Capcom, Ubisoft, Nintendo, SEGA… On les connait, tous ces grands noms de l’univers vidéoludique, et on pourrait tous citer à profusion des titres de jeux émanant de ces studios qui auront parsemé notre parcours de gamers au fil des années. Face à ce déploiement de rouleaux compresseurs, il est bien évidemment possible d’évoquer d’autres studios moins monstrueux, mais qui ont su proposer suffisamment de qualité pour se forger une place de choix dans le cœur des joueurs, et PlatinumGames arrive indéniablement en haut du panier.
À quoi pensez-vous quand on vous dit PlatinumGames ? Si les mots « action débridée », « énergie pure » ou encore « efficacité immédiate » vous viennent à l’esprit, alors vous avez en tête le même studio que nous. Un studio qui mérite bien une petite rétrospective, en attendant ses prochaines pépites…
Petite entrée avant de passer au plat principal
PlatinumGames est un studio japonais fondé en 2007, donc pas si vieux que ça comparé aux dinos de l’industrie que sont SEGA ou Nintendo pour ne citer qu’eux. Il est le fruit d’un mix de deux autres studios déjà existants (comportant notamment des anciens de chez Capcom) et a été repéré rapidement par SEGA, qui a signé avec Platinum un accord pour un catalogue de quatre jeux à licence originale exclusive, contrat révisé par la suite pour y ajouter un cinquième titre.
C’est ainsi qu’a débuté l’ascension de PlatinumGames, et ce qui représente sa philosophie de travail : avec la volonté de créer des jeux originaux sans se servir d’un terreau déjà cultivé et en inventant ses propres bêtes de guerre. Un credo basé sur l’unicité que l’entreprise aura cherchée et continue à défendre autant que faire se peut, tout en devant néanmoins se soumettre de loin en loin à la règle des « jeux de commande » utilisant des licences bien connues du public, l’innovation et le désir de créer du neuf ne rencontrant malheureusement pas toujours le succès mérité… Du job alimentaire en somme, à côté de la vraie passion, mais est-ce au détriment de la qualité ? Cet article vient dresser le menu de ce dont nous aura roboré ce studio atypique au fil des années.
- MadWorld (2009, Wii)
Premier essai vidéoludique de PlatinumGames (du moins sous ce nom), MadWorld est également le premier des cinq titres compris dans l’accord avec SEGA. Il avait pris un peu la presse et les joueurs par surprise, à l’époque, car la machine avait une réputation plus ou moins justifiée de console familiale ou conçue pour les jeunes joueurs. Or MadWorld, avec ses graphismes monochromes à la Sin City, son ultra-violence et son personnage jouable muni d’une tronçonneuse rétractable sur le bras, prenait agressivement le contre-pied de ce qui se faisait traditionnellement sur la Wii. Dans ce jeu d’action à la 3ème personne, on incarnait un combattant lancé dans une émission de télé-réalité en pleine ville, dans laquelle il s’agissait de massacrer tous les ennemis lancés à ses trousses. Un jeu qui sera passé sous le nez des réticents à la Wii, et on aimerait bien le revoir sur la petite dernière de Nintendo…
- Infinite Space (2009, DS)
La même année, c’est cette fois à la portable du moment de chez Big N que s’adresse le nouveau Platinum, à savoir Infinite Space. On a alors affaire à un jeu de SF alternant action, exploration, gestion d’un vaisseau… La plupart des commandes se font de manière très point’n click dans l’esprit, avec des actions à sélectionner. Infinite Space se targue notamment d’un mode compétitif à deux joueurs, ainsi que d’une aventure solo aux multiples embranchements incitant le joueur à y revenir une fois le jeu terminé.
