappes forcées (entendre par là les tentatives d’envoyer des mines de fond de court alors que notre position est inadaptée) sont contre-productives (quand elles ne terminent pas out ou dans le filet), mais globalement, renvoyer la balle relève sur le terrain du jeu d’enfant.
Un virage plutôt arcade que simulation qui nous fait toutefois atteindre très (trop) vite les limites de Top Spin 2K25. Il n’y a qu’à voir le résultat matchs en ligne. Deux issues sont possibles à la très large majorité des points. Soit un coup gagnant après un retour de service, soit un rallye de plusieurs dizaines de coups. Une matérialisation vidéoludique du tennis assez éloignée de la réalité in fine.
D’autant que, signe aussi d’une certaine platitude dans le gameplay, on s’aperçoit peu à peu de paterns conduisant presque systématiquement au même résultat. Une frappe à plat dans une certaine position et c’est le filet, un slice en bout de course atteindra une zone spécifique… l’aléatoire, ou plutôt la glorieuse incertitude du sport, n’a aucune place dans Top Spin 2K25, alors qu’elle faisait partie du sel de nos partie dans les opus précédents. Ils n’étaient pas parfaits, certes, mais ils étaient bien plus proche du réalisme que ce nouvel opus.
Plus on y regarde d’ailleurs, et plus on a l’impression que le titre est creux. Outre les modes de jeu et le gameplay, très limités, le casting est lui aussi très faiblard. On retrouve bien quelques-unes des plus grandes stars du sport, comme Carlos Alcaraz, Serena Williams ou Roger Federer, lesquels disposent de coups « signatures » permettant de les identifier en un clin d’œil. Mais au total, ce ne sont que vingt-quatre compétiteurs, dont un quart d’anciennes gloires, qui font partie de la fête.
N’escomptez donc pas reproduire les matchs légendaires entre Nadal et Djokovic à Roland-Garros par exemple, ou une lutte fratricide entre les sœurs Williams. Et les absents sont nombreux. On pense notamment aux frenchies Gasquet, Monfils ou Paire, ou encore de Zverev, Ruud ou Sinner, alors qu’ils font partie du paysage tennistique de premier plan.
Une absence générale de contenu et d’expertise dans le jeu qui nous ont rendu l’expérience globale passablement décevante, amère presque tant on ressent Top Spin 2K25 comme un rendez-vous manqué. À tel point que l’on se demande s’il n’aurait pas été mieux pour nos souvenirs enchantés sur PlayStation 3 que cette nouvelle mouture ne voit pas le jour.
Déjà périmé
Dans le fond pourtant, la proposition peut se défendre. Les équipes de 2K ont choisi une approche assez arcade des matchs tout en essayant d’y insérer de la finesse, avec un système de placement partiellement réussi. Et nul doute que le temps de quelques soirées entre amis, le titre pourra faire la blague. Mais sur un terme plus long, il ne dispose pas à notre sens d’armes suffisantes pour véritablement convaincre.
C’est bien plus dans la forme que le titre nous a médusé tant on ne s’attendais pas à pareille déconvenue. Vous avez pu le voir, mais techniquement, Top Spin 2K25 est indigent. Même certains des joueurs stars sont méconnaissables, alors que dire du public, ou même simplement des animations et cinématiques. On est revenu dix années en arrière.
Mais que dire devant le choix effectué de lier le mode carrière, donc exclusivement solo, à une obligation de connexion à internet ? Et croyez-nous, pour en avoir fait l’expérience, on ne parle pas là d’une petite vérification au lancement du jeu. Lors d’une partie dans ce mode, nous avons subi une déconnexion d’internet, comme cela peut arriver de temps en temps. Et bien, il n’a pas fallu longtemps pour que l’on se fasse virer de notre partie avec pertes et fracas, avec un retour au menu principal particulièrement déplaisant.
Quant aux mentions expliquant que les serveurs, déjà pas bien solides au vu des nombreuses mésaventures (lags, déconnexions…) vécues lors de matchs en ligne, fermeront de toute façon, au plus tard, en décembre 2026, voire bien plus tôt et sans préavis si l’envie leur en prend, elles ne sont pas non plus de notre goût. Une pratique classique dans les jeux millésimés, en effet, et que l’on retrouve d’ailleurs dans les NBA 2K, mais qui n’est pas acceptable pour autant. Et au final, on se retrouverait alors avec une coquille vide où se battraient en duel un tutoriel et un mode exhibition.
Par contre, soyez rassurés, la boutique est quant à elle parfaitement fonctionnelle et propose toute la monnaie virtuelle dont vous pourriez avoir besoin pour acheter une paire de chaussette ou une raquette rose afin de customiser votre avatar. Bien sûr, on a vu pire déjà, à de nombreuses reprises, et acquérir cette monnaie virtuelle en jouant reste toujours envisageable, et si le contenu du jeu avait été à la hauteur, la pilule serait sans doute mieux passée, mais c’est ici un peu trop voyant pour ne pas être pointé du doigt.
Top Spin 2K25 fut pour nous une expérience qui a soufflé le chaud et le froid. Nous étions enthousiastes, et même très heureux de pouvoir de de nouveau fouler les courts de l’ancienne licence maîtresse du tennis. Nos sensations étaient même plutôt probantes et l’intégration astucieuse du haut-parleur de la manette notamment nous a offert un supplément d’immersion très appréciable. Dans le jeu aussi nous prenions nos marques, appréciant un éventail de possibilité et de trajectoire issus de placements et de puissance accumulée pour tenter de reproduire la réalité des terrains.
Pourtant, bien vite, quand notre voile de nostalgie a fini par se dissiper, la dure réalité nous a frappé en plein visage. Les limites dans le jeu se sont faîtes criantes et on s’est aperçu que Top Spin 2K25 est finalement un titre cherchant beaucoup plus (trop) l’instantanéité du plaisir de l’arcade au détriment de la finesse de la simulation.
Un choix éditorial qui pourrait trouver ses adeptes, mais que nous avons pour notre part regretté. Et il faut bien reconnaitre que nous n’avons pas su trouver de compensations dans son mode carrière sans saveur, ses modes en ligne mettant en lumière un gameplay bien trop basique (et des serveurs défaillants), sa boutique « pousse-au-crime » avec des pass saisonniers pour quelques cosmétiques exclusifs, sa réalisation générale datée, sa politique commerciale douteuse… Si sur le fond de jeu, Top Spin 2K25 peu à peu près se défendre, dans la forme par contre, il n’y a rien qui va.