Castle of Hearts n’a pas une histoire des plus joyeuses. Présenté il y a quelques mois pour une sortie sur Nintendo Switch en mars dernier, le jeu a reçu à sa sortie un accueil critique des plus mitigés. En effet, le titre de 7Levels Games n’a pas réussi à convaincre ni les joueurs, ni la presse mais bon, autant reconnaître qu’il n’est pas bien difficile de foirer avec un genre aussi codifié que celui de l’action-plateforme (n’est-ce pas Mighty N°9 ?). L’équipe en charge du développement s’est donc remise derrière les écrans et a modifié un peu plus son titre via une salve de correctifs en tous genres. Et c’est dans ce contexte que nous le découvrons. Alors, sous ses traits nouveaux et avec un regard neuf, Castle of Hearts a-t-il de quoi faire fondre nos cœurs de pierre ?
Castle of Hearts – Gravé dans la roche de la médiocrité
Parti sur de mauvaises fondations
Castle of Hearts est un jeu d’action-plateforme qui se veut classique avec un petit twist. Jusque là, classique il l’est, trop peut-être même ? Le titre vous met en scène dans le rôle d’un chevalier dont le village est attaqué par un sombre sorcier. N’écoutant que son cœur, il s’oppose à ce dernier alors qu’il change le village en pierre. Sentant sa belle en danger, il plonge tel un héro de film américain pour prendre le coup à sa place et est à son tour changé en pierre. Alors que les larmes de son aimée touchent le corps inerte du valeureux chevalier, un dernier sursaut l’active. Mais la femme n’est déjà plus là, emportée par le mage pour être enfermée dans ses cachots. Notre téméraire anonyme va donc braver hordes de corps possédés et monstres afin de récupérer sa belle et mettre fin aux agissements du sombre mage.
Cliché n’est-ce pas ? Difficile aujourd’hui d’accepter un scénario de sauvetage de demoiselle pour une nouvelle licence. Autant cela reste sujet à critique dans l’univers de Mario (et même eux font des efforts quand on regarde Super Mario 3D World…), autant une nouvelle licence comme celle-ci qui part sur ce postulat de base, il ne lui manquait qu’un commentaire sexiste de la part des scénaristes pour en rajouter une couche. Un peu de l’ordre de : « lui plaçant un balai entre les mains, l’ignoble sorcier s’empara de la demoiselle afin qu’elle fasse le ménage dans ses donjons ». « Bon ben au peut peut-être se sentir mal pour le héros alors ? ». Même pas, il est là le problème ! Outre son look inspiré par le héros de Dark Souls, on ne peut même pas s’attacher à lui tant son charisme est inexistant. Ils n’e lui ont même pas donné un nom, en plus… Bref, ce n’est clairement pas le scénario du siècle.
Un gameplay érodé
Partir en croisade contre un mage noir n’est pas chose aisée mais notre preux héros a quand même quelques outils intéressants dans son arsenal. En plus de son épée, il peut récupérer sur le corps de ses adversaires tombés, des armes secondaires ainsi que des objets de lancer pour se défendre. Ratissant large en partant des lances et arbalètes en passant par poignards, bombes et autres joyeusetés, tout est disponible à la pression d’un simple bouton. Les armes secondaires seront donc à privilégier en fonction de l’adversaire ou du contexte. Cependant rien ne vaut l’arbalète afin de déclencher les pièges qui vous étaient destinés à la figure de vos ennemis. Afin d’esquiver les coups, une touche est mise à votre contribution pour faire de belles roulades. Tout ça serait très bien si l’animation ne durait pas 10 plombes et si ça permettait effectivement de ne pas subir de dégâts.
Les phases de combat sont justes frustrantes, vous traversez les hordes d’ennemis en martelant les boutons sans jamais vraiment ni réfléchir, ni vous investir. Enfin, ça c’est en mode facile, une fois le cap du mode moyen dépassé, les ennemis deviennent des tanks de RPG avec résistance contre les coups et vous rendent la sauce au centuple, chacun de leurs coups rasant un bon gros morceau de votre vie qui ne cesse d’ailleurs de diminuer. Les boss sont plutôt solides, vous incitant à sautiller autour d’eux et profiter de leurs faiblesses à gros coups d’arme secondaire et de projectiles pour garder le plus de distance possible entre eux et vous.
Autour de ces dernières figurent des phases de plateforme où notre héros à la souplesse approximative (normal pour une statue) peine à sauter et esquiver les obstacles sur son chemin (fosses et autres pièges à ours). Assaisonnez le tout avec des sections où vous devez vous dépêcher parce qu’un rocher géant ou un véhicule vous poursuit et vous obtenez un cocktail de frustration étalé sur 20 niveaux où le plaisir est une notion relative. Ces mêmes niveaux sont d’ailleurs plutôt longuets et ne sont pas plaisants à parcourir quand vous devez démonter la moindre caisse afin de remplir à nouveau votre jauge de vie qui ne cesse de se vider…
Mentions honorifiques
Bref, c’est malheureux que ce jeu ne soit vraiment pas bon parce qu’on ressent quand même une certaine affection pour le matériau de base. En créant Castle of Hearts, on sent que les développeurs de 7Levels Games avait de bonnes intentions. Voulant proposer une expérience facile d’accès mais au challenge rehaussé, l’équilibre n’a malheureusement pas été trouvé et en résulte frustration et désenchantement, un comble pour une oeuvre où la magie est omniprésente.
Parce que oui, le fait de créer un jeu où le protagoniste est maudit et voit son corps se mutiler au fur et à mesure de sa progression est original, cependant dans l’exécution, ce n’est pas une franche réussite. En effet, votre énergie vitale diminue continuellement et il faut donc passer son temps à chasser des orbes rouges. Si vous ne le faites pas suffisamment, votre bras finira par tomber avant que votre corps ne tombe en miettes. La seule pénalité encourue repose donc dans votre incapacité à utiliser votre arme secondaire. Le bras repousse d’ailleurs de lui-même une fois votre vie récupérée… Aucune incidence sur la partie en somme…
Enfin, les décors comme les mythes dépeints proviennent de pays que nous n’avons pas l’habitude de traiter. Effectivement, on peut difficilement se la péter en se disant que nous connaissons les croyances et traditions des peuples de l’est de l’Europe. En ça, Castle of Hearts est réellement rafraîchissant mais il est difficile d’y plonger plus quand le titre est si peu investi aussi bien dans le fond que dans la forme. De plus, les décors qui pourraient être tellement plus riches sont paresseux et rappellent les graphismes qu’on pouvait retrouver en fin de vie d’une PS1 avec un bon coup de polish d’aujourd’hui.
Conclusion Castle of Hearts
On tient d’abord à exprimer notre point de vue sur le genre. S’il y a bien un genre qui nous sied, c’est celui de l’action-plateforme. Pour ceux qui sont de notre génération, c’était le genre de notre enfance et il a laissé une empreinte très vive. Ce qui nous rend d’autant plus exigeant à son sujet. Castle of Hearts n’est pas bon. C’est sec mais c’est dit. Passons l’éponge sur l’histoire plus clichée qu’une photo de mariage et rappelons-nous que peu d’éléments ne mettent en valeur la trouvaille qui est proposée à nos heures perdues. Oui, le concept de fragmentation aurait été intéressant s’il avait été mieux exploité… Perdre des éléments de son corps une fois votre vie trop basse, oui c’est original, mais son traitement en fait rien de plus qu’un gimmick. Et autour d’un concept sous-exploité, des niveaux génériques, un gameplay arthritique et un sound-design plus pauvre que le Soudan… Castle of Hearts nous a plutôt laissé de marbre.