En 2019, Obsidian sortait The Outer Worlds, nouveau jeu des créateurs de l’adoré Fallout New Vegas. Il en ressortait un jeu globalement abouti, clairement dans l’ADN Fallout mais dans un autre univers, avec cependant des mécaniques datées et une technique en retrait. 6 ans plus tard, Obsidian revient avec une suite, sur console de nouvelle génération. Est-ce que cette suite arrive à gommer les défauts de son aînée tout en gardant les qualités ?
(Test de The Outer Worlds 2 réalisé sur PS5 à partir d’une version fournie par l’éditeur)
L’ADN de Fallout, pour le meilleur… et la technique
L’ADN du premier opus et de Fallout New Vegas est omniprésent, et ce, dès la création de personnage. L’éditeur est très complet et permet d’entrée de jeu de d’attribuer un passé à notre avatar, ce qui débloquera des options de dialogue spécifiques tout au long de l’aventure. On peut également assigner ses premiers points de compétences et choisir un trait de caractère, personnalisant d’emblée l’expérience.
Malheureusement, les bons côtés ne sont pas les seuls à avoir fait le voyage. La technique, au mieux douteuse, est aussi de la partie. Avec une sortie exclusive sur consoles de dernière génération, on était en droit d’attendre mieux. On se retrouve à nouveau avec des mondes un peu ternes, dont certains semblent tout droit sortis de la génération procédurale de No Man’s Sky. Seule la planète Praetor s’en sort mieux, sauvée par une direction artistique très plaisante. Le reste est graphiquement passable et souffre de quelques bugs de collision.
Ce manque de finition n’est pas qu’esthétique, il impacte le gameplay. Les environnements manquent de couleurs et de contrastes, ce qui pose de vrais problèmes de lisibilité lors des gunfights. Il devient parfois difficile de différencier les ennemis des alliés, qui ont la fâcheuse tendance à se placer n’importe où. À cela s’ajoutent quelques bugs de collision et des chargements clairement trop longs pour un jeu de cette génération, venant casser un rythme déjà fragile.
Une exploration en mode automatique
La déception technique n’encourage pas à l’exploration, et la structure des mondes non plus. Les différentes planètes, que l’on débloque au fur et à mesure de l’histoire, proposent des cartes d’une taille convenable, à la manière d’un Destiny, mais souffrant d’un grand vide entre les points d’intérêt. La plupart des quêtes se déroulant dans des villes ou des bâtiments, l’exploration en elle-même n’offre que peu d’intérêt, même s’il arrive parfois qu’un PNJ perdu au milieu de nulle part nous demande de l’aide. On se retrouve donc vite à courir d’un marqueur à l’autre et à abuser du voyage rapide sans le moindre regret.
L’immersion est également freinée par d’autres soucis, comme les temps de chargement, bien trop longs pour cette génération, et un problème d’accessibilité. Le jeu n’est pas doublé en français, mais si les dialogues sont sous-titrés, les enregistrements audio que l’on trouve, cruciaux pour la compréhension de l’univers, sont en anglais, et sans aucun sous-titre. Le joueur maîtrisant un peu moins bien la langue des Spice Girls devra alors mettre pause, aller dans le codex et lire la retranscription française. Une vraie cassure dans le rythme.
Un rythme enfin trouvé dans les phases d’action, une interface fouillie
Heureusement, tout n’est pas à jeter. Le premier opus souffrait de gunfights mous et d’armes sans « pep’s ». The Outer Worlds 2 fait un vrai pas en avant sur ce point. Le gameplay est plus rapide, plus dynamique, les armes ont enfin plus d’impact, et l’IA agressive force le joueur à rester en mouvement, ce qui procure bien plus de plaisir que les phases molles du premier opus. Le sound design a lui aussi été retravaillé pour le mieux. On n’est pas encore au niveau d’un vrai jeu de tir, et certains fusils et pistolets restent déprimants à utiliser, mais le progrès est notable.
