[mise à jour du 31/03] Dans un tweet laconique, l’ESA a annoncé que l’E3 2023 était officiellement annulé. Contrairement aux annulations des années précédentes, il n’est nullement fait mention d’un retour l’an prochain. Il se pourrait bien que l’E3 soit définitivement enterré, cette fois… (retrouvez ci-dessous notre article original publié le 29/03)
Depuis plusieurs années, l’E3, historiquement le plus imposant salon du jeu vidéo, connaît un déclin pour diverses raisons. En 2019, Sony a décidé de partir en solo, et de nombreux autres exposants ont montré un désintérêt croissant. Puis, le Covid est arrivé. Il a entraîné l’annulation pure et simple des éditions 2020 et 2022, après une tentative en 2021 de se réinventer avec une édition en distanciel qui n’a pas convaincu. Enfin, pendant cette lente agonie, la concurrence s’est développée, avec Geoff Keighley en principale vedette. Il a su créer de l’attente autour des Game Awards, devenus un rendez-vous incontournable pour ses annonces exclusives, ainsi que le Summer Game Fest qui mange clairement sur les plates-bandes de l’E3 en s’étalant sur tout l’été.
Cette année 2023 marquait le retour en grande pompe de l’E3 en présentiel pour les professionnels, mais aussi pour le public. Pour le plus grand plaisir des joueurs, plusieurs grands acteurs du jeu vidéo avaient confirmé leur soutien et leur présence au salon tels que Xbox et Ubisoft. Malheureusement, très vite, Sony, Nintendo et Microsoft ont décliné et depuis quelques jours, c’est l’hécatombe avec Sega, Level Infinite (filiale de Tencent) et Ubisoft qui annulent à leur tour leur venue. On peut légitimement se demander si cette édition aura finalement bien lieu.
Une mort de l’E3 inévitable ?
Au-delà de la problématique du coût d’être exposant à l’E3, qui était déjà l’argument principal avancé pour expliquer la fuite de certains grands noms du salon, le COVID a eu de nombreuses conséquences sur le rapport qu’entretiennent les entreprises avec le travail à distance, et ce dans tous les domaines. Plutôt mal vu jusqu’ici, aujourd’hui le distanciel s’est énormément démocratisé, et il présente indéniablement de nombreux avantages, autant pour les salariés que pour les éditeurs et constructeurs.
Nintendo a été le précurseur avec ses Nintendo Direct. Aujourd’hui, c’est devenu la norme. Les économies substantielles, le contrôle total sur la forme, l’indépendance, l’absence de stress lié au direct et la liberté totale en matière de timing sont autant de raisons qui expliquent pourquoi il est difficile de revenir en arrière. Le Summer Game Fest se poursuit en ligne pour les acteurs moins imposants de l’industrie du jeu vidéo, tandis que les grands acteurs assument désormais cette complète indépendance, ce qui laisse peu de place au salon de Los Angeles. Il devient donc légitime de penser que la mort définitive de l’E3 est inévitable.
Il serait tout aussi légitime de se questionner sur la place de la presse dans ce nouveau paradigme. L’E3 était un lieu de rencontre entre celle-ci et l’industrie, jouant le rôle de pont entre des acteurs de cette industrie et les joueurs : informations exclusives et complémentaires des conférences, des prises en mains en behind closed doors qui permettaient de dégager de premières impressions. Autant de choses qui permettaient de mesurer et de réguler l’effet hype issu des communications maîtrisées d’éditeurs et de constructeurs pendant leurs prises de parole. Si du côté de l’industrie, la lente mort de l’E3 semble avoir des conséquences toutes relatives, du côté des joueurs, c’est une perte indéniable.