L’OMS ajoute l’addiction aux jeux vidéo à sa nouvelle classification internationale des maladies.
Courez et pleurez ! Nathanaël de Rincquesen avait essayé de nous prévenir, mais nous étions trop occupés à nous moquer de sa prononciation du nom barbare qui désigne les jeux de rôle en ligne auxquels on prend part avec des compagnons virtuels pour écouter le message qu’il voulait nous envoyer. Plus sérieusement, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) a officiellement reconnu, le 18 juin 2018, l’addiction aux jeux vidéo, comme maladie. Une décision qui divise.
Ce n’est pas la première fois que le jeu vidéo est pointé du doigt. Il suffit d’un fait divers pour que revienne le fameux refrain « les jeux vidéo rendent violents » et quelques clichés ayant la peau dure pour convaincre le tout-venant que le jeu vidéo rend accro. De l’autre côté, les joueurs et éditeurs se défendent et alors s’organise une levée de boucliers avec des arguments plus ou moins sérieux (le fameux « je joue à Mario, pourtant je ne saute pas sur des tortues »). Mais si jusqu’ici les effets néfastes des jeux vidéo étaient sujets à caution pour cause d’absence de consensus scientifique, la décision de l’OMS pourrait changer la donne.
L’OMS précise que l’inclusion du trouble du jeu vidéo dans la 11e révision de la Classification Internationale des Maladies (CIM-11 pour les intimes) repose sur l’analyse de diverses données factuelles et l’élaboration de programmes de traitement prescrits à travers le monde à des patients présentant des signes de la pathologie. L’organisation ajoute que le trouble du jeu vidéo concerne une frange très réduite de la communauté des joueurs (on l’estime à 2 à 3%). Ne sont considérés comme atteints que ceux qui « perdent le contrôle sur le jeu » et accordent une place trop importante aux jeux vidéo, au point d’en délaisser toute autre activité. Vous l’aurez compris, le trouble concerne plus les Nolife que les Hardcore Gamers passionnés.
Cependant, en dépit des nuances apportées par l’OMS, il n’en reste pas moins que le jeu vidéo se retrouve classé au rang des produits potentiellement addictifs, avec la drogue et l’alcool. Cela signifie qu’on pourrait, dans un avenir proche, se retrouver avec des recommandations « jouer aux jeux vidéo peut rendre accro » sur les boîtiers de nos jeux, à l’instar des paquets de tabac, ou dans les pubs. Enfin, se pose la question de la raison pour laquelle certains joueurs deviennent dépendants aux jeux vidéo. Et si en vérité, le jeu vidéo n’était pas foncièrement le problème, mais constituait une échappatoire pour ceux qui ressentent le besoin de s’exiler vers un lieu imaginaire dans lequel ils ont un contrôle sur les événements ? Et si l’addiction était le symptôme d’un malaise plus profond ?
Sans pour autant nier le problème, c’est avec beaucoup de perplexité que nous accueillons cette décision de l’OMS. Le jeu vidéo est devenu au fil des ans un média culturel comme un autre, à l’image du cinéma. Mais il semble qu’il continue de faire peur au grand public, car si s’enfermer dans ses lectures, films et séries ne constitue pas une addiction, s’enfermer dans ses jeux vidéo en est une, officiellement.