- Bayonetta (2009, PS3 et Xbox 360, puis PC, Wii U, PS4, Xbox One, Switch)
Moins intimiste que les deux autre jeux de 2009, car ayant fait le choix judicieux de sortir sur plusieurs machines en même temps sans se restreindre au public du plombier, Bayonetta a contribué à asseoir la notoriété de PlatinumGames auprès d’un plus grand nombre de joueurs. Avec sa sorcière charismatique, son côté sexy sans exagération malvenue, son thème plutôt rare dans un jeu vidéo tournant autour du concept d’anges et de démons (on se souviendra du manga Bastard !!), et surtout, la nervosité de ses combats qui deviendra en quelque sorte la marque de fabrique de la plupart des titres Platinum, Bayonetta est sans contestation un grand beat’em up 3D. D’ailleurs, s’il nous rappellera les affrontements de certains Devil May Cry, c’est parce que Bayonetta émane du même concepteur. Et cette OST…
- Vanquish (2010, PS3 et Xbox 360, puis PC, PS4, Xbox One)
Un an après Bayonetta, PlatinumGames enfonce le clou avec Vanquish, qui se démarque à nouveau de son aîné tout en conservant l’énergie désormais caractéristique du studio. L’aspect beat’em up est toujours un peu présent, mais on a plutôt affaire ici, pour résumer grassement, à du Gears of War-like survitaminé, dans lequel ça fuse dans tous les sens et où les balles perdues ne sont pas perdues pour tout le monde. Conçu par Shinji Mikami (Resident Evil, God Hand, The Evil Within…), le jeu est une bombe de frénésie qui part dans tous les sens, et qui repose notamment surtout sur son concept de glissades boostées par l’armure du personnage. Diablement efficace, l’action à 100 à l’heure épuisante compense la durée de vie souvent jugée assez légère par la critique.
- Anarchy Reigns (2012, PS3 et Xbox 360)
Suite à Bayonetta et Vanquish, les attentes envers le studio japonais étaient très hautes concernant son prochain jeu, et force est de constater que Anarchy Reigns n’a pas rencontré l’engouement de ses prédécesseurs, tant chez la critique que chez les gamers. Suite spirituelle de MadWorld (dont l’une des campagnes solo reprend le personnage principal), Anarchy Reigns permet au joueur d’incarner un éventail de guerriers pour affronter des ennemis dans une sorte de pseudo-open world en mode beat’em up 3D, et inclut un certain nombre de modes multi là où les autres titres de Platinum s’avéraient résolument solo.
- Metal Gear Rising: Revengeance (2013, PS3, Xbox 360, PC, puis Shield)
Libéré de son contrat de cinq jeux le liant à SEGA, Platinum est désormais libre d’aller batifoler où bon lui semble, et c’est Konami (et Kojima) qui recevront l’honneur de voir leur projet de spin-off à Metal Gear orienté action modelé par le turbulent studio japonais, qui paraîtra sous le nom de Metal Gear Rising: Revengeance. On y incarne le cyborg Raiden déjà bien implanté dans la série Metal Gear Solid, quelques années après les événements relatés dans MGS 4. Amateur de fines lames, Raiden bénéficie donc d’un jeu où il va s’agir de trancher à profusion, même si le titre n’omet pas de proposer quelques mécaniques d’infiltration chères à la saga afin d’éviter certains affrontements.
- The Wonderful 101 (2013, Wii U)
Cap sur Big N-world à présent, avec The Wonderful 101, exclu Wii U (oui oui, on vous le confirme, cette machine a bel et bien existé). PlatinumGames sort de son registre nerveux habituel pour pondre un jeu de super-héros en vue isométrique qui n’est pas sans rappeler le fonctionnement de Pikmin, et donc, où il va s’agir d’utiliser au mieux les compétences spéciales de son armada pour venir à bout d’ennemis souvent imposants niveau dimensions. Et si vous trouvez que le design des persos évoque Viewtiful Joe, c’est normal : directeur de projet et producteur avaient tous deux bossé ensemble sur le titre de Capcom (et sur le grand Okami, aussi).
