La collaboration alliant Pokémon et Hatsune Miku, Project Voltage, touche à son terme avec la sortie du dernier morceau, « Glorious Day ». Le morceau est produit par Eve, compositeur connu pour son travail sur des génériques pour des séries d’animation japonaise comme Jujutsu Kaisen. Ce morceau est la dernière sortie d’une série de dix-huit titres, composés par divers créateurs appelés par Crypton Future Media et The Pokémon Company.
Pour rappel, la collaboration s’est articulée sur deux temps : d’abord, ce sont des images qui ont été créées, imaginant une Miku pour chaque type de Pokémon, puis, ce sont des chansons qui ont été composées à partir de la voix d’Hatsune Miku et des sons tirés des jeux. Il s’agit d’une véritable célébration des communautés créatives permettant le succès des licences, une première pour Pokémon.
Une première, car de prime abord, Hatsune Miku et Pokémon représentent deux visions clairement opposées de la création dérivée. En effet, nous connaissons tous la manière dont Nintendo traite les créateurs indépendants qui touchent un peu trop leurs propriétés intellectuelles. Pokémon ne fait pas exception : les créations de fans sont souvent précaires, elles sont, avec leurs auteurs, souvent la cible des avocats de la firme.
Au contraire, ces créations sont, pour Hatsune Miku, le fondement même de son existence. Suite au succès du personnage, il est facile d’oublier ses origines. Hatsune Miku, c’est d’abord un logiciel de musique, un dessin sur une boîte et une promesse : moyennant quelque deux cents euros, un compositeur peut avoir une chanteuse. Une chanteuse que quiconque peut dessiner, imaginer et créer. Tant qu’il n’est pas question de générer un profit, n’importe qui peut utiliser le personnage de Crypton Future Media.
Project Voltage résulte d’une alliance inattendue entre deux manières d’envisager l’industrie et la propriété intellectuelle. Chaque musicien a été libre d’adapter le personnage et l’univers de Pokémon à ses propres sensibilités : Miku a voyagé dans tous les territoires, endossé tous les rôles dans tous les genres musicaux. Ces artistes n’ont pas été choisis au hasard : pour la plupart, ce sont des compositeurs jouissant d’une popularité durable au sein de la communauté, voire au-delà de celle-ci.
Cependant, ils ne sont pas les seuls à s’être investis dans ces morceaux : pour la plupart des productions, d’ambitieuses vidéos animées ont accompagné leurs sorties, mettant en scène encore d’autres interprétations du personnage dans l’univers des monstres de poche. Dans le cas de Glorious Day, le clip d’animation, produit par des artistes des studios Folium et Kinema Citrus, n’a rien à envier à un générique de série.
Du point de vue artistique, cette collaboration est donc une réussite sur tous les points. Les morceaux produits présentent bien la variété de ce qui est réalisable, que ce soit pour Hatsune Miku ou Pokémon. C’est également un moyen de redorer un peu l’image de The Pokémon Company auprès d’un milieu qui est vu comme une menace par une entreprise qui est arrivée avant que le modèle « UGC » ne prenne d’assaut l’industrie.
Pourtant, aujourd’hui, c’est bien la norme : beaucoup des licences dominantes profitent largement du « User-Generated Content », le contenu créé par les utilisateurs, en l’occurrence ici les joueurs. Ce n’est pas un phénomène qui ne prend d’assaut que le jeu vidéo : les exécutifs comprennent de plus en plus la place prise par ces créations dans la diffusion d’un média.
The Pokémon Company et Crypton Future Media n’en sont d’ailleurs pas à leur première collaboration : bien loin d’internet et de ces créateurs, le festival de la neige de Sapporo, où la diva virtuelle est à l’honneur, a été le théâtre d’une première collaboration en 2020. Celle-ci, plus traditionnelle, voyait Hatsune Miku avec son costume d’hiver de l’année être associés à un Goupix d’Alola sur des produits en vente lors du festival.
Project Voltage, de par sa forme, semble mieux prendre en compte ce qui fait la force de Hatsune Miku afin de proposer une collaboration qui touche un plus large public. Il est certain que l’on s’en souviendra plus. Il est possible, on l’espère en tout cas, que The Pokémon Company et Crypton Future Media tentent à nouveau l’expérience, avec, cette fois-ci pourquoi pas, l’implication de compositeurs internationaux.
Les créations de fans ont un historique complexe, que ce soit en Asie ou par chez nous. Cependant, il semble que ces créations soient de plus en plus vues comme un outil en soi pour les studios. Que ce soit un moyen comme repérer et recruter des talents ou un simple moyen de donner une lourde présence visuelle de sa licence sur les plateformes de création et partage de contenus, ces créations amatrices sont de mieux en mieux tolérées et considérées.
Pour le moment, nous refermons le dossier Project Voltage. The Pokémon Company, au Japon du moins, est actuellement en train de mener une campagne jouant sur la nostalgie des joueurs pour leurs jeux d’enfance. Que ce soit un aveu d’échec ou non sur l’état actuel de la licence, il est facile de penser que Project Voltage s’inscrive, finalement, dans cette démarche : difficile de faire plus nostalgique que la musique d’un jeu d’enfance.
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