Dévoilé lors du dernier Xbox Developer_Direct, Hi-Fi Rush fut la surprise de la conférence en ligne, d’autant plus qu’il fut mis à disposition des abonnés au Game Pass dès la fin de la diffusion de la vidéo. Surprise aussi, car le jeu n’a strictement rien à voir avec les travaux précédents du studio qui a été en charge de son dévelppement, Tango Gameworks, plus habitué à l’horreur (The Evil Within, Ghostwire Tokyo). Alors, Hi-Fi Rush est-il une très bonne surprise, ou au contraire une tentative manquée qui est venue s’échouer sur le Game Pass ?
(Test Hi-Fi Rush sur Xbox Series X réalisée à partir de la version disponible sur le Game Pass)
Get this party started
Vu le peu de temps qui s’est écoulé entre les premières rumeurs sur le jeu, et sa mise à disposition sur le Game Pass, on démarre l’aventure sans vraiment savoir où on met les pieds. La (très bonne) surprise n’en est que plus marquante : c’est coloré, dynamique, et la mise en scène en met plein la vue. Sans compter le fait que nos premières minutes dans le jeu sont accompagnées par le hit imparable des Black Keys, « Lonely Boy ». Difficile de ne pas avoir envie de passer un peu de temps avec Hi-Fi Rush après cette entrée en matière. Tango Gameworks sait comment attirer le chaland !
Il y a quelque chose de Jet Set Radio dans le jeu, ou en tout cas de l’émerveillement qu’avait pu provoquer la découverte du hit Dreamcast à sa sortie. Bien entendu, le cel-shading, parfait, y est pour beaucoup. Mais pas seulement : le même rythme entraînant, l’efficacité de la musique, les couleurs acidulées… Hi-Fi Rush est immédiatement aussi sexy qu’avait pu l’être Jet Set Radio.
De plus, le titre arbore cette patte de la fin des années 90, début 2000, en indiquant les morceaux qui accompagnent le niveau à la façon dont le faisait MTV sur ses clips. On note d’ailleurs qu’au milieu de compositions originales, la B.O. contient aussi des morceaux d’artistes connus, comme les Black Keys, cités ci-dessus, ou encore Nine Inch Nails ou Prodigy. Le jeu est ainsi extrêmement enthousiasmant dès le début.
And the beat goes on
Bonne nouvelle. Si le jeu sait parfaitement comment démarrer, la progression n’est pas en reste. Il commence comme un action-platformer en 3D, avec ce petit twist : attaquer en rythme rend les actions bien plus efficaces, et distribue des dégâts bien plus importants. Pour nous aider à presser les touches dans le bon tempo, le décor tout entier vibre au rythme de la musique. Cependant, garder le rythme ne sera pas obligatoire, et il est possible d’attaquer en passant à côté du tempo.
Progressivement, les possibilités de gameplay vont s’enrichir, et Chai, le héros qu’on incarne, sera rejoint par un nouveau personnage, Peppermint (un peu clichée pour un personnage cyberpunk), une hackeuse qui s’avèrera aussi être une tireuse d’élite. Entre les niveaux, Peppermint pourra enrichir nos options d’attaque avec des attaques spéciales – un enchaînement de touches à réaliser en rythme – mais aussi en installant des augmentations sur notre personnage (plus de santé…).
Peppermint peut aussi apparaître en soutien durant les combats, puis Chai pourra littéralement s’envoyer en l’air grâce à son bras mécanique. Enfin, le jeu introduira la parade… Le gameplay se complexifiera ainsi tout au long des premières heures pour multiplier les possibilités en combat, et augmenter de façon exponentielle les dégâts infligés aux ennemis. Et tout cela avant de rencontrer Macaron, un personnage aux allures de Barett (FFVII), mais qui est contre la violence (!), et qui viendra lui aussi installer des augmentations sur Chai.
Boys don’t Cry
Une fois que tout l’éventail des possibilités de gameplay aura été déroulé, le titre d’Hi-Fi Rush prendra tout son sens, et il sera possible – ce sera même l’intérêt principal du titre – en gardant le rythme d’enchaîner attaques, parades, et coups spéciaux sans aucun temps mort, un peu à la façon d’un Devil May Cry. Tiens ?! À la tête de Tango Gameworks, on retrouve d’ailleurs un certain Shinji Mikami, créateur, entre autres, de titres comme Resident Evil, Vanquish, ou… Devil May Cry !
Le jeu, qui semblait de prime abord une anomalie pour Tango Gameworks, se révèle ainsi une sorte de nouvelle variation sur un thème que Mikami décline depuis longtemps. Si la « méta » de Devil May Cry possédait déjà une composante rythmique, on peut aussi évoquer Vanquish, qu’il a dirigé en 2010, et qui nécessitait lui aussi ce sens du rythme, ou encore, et surtout, PN03, une exclu Capcom pour GameCube (2003) dans laquelle il s’agissait, comme dans Hi-Fi Rush, d’attaquer en rythme avec la bande-son.
Une fois qu’on s’est fait au système de jeu, les arènes d’Hi-Fi Rush deviennent particulièrement jouissives. Les phases de plateformes qu’on traverse entre les combats en sont hélas d’autant moins intéressantes. Non pas que cette partie soit ratée, mais elle reste bien trop classique, et on en garde parfois un sentiment de remplissage entre les combats. Heureusement, les panoramas sont très réussis, et le cel-shading est particulièrement efficace, aussi bien pour les plans serrés, à qui il donne un vrai feeling d’anime en 2D, que pour les plans plus larges. C’est même là où il est le plus impressionnant.
Un autre défaut du jeu qu’il faut évoquer, c’est son scénario, lui aussi plus que générique. Une méchante corporation, qu’un héros naïf et un peu frimeur venu de nulle part et une jolie hackeuse vont faire tomber (presque) seuls contre tous… Et tout comme Gradur, inoubliable interprète roubaisien de « Ne reviens pas », ne se prenait pas la tête sur ses textes, mais rappait essentiellement pour s’amuser (« J’dis que d’la merde, nique sa mère, vas-y, bouge la tête »), les scénaristes d’Hi-Fi Rush n’ont écrit qu’un prétexte à une enfilade d’affrontements. Des points de détails, cependant, et la somme des réussites du jeu est bien supérieure aux quelques défauts qui se feront (à peine) remarquer.
Sur exactement le même segment que No Straight Roads, un jeu d’action et de plateforme basé sur le rythme, Hi-Fi Rush réussit tout ce à côté de quoi NSR était passé, en mettant notamment la musique au centre du jeu, et pas seulement du scénario. Hi-Fi Rush est ainsi une très bonne surprise. Par sa façon de débarquer sans crier gare sur le Game Pass, d’abord. Pour son style et son gameplay, qu’on pensera a priori à mille lieues de ce qu’on attendait de Tango Gameworks. Mais aussi pour sa complexité insoupçonnée, qui fera le bonheur des techniciens du pad et des amateurs de hi-score.
La réalisation ne gâche rien, avec un cel-shading très réussi qui donne une tonalité d’anime super cool. Super cool sera d’ailleurs probablement l’adjectif qui collera le mieux au jeu : joli, accessible, fun, mais pouvant se révéler technique pour les joueurs ayant cette appétence, Hi-Fi Rush est définitivement ce petit cadeau rock’n roll qu’on n’attendait pas !