Même s’il s’appelle Revive (ressuscité, en gros), Double Dragon n’était pas vraiment mort. Après la série originale et ses portages signé Technos, entre 1987 et 1995, le jeu est déjà revenu plusieurs fois. On notera notamment Double Dragon Neon, en 2012, Double Dragon IV en 2017 ou encore Double Dragon Gaiden pas plus tard qu’en 2023. Alors fallait-il un énième retour du doyen des beat’em all ? Double Dragon Revive a-t-il des arguments à faire valoir dans un genre qui a complètement muté depuis l’épisode original de 1987 ?
(Test de Double Dragon Revive réalisé sur Xbox Series via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Le choix dans la date
Double Dragon Revive arrive à une période chargée, alors que d’autres piliers du genre reviennent eux aussi sur les écrans : Ninja Gaiden 4, d’abord, avec une recette classique, qui a peu évoluée depuis les épisodes précédents, mais une parfaitement maîtrisée ; Shinobi, également, qui, avec Art of Vengeance, fait preuve d’une belle modernité sans néanmoins oublier ses racines 16 bits. Mais la période est aussi celle du célébré Absolum, signé Dotemu, le studio qui a remis à jour Streets of Rage, qui modernise et sublime le gameplay d’un Golden Axe, lui-même devant justement beaucoup à la saga Double Dragon.
La concurrence est donc rude, et le genre du beat’em up (ou du beat’em all, choisissez votre camp) a su évoluer et se moderniser au cours du temps, sans jamais s’éloigner des fondamentaux : distribuer toujours plus de tatanes en progressant à l’horizontal, de la gauche vers la droite.
Tradition et savoir-faire des temps anciens
Double Dragon Revive est un « vrai » Double Dragon. On retrouve donc les deux héros habituels de la saga, Billy (le bleu) et Jimmy Lee (le rouge), qui doivent, dès le début du jeu, porter secours à leur amie d’enfance Marian, enlevée par un gang. Sauf que, 2025 oblige, Marian n’assume plus le rôle de demoiselle en détresse des premiers épisodes. On apprend rapidement (tellement rapidement qu’on ne prendra pas la peine de mettre une balise « spoiler » ici) que cette dernière s’était volontairement laissé enlever pour mener son enquête sur le gang en question.
Une fois rejointe par Billy et Jimmy Lee, elle devient un personnage jouable à part entière, comme les deux jumeaux (un autre personnage encore se joindra à la fête vers la moitié du jeu). Une belle mise à jour des motifs de la saga, mais que l’on avait déjà vue dans une licence cousine : River City Girls, qui dès 2019 inversait les rôles, et envoyait les filles sauver leurs petits amis kidnappés.
En termes de modernité, ce sera hélas plus ou moins la seule chose à noter. Pour le reste, on est face à un beat ‘em all tout ce qu’il y a de plus traditionnel, qui, certes, respecte les codes qu’il a participé à instaurer, mais qu’il échoue à renouveler quand d’autres titres tels que ceux cités plus haut s’en donnent à cœur joie. Ici, et malgré la participation d’Arc System Works (à l’édition), le gameplay se résume plus ou moins à du « button mashing », et ce n’est pas les rares possibilités de wall jump ou d’utiliser des réverbères ou autres conduits pour se projeter dans les airs afin de réaliser une attaque au sol dévastatrice qui rendront le titre plus stratégique. Techniques qu’il faudra néanmoins impérativement maîtriser, car certains niveaux, impitoyables, seront basés sur l’exploitation de ces mouvements.
Double Dragon Revive n’a absolument rien de neuf à proposer, et on peut se demander ce qui pourrait pousser un joueur à opter pour ce titre plutôt qu’un de ceux cités ci-dessus, surtout dans une période aussi chargée ?
Triple Dragon ?
Triple Dragon, parce que les Billy et Jimmy Lee sont rejoints par Marian, mais aussi parce que le jeu semble enfin gérer la troisième dimension après laquelle il court depuis de nombreuses années. Double Dragon Neon s’était déjà essayé à la 3D avec un résultat que beaucoup avait jugé catastrophique. Ici, graphiquement, c’est plutôt propre, même si cela manque un peu d’identité et de prise de risque. On pense très rapidement aux personnages de la série SNK King of Fighters, par exemple. Mais en dehors de ce manque d’originalité, les personnages sont plutôt réussis, les animations sont lisibles et bien fichues : Double Dragon valide enfin son passage à la 3D.
On est par contre très déçu par les cinématiques, qui consistent en des panneaux fixes illustrés en 2D. Un choix qui témoigne soit d’un certain manque de moyen, soit d’une relative fainéantise.
L’autre point de déception, ce sont les contrôles. Les personnages semblent peser une tonne, et on se surprend à forcer un peu sur la manette pour les faire se déplacer tant les mouvements sont lourds et encombrés, ce qui perturbe assez largement les combats, surtout quand les ennemis sont nombreux dans l’arène. Certains niveaux de plateformes, qui sont probablement là pour apporter un peu de variété au « button mashing » ambiant, sont aussi particulièrement frustrants (même si loin d’être insurmontables), les échecs semblant plus souvent plus imputables à la maniabilité des personnages plutôt qu’à des erreurs du joueurs.
Double Dragon Revive est une proposition tout à fait acceptable de beat ‘em up à l’ancienne, qui ferait plutôt bonne figure dans ces bornes d’arcade « néo-rétro » que l’on se fait fabriquer pour son salon. La D.A. en 3D, bien que sans trop d’imagination, est à la hauteur, et le jeu représente un challenge correct, avec de vrai pics de difficultés, et des modes de jeux variés pour y revenir une fois le scénario bouclé (comptez 10 à 12 heures).
Le titre est néanmoins plombé par une maniabilité de tank, et surtout, une concurrence féroce sur son créneau, concurrence face à laquelle ses arguments seront assez pauvres. À moins de rechercher, justement, une expérience à l’ancienne, dépouillée des effets visant à moderniser ce genre vieux comme le jeu vidéo !