- Bayonetta 2 (2014, Wii U, puis Switch)
Bayonetta 2 fut une grande déception pour un bon paquet de joueurs amoureux du premier opus. Le jeu était-il de moins bon niveau ? Absolument pas, même s’il reprenait dans les grandes largeurs le gameplay du premier volet – après tout, c’est ce qu’on avait tous aimé – et qu’on attendait de le retrouver avec ferveur. Non, la douche froide est venue du choix de la plateforme concernée… Tandis que Bayo 1 avait ravi les joueurs Sony et Microsoft de ses grâces majestueuses, sa suite se voyait cantonnée (via un contrat avec Nintendo) à la seule Wii U, une machine que personne ne possédait. Heureusement, ce petit bijou a connu une seconde vie sur la petite nouvelle de Big N, la Switch, accompagné d’une réédition du premier opus, et de l’annonce plus ou moins vague d’un troisième Bayonetta en projet. Alors switcheurs, n’hésitez plus et plongez corps et âme dans ces deux titres envoûtants et d’un dynamisme unique si vous n’avez pas encore croisé la route de la belle sorcière…
- The Legend of Korra (2014, PC, PS3 et PS4, Xbox 360 et One)
Ce titre est le premier de ce qu’on pourrait qualifier, comme évoqué plus haut, de « jeu de commande », utilisant une licence bien connue (des amateurs de la chaîne Nickelodeon) pour en faire un jeu histoire d’offrir un petit complément aux amateurs de la série animée. C’est un beat’em up à la troisième personne situé dans un univers fictif rappelant la Chine antique et dans lequel certains êtres peuvent manipuler les quatre éléments à leur guise. Les contres sont mis en avant pour répliquer de plus belle ensuite. Sympathique, mais pas du grand Platinum, dirons-nous…
- Transformers: Devastation (2015, PC, PS3 et 4, Xbox 360 et One)
Vous l’aurez compris à son titre, celui-ci est à nouveau un jeu de commande (toujours pour Activision, comme Korra), vous permettant de rejouer la lutte entre Optimus Prime accompagné de ses Autobots, et Megatron assisté de Decepticons et Insecticons en tous genres. Réalisé en cel-shading, le jeu s’avère plutôt plaisant et offre des combats intenses à la Bayonetta, dans lesquels esquiver de justesse vous procurera une animation ralentie vous permettant d’en mettre plein le museau aux ennemis avant que le défilement du temps ne reprenne son cours (avec transformations bien utiles au menu, of course). Fun !
- 8-bit Bayonetta (2015, navigateurs)
8-bit Bayonetta est un petit jeu pour browser tout simple, dans lequel vous incarnez soi-disant la sorcière à lunettes, et, immobile à part la possibilité de sauter et tirer, vous devez repousser des hordes d’ennemis soit volants, soit marchants. Un petit jeu passe-temps de scoring, qui ne paie pas de mine et que l’on trouve sur un lien de page 404 du développeur. Voici de quoi vous y essayer. N’hésitez pas à nous donner vos scores en commentaire !
- Star Fox Zero / Guard (2016, Wii U)
Développé en partenariat avec Nintendo, Star Fox Zero constitue le sixième volet de la saga dédiée à Fox McCloud, et on lui a reproché sa trop grande similitude avec ses ancêtres en termes de gameplay. Il s’agit d’un shooter spatial tel qu’on les connaissait et aimait (notamment sur N64), et il offre la possibilité de switcher entre plusieurs véhicules en plus du célèbre vaisseau volant.
Fun fact : le jeu a connu un opus bonus, livré en bundle avec la version physique, mais aussi en téléchargement sur la version numérique : Star Fox Guard. Un tower defense.
