Gran Turismo vs. Forza Motorsport, le duel que tout oppose
Face à Sony en perte de vitesse, Microsoft met pied au plancher !
Parce que la passion pour la course automobile ne se vit pas seulement dans les gradins d’un circuit, devant un grand prix ou un rallye à la TV, et encore moins au volant de sa voiture de tous les jours, il existe heureusement de nombreuses possibilités pour prendre du plaisir à jouer au pilote, sur console. Evolution technologique oblige (et on ne s’en plaindra pas bien sûr) les simulations de course se font moins rares, avec des titres comme Assetto Corsa, Drive Club ou encore Project CARS, et surtout de plus en plus réalistes. À tel point que les vrais pilotes n’hésitent plus aujourd’hui à user de ces softs pour perfectionner leurs trajectoires ou faire des reconnaissances de pistes. Et il y en a pour tous les goûts : les amoureux des terrains accidentés, poussiéreux ou enneigés, sont désormais quasiment aussi bien lotis que les inconditionnels de l’asphalte, avec notamment des titres comme Dirt Rally, ou WRC 6. Mais en ce qui nous concerne, penchons nous plutôt sur le cas de la course auto sur piste goudronnée. Les amateurs du genre ne contesteront surement pas l’hégémonie de deux titres phares de la course automobile, j’ai nommé : Gran Turismo et Forza Motorsport. À l’approche des fêtes, vous serez peut-être tenté d’en placer un sous le sapin, c’est pourquoi New Game Plus fait le point sur ce duel.
Remontons un peu le temps…
Historiquement les deux licences n’ont strictement rien à voir. Le tout premier opus de Forza Motorsport remonte à « seulement » 11 ans, avec une date de sortie exacte remontant au 13 mai 2005 en Europe, sur la toute première Xbox. À l’époque déjà, le duel était inégal (j’ai dis » déjà » ? Attendez la suite) puisque le bébé de Turn10 Studios se frottait au… 4ème opus de Gran Turismo ! En effet, la licence Gran Turismo s’apprête cette année à souffler ses 19 bougies (le titre étant sorti le 23 décembre 1997 au Japon). Et à ce titre, je ne peux pas remonter si loin dans le passé sans évoquer cet agréable souvenir, lorsqu’en 1998, je recevais ma tout première console, la PlayStation 1, avec ce fameux Gran Turismo. Un titre qui semble bien désuet à l’heure où ces lignes sont rédigées mais qui m’aura incontestablement marqué à vie tant le nombre d’heures passées dessus fut important. Que dire de l’intro du jeu, que je me dois de partager, et qui est encore aujourd’hui capable de donner des frissons. La nostalgie est bel et bien là.
Revenons-en à nos moutons, en termes de carrière, Forza Motorsport fait pâle figure. Car la licence créée par le studio japonais Polyphony Digital en 1997, a véritablement révolutionné le jeu de course, et lancé une mode : celle des simulations automobiles sur console. Le « The Real Driving Simulator » sous le logo du jeu était là pour le rappeler. Avec près de 11 millions d’exemplaires vendus dans le monde pour ce premier opus, c’est autant de joueurs qui ont bataillé pendant des heures face à une IA rageuse pour l’époque, sur des circuits fictifs aux graphismes incroyables compte tenu de la technique disponible fin des années 90. Sony avait frappé un grand coup et enterré comme il faut la concurrence très typée arcade, telle que Test Drive 5, TOCA 2 Touring Cars, Ridge Racer, ou encore SEGA Rally 2.
Avec Forza Motorsport 1 lancé en 2005 donc, Microsoft entendait bien ne pas laisser son concurrent Sony continuer à se tailler la part du lion. La firme de Redmont comptait même faire de Forza Motorsport l’un des porte-étendards de la gamme Xbox. Les deux jeux entrent alors en concurrence frontale et c’est justement cet affrontement direct qui a assuré une belle popularité à Forza. En effet, la « guerre des consoles » entretenue par les fans a permis de soutenir le jeu au-delà des attentes. Ainsi, le premier opus de la licence Forza s’est assuré un peu plus d’un million de ventes, une belle performance, mais qui n’avait pas encore de quoi effrayer Sony et Polyphony Digital.
Aujourd’hui le constat est tout autre, alarmant même pour Sony, qui a d’ailleurs « oublié » pendant un certain temps de publier les chiffres de ventes de son dernier Gran Turismo, vendu à seulement 2,3 millions d’exemplaires. Quand on sait que le 4ème opus de GT s’est vendu à près de 12 millions d’exemplaires et le 5ème à quasiment 11 millions, la compta a dû voir rouge ! Pendant ce temps, chez Microsoft, on savoure doucement mais surement la montée en puissance de la licence Forza. Les chiffres de ventes de Forza Motorsport 6 n’ont pas été dévoilés, mais on sait que le jeu a trusté le charts Xbox One pendant plusieurs semaines et que les ventes cumulées de Forza Motorsport 5 et Forza Horizon 2 dépassaient les 7 millions de copies.
