En plus de 35 ans de carrière, le résident le plus célèbre du Royaume Champignon s’est illustré dans un grand nombre d’activités extra-professionnelles. Courir les princesses, faire du karting, enterrer ses rivalités les unes après les autres pour prendre part à des joutes plus ou moins sportives, assez diverses, pas toujours fairplay… Avec autant de cordes à son arc (et si peu de place dans son agenda), pas surprenant que l’ex-plombier ait lâché son taf, un fait d’autant plus cocasse que s’il y a bien un truc qu’on ne l’a jamais vu faire, c’est bien de la plomberie (il crapahute dans des tuyaux, oui, mais de la plomberie…)
Donc, retrouver Mario et ses potes sur le green, un club à la main, ce n’est pas vraiment original. Loin de la même, puisque ce délire « made in Japan » remonte même à 1999 avec le premier épisode sur Nintendo 64, une époque où vous n’étiez probablement pas né et où même les formes arrondies de notre plombier avaient des angles (ceci dit, les angles n’ont jamais empêché même les moins imaginatifs d’entre nous de fantasmer sur Lara Croft, pas vrai ?). Bref, le Royaume Champignon s’illustre à nouveau avec une compétition de golf et il est l’heure de distribuer les points à Mario Golf: Super Rush. Un jeu à chérir comme un trophée ou à enterrer dans un bunker ?
(Test de Super Golf: Super Rush réalisé sur Nintendo Switch à partir d’une version fournie par l’éditeur)
Pitch commercial
Retrouver Mario et toute la smala sur le fairway ou sur les courts, c’est un peu comme organiser des retrouvailles avec de vieux amis. On y retrouve certains visages avec joie et on partage des moments parfois grandioses et nostalgiques, parfois extrêmement malaisants… Aujourd’hui, voir Camelot aux commandes, ça fait le même effet… Que penser ? D’un côté, on a ces souvenirs d’une époque où il signait les meilleurs jeux de sport sur consoles portables et des RPG grandioses, une époque où son logo apparaissait dans leurs jeux (!)… De l’autre, on a le pauvre (mais sympa) Mario Golf: World Tour et l’effroyable Mario Tennis: Ultra Smash (merci à Mario Tennis: Aces d’avoir récupéré la balle…)… Bref, pas sûr de savoir quoi penser de Mario Golf: Super Rush…
Jusqu’ici, ça s’annonçait bien. Effectivement, à mesure que Nintendo distillait de l’info sur son titre, on commençait à croire que le chemin pris par ce dernier serait similaire à la trajectoire de balle opérée par Mario Tennis: Aces, un jeu de sport certes convivial, mais surtout plus que la sempiternelle formule qui se répète d’un épisode à l’autre. Bien sûr, on retrouverait bien les modes libres, en solo comme en multi, mais également un mode aventure scénarisé avec des éléments de RPG (comme au bon vieux temps) et des modes de jeu inédits, un coup de frais bienvenu pour un sport plutôt austère. Seulement, ça ne paie pas.
Bogey in the mix
C’est assez impressionnant pour un jeu Nintendo « original » (comprenez par-là « pas un portage »), mais Mario Golf: Super Rush est un jeu absolument sans saveur, limite paresseux même… Tout d’abord, commençons justement avec le mode scénario. Dans « Aventure golfique », vous incarnez un Mii et votre objectif est de progresser dans les coupes régionales du Royaume Champignon. Terminer une coupe débloque la région suivante (et, naturellement, son parcours pour les modes libres) et puis c’est tout. On peut se consoler en entraînant son personnage ? Bof. Oui, il y a bien une prise de niveaux et la possibilité de booster ses stats, mais en booster une en réduit une autre, alors bon, comme souvent, on se retrouve à équilibrer le tout…
Donc, une histoire plate qui repose sur une boucle répétitive (avec des PNJ bavards qui répètent inlassablement la même onomatopée à chaque pression du bouton A), peu ou pas de quêtes annexes, pas d’exploration… Où est l’aventure ? C’est près de 10h de tuto qui ne vous servent qu’à débloquer les divers décors et qui vous forcent la main à essayer les quelques formes que prend la compétition… Et on dit « décors », mais entre forêts avec des cottages, forêts avec plus d’arbres, désert, forêts avec des vallons et des tornades… Vert, vert, vert… Aucune originalité ! Les jeux Mario sont toujours colorés et les environnements nombreux et variés. Où sont le fun et le dépaysement ? Plage Cheep-cheep ? Donut Mountain ? Cool, cool Mountain ? Rien ? Sérieux ?
