Shadowgate voyait initialement le jour en 1987, sur Mac, avant de connaitre une version NES mémorable quelques mois plus tard. Il faisait partie d’un quatuor baptisé MacVenture, composé de lui-même ainsi que de Déja Vu 1 et 2 (des jeux d’enquête policière) ainsi que de Uninvited (se situant dans une maison hantée).
Ces quatre titres partagent le même style de gameplay, à savoir, celui d’un jeu d’aventure en vue à la première personne où une série de mots d’action rythme la progression du joueur. En 2012 paraissait une campagne Kickstarter appelant une levée de fonds pour financer un remake de Shadowgate, qui fut un succès et qui vit l’avènement en 2014 de la bête sur PC. Remake désormais disponible sur consoles depuis quelques jours.
Pour les bienfaits du test en question, Votre Humble Narrateur aura rallumé sa vieille NES et relancé un de ses jeux fétiches afin de le parcourir en même temps que la version Switch dont il est question ici. Un excellent moment vidéoludique où passé et présent se croisent et se chamaillent avec bienveillance.
Shadowgate – La même difficulté, la beauté en plus
Dites donc, elle est grande votre baraque
Le postulat de base de Shadowgate est somme toute très bateau. Un seigneur démon qui se la pète, un magicien enfermé dans son château immense, un élu pour venir le délivrer et éradiquer la menace… Tout cela, on l’a déjà vécu 1000 fois, mais comme le jeu remonte à 1987, on va dire que ce n’était pas vraiment un classique abusé à l’époque, et on aime à se replonger dans cet univers de dark-fantasy comme s’il s’agissait d’un jeu tout récent.
On incarne donc ici un intrépide guerrier qui débarque avec ceci-cela et son couteau dans un château si gigantesque qu’il comporte même des lacs et des fontaines naturelles (les impôts locaux doivent être salés).
Dès lors, vous allez être amené à arpenter les diverses pièces du monument en résolvant des énigmes tout en tentant de ne point décéder, ce qui vous arrivera malheureusement souvent et qui fait tout l’intérêt de ce jeu. Voici une capture d’écran qu’il vous faudra apprendre à rencontrer fréquemment.
La mort est belle
D’autant que la mort dans Shadowgate surgit souvent de manière inattendue. Vous tentez de saisir une chandelle précise (ce qui est fréquent et important dans le jeu) ? Tac, le sol s’ouvre sous vos pieds, vous envoyant discuter avec la Faucheuse. Chaque salle du château (ou presque) comporte potentiellement un danger, qui peut prendre la forme d’un monstre quelconque mais aussi d’une embûche cachée dans le décor. C’est d’ailleurs là un des avantages et à la fois des défauts de cette version revisitée du jeu NES, on s’en rend compte en parcourant les deux en même temps.
De fait, le Shadowgate nouvelle version est magnifique. Ses superbes décors dessinés à la main sont à chaque nouvelle pièce un émerveillement pour les yeux, d’autant plus saisissant lorsque l’on a la version d’origine pour comparer. Par contre, ce foisonnement de détails visuels implique une lisibilité réduite par rapport aux environnements épurés de la version NES, où tout ce qu’il y avait à voir était immédiatement détectable sans chercher trop longtemps. Il va donc falloir désormais passer le curseur sur tout l’écran pour être sûr de ne pas rater un élément à ramasser ou avec lequel interagir. C’est le prix à payer pour le rendu visuel magnifique du jeu, et ce n’est pas un bien grand prix, juste un détail pour pinailler.
Un peu de technique (sa mère)
Et tant qu’on est dans le technique, autant s’arrêter un instant sur la bande-son. Les musiques de Shadowagte sur NES étaient mémorables de qualité, au point qu’elles reviennent en tête facilement 30 ans après avoir parcouru le jeu. On les retrouve en version symphonique sur le remake, tant retravaillées qu’on a presque du mal à les reconnaître tellement elles ont reçu un lifting nettement plus moderne. Mais bonne surprise pour les puristes : dans les options, vous pouvez choisir de parcourir le jeu en écoutant les musiques de la version 8 bits ! Une petite attention bien sympathique, qui rappelle celle du remake de Wonder Boy: the Dragon’s Trap permettant de switcher entre la version pimpante du remake et la version Master System.
Enfin, penchons-nous un peu sur le gameplay. Shadowgate (le remake) étant à la base un point’n click conçu pour être joué à la souris, il n’était pas anormal de craindre le rendu console. Dans les faits, le système s’avère efficace, mais nécessite un certain temps d’adaptation pour être maîtrisé sans se planter de touche. Il se base sur un système de roues à ouvrir pour utiliser telle compétence ou tel objet, effectuer telle action. Au-delà de cela, votre curseur vous indiquera si vous tombez sur un objet à observer (pour en obtenir description) ou ramasser, à vous ensuite d’effectuer les bonnes combinaisons pour progresser.
On notera que contrairement à la mouture PC, Shadowgate ne propose pas sur console de version française. Ce qui n’est pas un problème pour un joueur bilingue, mais risque de complètement ruiner l’expérience pour un anglophobe. Shadowgate est un jeu très textuel, où les descriptions de ce qui se passe à l’écran sont légion, et globalement écrites dans un anglais soutenu, voire ancien, donc si la langue de Chris Waddle n’est pas votre fort, vous feriez bien de passer votre chemin. Dommage.
Voilà, vous savez tout. Shadowgate est un jeu superbe à voir, mais conserve l’essence qui est sienne depuis plus de 30 ans. C’est un point’n click exigeant, parfois vicieux, dans lequel l’apprentissage se fait via la multitude des échecs. Doté d’un scénario plus développé que son ancêtre pour le plus grand plaisir du joueur, il sait s’adapter aux désirs des uns et des autres. Les moins téméraires auront ainsi le choix de bénéficier ou pas d’indices permettant de progresser, tandis que les plus hardcore se verront proposer un mode difficile pour un jeu qui l’est déjà de base.
Shadowgate, fruit d’une campagne de funding réussie, est une belle oeuvre qui sait à la fois satisfaire les anciens fans et séduire les nouveaux joueurs, en leur donnant un aperçu relifté de ce à quoi jouaient leurs aînés sur leurs consoles 8 bits.