Parlons graphismes
L’affrontement actuellement en cours dans les rayons oppose Forza Motorsport 6 à Gran Turismo 6. Le duel est toujours inégal entre les deux titres, mais la tendance s’est complètement inversée, du moins en ce qui concerne les graphismes. Car aussi incroyable que cela puisse paraître, la licence estampillée Sony est aujourd’hui très nettement en retard. Sorti sur PlayStation 3 en 2013, Gran Turismo 6 doit se contenter des « piètres » performances d’une console ancienne génération, quand son rival, lui, profite pleinement de ce qui se fait de mieux sur une console dernière génération, à savoir la Xbox One. D’autant plus que les développeurs de chez Turn10 ont, eux, mis le paquet depuis 2013 et la sortie de Forza Motorsport 5. Pour assurer une expérience optimale, ces derniers sont repartis de zéro et ont remodélisé l’ensemble des circuits et des nouvelles voitures, sans aucun recyclage issu d’un précédent épisode. Objectif annoncé : mettre une claque à la concurrence.
Personne ne pourra nier que les circuits présents dans les deux derniers Forza Motorsport sont modélisés à la perfection. Les pistes de SPA et Silverstone en sont les parfaits exemples. Et que dire des voitures… Rarement un jeu ne leur avait si bien rendu honneur, que ce soit au niveau de la carrosserie, du moteur ou de l’habitacle, le travail effectué est ici remarquable. De vrais bijoux. L’ensemble, couplé au surplus de puissance offert par la Xbox One (comparé à une PS3 ou Xbox 360) permet une très nette amélioration des rendus pour tout ce qui concerne les effets de lumière comme les reflets ou les éblouissements, à ajouter bien sûr aux environnements extérieurs et au public présent sur les circuits de très bonne facture également.
Et même si les développeurs de GT6 ont largement travaillé sur la gestion des conditions climatiques, Forza Motorsport 6 offre un tel spectacle lors des courses sous la pluie que Gran Turismo ne peut lutter. La piste détrempée, les bourrasques de vent et de pluie bien visibles, les flaques d’eau qui impactent directement la conduite, l’ensemble apporte un réalisme certain.
Attention, il ne s’agit pas ici de dire que Gran Turismo 6 est totalement raté. Juste qu’il ne bénéficie malheureusement pas des avancées techniques et graphiques que lui aurait permis une sortie sur console next-gen (ce qui aurait été logique par ailleurs, puisque la PlayStation 4 était déjà en place lors de sa sortie, mais c’est une autre histoire). Visuellement, tout n’est donc pas mauvais dans le dernier Gran Turismo. La production de Polyphony sait tirer son épingle du jeu notamment par un aspect qui manque cruellement à Forza : la présence d’un cycle jour/nuit évolutif. Mieux, GT6 inclut un système de simulation astronomique permettant de rouler sous un ciel étoilé du plus bel effet.
Et alors que ce dossier arrivait à son terme, le PlayStation Experience 2016 nous a livré un trailer de Gran Turismo Sport plein de promesses, graphiquement parlant tout du moins. Le titre, attendu pour cette fin d’année et finalement reporté à un vague « 2017 », semble rattraper son retard et enfin exploiter tout le potentiel de la génération de console actuelle, mais il faudra encore patienter un bon moment, laissant à la concurrence tout le loisir d’occuper le marché.
Bref, vous l’aurez compris, du point de vue graphismes, Forza Motorsport 6 l’emporte largement sur un GT6 en retard d’une génération.
Et la simulation dans tout ça ?
La pierre angulaire de ces deux titre est bel est bien la volonté de s’inscrire comme des jeux typés simulation de course. Il était donc indispensable d’aborder ce sujet, d’autant que cet aspect simulation est sans aucun doute celui qui divise le plus les fans. D’aucuns diront que l’un est plus abouti, plus réaliste que l’autre, et inversement.
Parfois décrié pour son côté plus arcade que dans les précédents opus, Gran Turismo 6 tend à s’approcher d’une véritable simulation seulement lorsque toutes les aides à la conduites sont désactivées. Est-ce là ce que l’on attend d’un jeu de simulation de course ? Non. Mais il faut pourtant bien s’en contenter. L’expérience de jeu s’en retrouve nettement bonifiée lorsque l’on dispose d’un système volant/pédales, malheureusement pas toujours à la portée de toutes les bourses, alors qu’à la manette, l’expérience pourrait être qualifiée de passable. Dommage. Une fois équipé du combo de pilote professionnel, l’aspect simulation prend alors tout son sens, aidé par un système de retour de force faisant toujours son effet. Mais attention, nous sommes encore loin de la perfection ! Nombreux sont les joueurs déçus par une impression de vitesse moindre ou par une balance de poids quasi inexistante, visible surtout en vue externe et donnant l’impression que les voitures se déplacent sur des rails, sans transfert de masse. Un défaut qui entache considérablement l’expérience des puristes.