Pour s’en sortir dans les gunfights, il deviendra vite important de personnaliser son équipement. De ce côté-là, The Outer Worlds 2 propose un éventail de possibilités énormes, faisant penser à un looter-shooter vu la quantité d’équipements ramassés. Le problème est que l’interface ne suit pas cette profusion. Elle manque de clarté et donne peu envie d’être utilisée ; une fois un build correct trouvé, l’envie de changer s’en trouvera forcément réduite.
L’aventure dont VOUS êtes le héros
Mais le véritable cœur de The Outer Worlds 2, c’est son aspect RPG. Sur ce point, Obsidian livre un quasi sans-faute. Gestion de l’équipement, déblocage de bonus via des points de compétences, simili arbre de talent, réputation auprès des différentes factions : toutes les mécaniques sont présentes pour que chaque joueur vive une aventure unique.
Le système de Défauts, idée magnifique et parfaitement fondue dans l’univers sarcastique du titre, apporte encore plus de profondeur et de personnalisation à l’aventure. Au cours du jeu, vos choix de gameplay vont inciter le jeu à vous proposer des “défauts”, vous permettant, si vous l’acceptez, d’avoir un malus, mais également un bonus. Par exemple, si vos premiers points de compétences sont mis dans des catégories différentes, le jeu vous proposera le défaut “touche-à-tout”, vous bloquant le fait de mettre vos futurs points de compétences dans vos compétences les plus fortes, et donc vous empêchant de vous spécialiser, mais en contrepartie, les montées de niveaux feront gagner plus de points de compétences, vous donnant une polyvalence parfois utile. Ou si vous vous déplacez souvent accroupi, il vous sera proposé au bout d’un moment le défaut “mal aux genoux”, qui vous octroiera une vitesse de déplacement plus rapide en position accroupie, mais rendant cette position bruyante, et donc détectable plus facilement.
C’est là qu’on touche à une limite concernant les défauts : le fait d’être « touche-à-tout » est en réalité très punitif. Plus on avance, plus la spécialisation devient nécessaire, et le joueur polyvalent se retrouvera vite incapable de réussir quoi que ce soit, le forçant à utiliser la manière forte plus souvent que nécessaire. Un système à utiliser avec réflexion, et qui sera surtout là pour ajouter plus de variations lors des parties suivantes.
Une plume toujours aussi affutée
Là où le jeu devient magistral, c’est dans l’écriture. Qu’il s’agisse des quêtes principales, longues et pleines de possibilités pour atteindre ses objectifs, ou des innombrables missions secondaires, le niveau est exceptionnel. L’humour est sarcastique, les choix sont cornéliens et les impacts sont réels (on peut envoyer une pauvre élève soldat à la mort sans sourciller, ou choisir le sort réservé à des otages par exemple).
L’écriture est si réactive que l’ordre dans lequel on effectue les missions a une réelle importance, certaines situations pouvant être totalement différentes si vous avez rencontré tel ou tel PNJ au préalable, ou si vous avez récupéré tel objet spécifique. Le contenu est si riche que même les allers-retours un peu trop présents ou les longs chargements durant les voyages rapides ne viennent pas entacher le plaisir de la découverte et de la jouabilité.
The Outer Worlds 2 est clairement un jeu portant le sceau d’Obsidian, pour le meilleur et pour le pire. Il est compliqué d’accepter sa technique indigne d’une sortie en 2025 sur consoles de dernière génération, et ses mondes semi-ouverts qui manquent d’âme. Pourtant, il est tout aussi impossible de ne pas tomber amoureux de son écriture, de la profondeur de personnalisation offerte et de la liberté de choix qu’il propose.
Le jeu a le grand mérite de corriger des lacunes du premier opus sans en sacrifier les points forts. Les possibilités semblent décuplées, et c’est bien cette force qui captive, qui pousse à vouloir découvrir chaque dialogue et qui crée une rejouabilité exceptionnelle. Malgré ses tares évidentes, The Outer Worlds 2 procure un véritable goût de reviens-y, juste pour voir ce qui se serait passé si on avait fait des choix différents. Et n’est-ce pas là la marque d’un grand RPG ?