Cela fait maintenant un peu plus de 20 ans que la saga Resident Evil est née et pour les fans de la première heure. Il faut le dire, la série n’allait clairement plus dans la bonne direction. Depuis le quatrième opus, Capcom a choisi de jouer la carte de l’action horrifique, un changement parfaitement maîtrisé à la base, mais qui se soldera par une surenchère dans l’action, allant jusqu’à compromettre l’intégrité même des origines de la série bien ancrées dans le genre survival horror.
On commençait à se demander si Capcom n’avait finalement pas perdu son mojo, sa faculté de créer des jeux d’horreur en se basant sur les peurs les plus viscérales de l’esprit humain. Mais ça, c’était avant que Resident Evil 7: Biohazard ne sorte d’outre-tombe pour nous rappeler que quand ils le veulent vraiment, ils arrivent à nous plonger dans l’horreur comme personne.
Ce test ne fut pas un long fleuve tranquille, mais nous sommes finalement revenus de Louisiane pour vous donner nos impressions sur ce renouveau d’une série emblématique du jeu vidéo.
Bienvenue en Louisiane
Nous voici donc partis pour la Louisiane après que Mia, notre femme, disparue depuis plus de trois ans, nous a contactés tel un fantôme surgi du passé. Malgré un message de mise en garde de sa part nous indiquant de rester à l’écart, c’est appâté par l’espoir que nous voici rendus à la maison de la famille Baker. Sur place, le décor est tout de suite posé : marécage poisseux, chaleur moite, végétation en friche, autant dire qu’on se rend rapidement compte que s’il nous arrive quelque chose, personne ne viendra nous secourir.
En fouinant autour de la maison, nous pouvons apercevoir le véhicule de l’équipe de tournage, ce qui vous dira certainement quelque chose si vous avez pris le temps de faire la démo du jeu. Graphiquement, ces premiers instants dans le jeu nous ont tout d’abord laissés perplexes quant aux qualités esthétiques et aux promesses de photoréalisme délivrées par Capcom.
La première cinématique, tout d’abord, nous laisse observer un véhicule en mouvement, véhicule qui semble plus glisser que rouler sur le sol. Puis dans un second temps, même si la cohérence et la crédibilité des décors extérieurs à la maison font mouche, il ne vaut mieux pas trop s’attarder sur les textures, qui n’ont pas bénéficié d’un soin extrême. Après, nous sommes d’accord, nous ne passons pas beaucoup de temps en extérieur, mais quand même.
Passé ce cap, et une fois que nous avons pénétré dans la demeure, là par contre, il faut l’avouer, le jeu sort ses tripes pour nous en mettre plein la vue et faire cracher à notre console tout ce qu’elle a dans le ventre. Malgré tout, Capcom n’a pas souhaité jouer sur la surenchère visuelle, tout se joue dans les détails et leur réalisme pour nous plonger dans une ambiance délicieusement répugnante.
L’immersion est alors totale, nous faisant passer d’un état psychologique à l’autre via les qualités graphiques du jeu d’une part, mais aussi par la mise en scène de celui-ci. L’emballage de Resident Evil 7: Biohazard, contrairement aux dernières productions de la licence, se place comme un énorme point positif que n’importe quel joueur saura apprécier, d’autant plus que la fluidité est au rendez-vous, avec un joli 60 images par seconde.
Côté son, le titre en joue beaucoup en créant une ambiance oppressante. Les différents bruits d’ambiance vont alors du parquet qui craque, aux volets qui claquent, en passant par les vers grouillants sur de la matière en décomposition. Grâce à ce paysage sonore vraiment bien conçu, on a constamment la sensation que quelque chose va se passer, on se retourne régulièrement au moindre bruit suspect, et cet aspect du jeu est fort dans le sens où les jump scare sont assez limités, privilégiant la vraie peur et non pas l’effet de surprise.
Un jeu aux allures de « monstre de Frankenstein »
Resident Evil 7 est assumé comme l’épisode du retour aux sources, celui qui veut renouer avec ce qui a fait le succès de la série dans ses jeunes années. Le premier opus était vu comme un précurseur en son temps, mais les temps changent et pour continuer d’avancer il faut pouvoir se renouveler sans se compromettre, sous peine de rencontrer la colère des fans.
Les épisodes 5 et 6 en sont la preuve. Pour créer Resident Evil 7: Biohazard, Capcom a clairement été piocher ici et là en prenant le meilleur de l’horreur sur les cinq dernières années, et ce dans des jeux tels que Outlast ou encore la fameuse démo P.T Silent Hills qui avait fait frissonner les amateurs du genre. En créant ce que l’on peut comparer à la créature de Frankenstein, les risques étaient grands, mais le résultat est absolument détonant.
L’horreur fonctionne à la perfection et même si Ethan, le personnage que l’on incarne, ne semble pas aussi dérouté que nous, on peut vous assurer que l’on tient ici l’un des meilleurs survival horror de ces dernières années. Toutes les inspirations s’imbriquent parfaitement les unes avec les autres pour susciter toujours plus d’angoisse chez le joueur.