Aussi, GT6 ne marque pas par son aspect sensationnel. En effet, on aurait vite fait, dès les premières heures de jeu, de reprocher à la conduite de manquer de mordant, de peps. Pour prendre davantage de plaisir, il faut être patient et attendre de débloquer les modèles plus puissants. Un bon point pour certains, mais trop frustrant pour d’autres.
Du côté de chez Microsoft, on est très proche de la réalité au niveau des véhicules et circuits, mais en ce qui concerne la conduite, c’est une autre histoire. Car même si force est de constater que le système de conduite s’est nettement amélioré au fil des épisodes Forza, sa génétique de jeu typé arcade lui colle encore un peu trop à la jaquette. La volonté des développeurs va dans la bonne direction, mais la conduite reste encore bien trop permissive pour être considérée comme une simulation. Là encore, pour profiter d’une expérience un peu plus immersive, il faudra passer par la case désactivation des aides au pilotage et troquer la manette pour un volant. En revanche, Forza Motorsport 6 brille là où son rival peine. Prenez donc un bon gros Ford F150 Raptor 2017, posez-le sur circuit, et voyez comment les comportements du véhicule tels que le transfert de poids se ressentent davantage. Ajoutez à cela une sensation de vitesse bien maîtrisée et vous obtiendrez quand même d’agréables moments de conduite, sans avoir besoin d’être aussi rigoureux que derrière un véritable volant. Aussi, la saga Forza accorde de l’importance à la gestion des dégâts. Celle-ci n’est certainement pas exempte de reproches, mais bien là, face à un Gran Turismo qui n’en n’a que faire. Et c’est bien dommage, car le monde de la course automobile n’est pas tout rose, on aime parfois jouer des coudes, ou plutôt des ailes et pare-chocs, avec l’adversaire pour montrer qui est le patron, d’autant plus face à des IA qui ne maîtrisent pas toujours le règlement en vigueur lors d’une course (cela vaut pour les deux titres). Une simulation se doit de prendre en compte ce détail et pour le moment cela ne semble pas être le cas chez Polyphony Digital.
Et parce que la simulation ne passe pas que par la conduite, je me dois d’aborder un dernier point : celui de l’ambiance sonore. Gran Turismo 6 affiche un retard conséquent en matière de sonorités moteur face à un Forza Motorsport 6 juste grandiose.
De ce fait, l’écart se resserre. Il faudra donc faire un choix entre un Forza Motorsport 6 encore un peu trop typé arcade même si la progression d’épisode en épisode est bien là, et un Gran Turismo 6 clairement plus orienté simulation mais parfois trop aseptisé et surtout en retard sur de nombreux points. Ce choix ne dépendra que de vous et de vos attentes.
Quel avenir pour les deux licences ?
Difficile à prédire. Alors que chez Sony et Polyphony Digital on accuse les retards, Microsoft profite d’un modèle de production bien rodé et parfaitement intégré à l’écosystème des développeurs maison. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : sur la Xbox One, ce ne sont pas moins de quatre épisodes Forza qui ont vu le jour (Forza Motorsport 5, Forza Horizon 2, Forza Motorsports 6 et Forza Horizon 3), chacun avec un niveau de finition en constante hausse quand le premier Gran Turismo sur console nouvelle génération se fait encore attendre. À peine avons-nous eu droit à un trailer lors du PlayStation Experience 2016 qui se déroulait il y a quelques jours, sans toutefois pouvoir mettre une date sur ce Gran Turismo Sport. Ne parlons pas d’un véritable GT7…
Mais la licence Forza dispose d’un avantage indéniable. En effet, celle-ci repose sur un accès direct et en avant-première à de nombreuses technologies développées pour la Xbox One avant que les autres ne les voient. Elle partage également des parties de code avec d’autres studios comme 343 à qui on doit Halo, ou The Coalition (Gears of War 4). Un partage judicieux qui apporte un fort avantage technique surtout dans le domaine de l’automobile, où la fluidité de l’affichage est essentielle, et qui lui permet également d’exceller dans les domaines du son et des graphismes, et ce même à un rythme de production intensif. Il y a donc fort à parier que le rythme de sortie reste le même chez Microsoft.
Le constructeur nippon, conscient de son retard, a recruté en avril 2015 un tout nouvel ingénieur pour prendre en charge l’ambiance sonore des prochains Gran Turismo. Et devinez quoi, il s’agit de Mike Caveziel, un des anciens directeurs du son de chez Turn 10. L’environnement sonore devrait donc évoluer dans le positif.
Le match se resserre donc petit à petit entre Microsoft et Sony, et à moins que Gran Turismo Sport réussisse à gommer tous les points noirs des opus précédents, on imagine bien le duel se resserrer encore davantage face à un prochain… Forza Motorsport 7 ? Quoi qu’il en soit, si les deux licences souhaitent se faire un nom (pour Forza), ou le garder (pour GT), dans le domaine de la simulation de course automobile, ils auront fort à faire face à des concurrents particulièrement redoutables tels qu’Assetto Corsa, Project Cars et autres…