Bon, on va peut-être pouvoir se rattraper avec les nouveaux modes de jeu ? Hum… Allez, pour être sympa, le Speed Golf se défend. Pour rappel, cette option (qui est l’argument principal de vente de cet épisode) consiste à tirer sa balle et courir après comme un clébard et la mettre dans le trou avant vos adversaires et en le moins de coups possible. Une course déclinée de plusieurs manières au sein du jeu. Naturellement, Nintendo oblige, ce mode est également celui dans lequel les mesquineries sont permises puisque vous pouvez tacler vos adversaires et pousser leurs balles hors du fairway avec un dash. Ceci dit, la magie de ce mode n’opère vraiment que contre des vrais joueurs, le CPU étant probablement censuré dans ces options de dialogue…
Dans les vieilles marmites
Finalement, le réel point fort de Mario Golf: Super Rush, c’est dans une partie classique qu’on le retrouve : la jouabilité (avec les boutons). Une frappe de balle s’opère en deux temps (au lieu de trois dans la majorité des jeux de golf). Sur une même jauge, un premier passage définit la puissance du tir quand le second se concentre à la fois sur les effets en vol et à l’atterrissage. Ainsi, c’est lors de cette phase que vous choisirez comment votre balle doit se comporter en l’air, effet généralement renforcé par la statistique « Effet » du personnage que vous avez choisi. Tout simplement…
Cette méthode est toutefois contrebalancée par une nouveauté. Si jadis il fallait se méfier de l’inclinaison du sol, de la puissance du vent ou des obstacles (logique), cette fois, il faudra également prendre la chance en considération. En effet, plus votre tir est puissant, plus il a de chance d’être sujet au hasard. Si son impact est généralement minime (la balle déviera légèrement sur les côtés), il peut devenir nettement plus gênant lorsque la balle traine dans les hautes herbes ou est prise dans le sable… Ainsi, la récupérer peut devenir plus délicat encore. On notera cependant que l’effet n’est pas extrêmement exagéré et qu’il ne rend pas injuste un jeu qui n’est déjà pas toujours très tendre avec les fautes (une grosse erreur pouvant coûter toute une compétition).
Enfin, nous parlions de classicisme et de paresse, le dernier point à aborder fera la synthèse des deux… Visuellement, Mario Golf: Super Rush fait de la peine… Si on est prêt à admettre que c’est mignon et coloré (c’est dans le cahier des charges d’un jeu Mario, encore que « couleur », ça ne concerne que les teintes de vert ici), le reste est tout simplement catastrophique… Aliasing omniprésent, manque évident d’inspiration sur le plan artistique (musiques faibles, map recyclées et recyclables, etc.), animations des personnages… Tout est inférieur à ce que Nintendo a l’habitude de proposer… Enfin, tout sauf le tarif…
Vous n’avez probablement aucun doute sur notre conclusion, mais Mario Golf: Super Rush n’est pas à la hauteur de nos attentes. Si un néophyte pourra toujours trouver une porte d’entrée convenable dans l’univers du golf (principalement grâce au capital sympathie du casting), le cocktail « absence de soin, de charme, de contenu à débloquer, et technique déplorable » va probablement laisser un goût amer à beaucoup d’autres. Ceci dit, grâce au Speed Golf et son approche party-game (curieux pour un concept si exigeant), le titre pourrait trouver une petite place dans les soirées multi « coups de p*te entre potes ».
En revanche, vous êtes prévenu, il ne faut pas chercher plus… (à part le trailer de sortie qui est plutôt cool). Enfin, puisqu’il est de bon ton de terminer une partie en notant la prestation d’un golfeur avec des noms d’oiseau, permettez-nous de conclure de la manière suivante : Mario Golf: Super Rush est plus proche du vieux coucou que de l’aigle de guerre. Ceci dit, la leçon sera peut-être enfin apprise… Qui a dit « caddie colle » ?