- Teenage Mutant Ninja Turtles: Mutants in Manhattan (2016, PS3 et 4, Xbox 360 et One, PC)
Encore un jeu de commande par Activision, avec de nouveau les personnages issus d’une série de Nickelodeon. On y retrouve nos quatre chevaliers d’écaille dans un beat’em up 3D conventionnel en cel-shading, mais efficace car platinumien, dans lequel on affronte toute la bande de vilains de la série (Shredder, Krang, Bebop, Rocksteady, etc.) avec la possibilité de faire évoluer sa tortue fétiche. Comme pour les autres jeux dits « de commande » : bien, mais pas top. Heureusement, à nouveau, que la patte PlatinumGames sauve les meubles grâce à son gameplay pitch-perfect.
- NieR: Automata (2017, PS4, PC, puis XWbox One)
Automata aura contribué à replacer sur le devant de la scène la licence trop méconnue NieR, elle-même spin-off de la série elle aussi trop méconnue Drakengard. Il s’agit là d’un RPG mâtiné d’action qui laisse, Platinum oblige, la part belle aux combats, que ce soit au corps à corps ou via des armes à feu. On y incarne une cyborg de combat (coucou Battle Angel Alita) et son compagnon de route, et on évolue dans un univers grisant et attachant. Certainement une des plus grosses réussites du studio, ainsi que de l’année qui l’a vu paraître.
- World of Demons (2018, mobiles iOS)
Une étrange incursion de PlatinumGames sur mobile. Non pas étrange de par la teneur du jeu (qui, en partenariat avec le grand DeNA, tend à associer l’énergie des combats made in Platinum avec le gameplay tactile, le tout dans un univers japonais empli de démons et de samouraïs), mais de par le choix du support ainsi que de par l’exclusivité iOS là où une masse d’utilisateurs Android aurait pu apporter un beau gain de popularité au jeu.
- Astral Chain (2019, Switch)
Encore une exclu pour la console en rouge, et merci mon chien pour la console en bleu et la console en vert. Astral Chain se situe dans un futur proche, un contexte un peu cyberpunk dans lequel le joueur incarne un officier de police. Enquêtes, interrogatoires et scènes d’action seront au menu, et le joueur sera assisté d’entités appelées Legion, dotées chacune de capacités propres (on pensera aux Stands de la série JoJo’s Bizarre Adventure, un peu). Cela va sans dire : affrontements dantesques et action débridée sont au programme du petit dernier de chez Platinum.
Et après ?
On l’a vu, PlatinumGames aura souvent créé la surprise (pas toujours agréable) concernant ses choix de partenariats et d’exclusivités, là où le groupe aurait probablement pu se paver une route de succès global de par ses talents et l’énergie incontournable dégagée par chacun de ses titres. Donc là, début 2020, on en est où ? Il y a tout d’abord eu l’annulation d’un projet de longue haleine en 2017, un partenariat avec Microsoft qui devait aboutir sur une exclusivité PC et Xbox One. Un jeu d’action mâtiné d’éléments RPG dans lequel le joueur, en vue à la troisième personne, était accompagné d’un puissant dragon (qui a dit Drakengard ?). Scalebound, c’est son nom, ne verra jamais le jour.
Platinum s’est également retiré du développement de l’adaptation de Granblue Fantasy: Relink, provenant d’un jeu mobile à gatcha. Il ne nous reste donc plus qu’à prier pour l’avènement prochain de Bayonetta 3, dont le développement avait été annoncé lors des Game Awards 2017 en même temps que la venue des deux premiers opus sur Switch. D’autres projets ont été évoqués de temps en temps, tels que le médiéval Babylon’s Fall ou l’énigmatique Lost Order (qui serait lui aussi orienté mobile).
Gageons que cette nouvelle année nous en apprendra plus sur les projets de PlatinumGames, un studio jouissif et terriblement accrocheur à qui l’on souhaite le meilleur possible pour la décennie 2020, que l’on espère calquée sur le modèle des années 2010. Certains membres du groupe nous promettaient il y a quelques mois un jeu à venir qui « transcenderait le style action ». Les connaissant, ils en sont bien capables, alors patientons…