Malgré tout, cela n’est pas sans conséquence et l’on se retrouve avec le syndrome Outlast inhérent à la vue à la première personne. Ce procédé favorise l’immersion, la peur et décuple les sensations, mais s’identifier au personnage que l’on incarne en devient plus complexe. Pour gommer au maximum ce défaut, il faut se reposer sur divers mécanismes tels que des flashbacks, des éléments scénaristiques associés au personnage que l’on incarne, etc.
Malheureusement, ce n’est pas le cas ici et nous n’apprenons presque rien sur Ethan qui pourrait aussi bien s’appeler Jack tant il est interchangeable. Son manque de réactions « réalistes » face à tout ce qui l’entoure n’aide pas non plus à s’y attacher ni même à s’identifier à lui. Il apprend que sa femme est vivante après 3 ans sans nouvelles, il arrive dans un endroit monstrueux, est confronté aux pires horreurs imaginables… et pourtant, il reste relativement relax face à cette situation délirante.
À noter que cela est en grande partie relatif à la qualité du doublage qui manque par ailleurs d’ajustements au niveau de la synchronisation labiale.
Une identité toujours intacte malgré le renouveau
C’est là qu’on en arrive au point sensible, Resident Evil 7: Biohazard est-il un vrai Resident Evil malgré tout ? La question est vraiment épineuse et nous allons y répondre en plusieurs points. Premièrement, il faut avouer que le scénario laisse bien plus de questions en suspens qu’il n’apporte de réponses.
Pour essayer d’être le plus clair possible, le jeu a sa propre histoire, qui est bien racontée, le rythme est plutôt bon malgré quelques baisses de régime, mais globalement tout va bien à ce niveau-là. Cependant, dans la grande histoire de la série, on a du mal à comprendre où cet opus souhaite en venir. Est-ce là un épisode visant à lancer une sorte de nouvel arc ? C’est ce qui nous a semblé le plus plausible après avoir terminé le jeu, dont la fin nous a réservé une petite surprise.
Ensuite, il est intéressant de voir que même si la prise en main en vue à la première personne change beaucoup de choses, il n’en fragilise pour autant pas les mécaniques de gameplay héritées depuis des années. On retrouve le même système d’inventaire, modernisé pour l’occasion en nous permettant de choisir 4 emplacements attribuables à la croix directionnelle, de sorte que l’on puisse via ces raccourcis être plus réactif face aux différentes menaces.
On retrouve aussi le système de combinaison pour créer nos munitions, améliorer nos plantes, fabriquer des sprays médicaux, etc. Les pièces sécurisées permettant de sauvegarder et de stocker ses objets dans un coffre sont toujours là. Les combats de boss toujours aussi marquants grâce à ce fameux bestiaire bien crade relatif à la série. Les énigmes fonctionnent aussi plutôt bien et leur difficulté est assez bien dosée, avec un thumbs up pour le passage « anniversaire » qui est clairement notre coup de coeur.
Enfin pour terminer sur les éléments hérités de la série, on retrouve quelque chose de magnifiquement bien fait, à savoir les ouvertures de portes. Vous le savez surement, ce qui faisait le charme des vieux épisodes, c’est de ne pas savoir sur quoi nous allions tomber une fois l’ouverture d’une porte amorcée. Dans Resident Evil 7: Biohazard cet élément a été remis au goût du jour et saura vous faire flipper comme à la grande époque.
Troisième et dernier point, négatif pour le coup et qui en gênera certains, c’est l’absence de personnages emblématiques. Il n’est pas possible de jouer un autre personnage que Ethan sauf exception singulière, et on a du mal à croire qu’il puisse devenir un personnage emblématique par la suite, à l’instar d’un Léon ou d’une Jill. Du coup, mis à part quelques éléments, on a du mal à se sentir vraiment dans un Resident Evil, d’autant plus que sans spoiler, on est vraiment très loin des zombies ou autres infectés.
Une déception, qui, nous l’espérons, servira pour le propos de l’épisode 8, dont le 7 serait une base solide en terme « d’architecture ». Cet opus garde donc l’identité de la série en en modifiant certains aspects afin de l’ancrer dans son époque. Cependant, on regrettera peut-être que Resident Evil 7: Biohazard prenne plus l’allure d’un spin-off, plutôt que d’un épisode canon, comme son titre laisse présumer.
Avec Resident Evil 7: Biohazard Capcom réussit à renouer de la meilleure des façons avec les origines de la série en créant un survival horror qui n’a rien à envier à aucun des maîtres étalons du moment. En s’inspirant des meilleurs, ils ont réussi à créer quelque chose de moderne tout en conservant cette identité unique.
Avec une ambiance parfaitement maîtrisée, des sensations décuplées par la vue à la première personne et le retour très marqué de l’aspect survival, ce nouvel opus parvient totalement à nous convaincre que cette série n’est définitivement pas morte. Mieux encore, il pourrait s’agir du premier épisode d’un renouveau visant à annoncer un futur plus que radieux.
Alors oui, le personnage principal sera vite oublié, ce n’est pas l’épisode de la série dont on va se rappeler le plus en termes de mise en place scénaristique, mais il demeure la meilleure expérience survival horror du moment, nous a fait peur comme aucun autre épisode de la série, et saura à coup sûr vous apporter les sensations que vous recherchez.