La licence Resident Evil a depuis fort longtemps investi avec plus ou moins de réussite les mondes du grand et du petit écran, et ce pour notre plus grand plaisir et souvent désarroi aussi. On ne reviendra pas sur les longs-métrages de Paul W.S Anderson et consorts, même si certains sont tout à fait potables, mais on parlera ici plus des trois films d’animation sortis par Capcom à partir de 2008.
Cela a commencé avec Resident Evil Degeneration donc, a continué avec Resident Evil Damnation en 2012 pour se terminer en 2017 avec Resident Evil Vendetta, et, oui, tous ces titres sont interchangeables et sans imagination. Inégaux et assez maladroits, ils reprennent les personnages et le background des différents jeux pour nous conter quelques histoires inédites. Léon, Chris, Claire, Ada ou encore Rebecca répondirent présents pour mater quelques menaces bioterroristes.
Depuis ont été annoncées pas mal de choses du côté des adaptations cinématographiques et filmiques de la licence, entre un reboot sur grand écran et une série live produite par Netflix, autant dire que les fans auront quelques bouts de chair à se mettre sous la dent. Mais nous n’en sommes pas encore là, puisqu’aujourd’hui, il va être question non pas d’un film d’animation, mais d’une série d’animation produite pour Netflix par Capcom comprenant quatre épisodes et qui s’intitule Resident Evil: Infinite Darkness.
En 2000, une guerre civile dévastatrice fait rage dans le pays fictif du Penamstan. Les troupes armées américaines sont déployées sur place pour tenter d’apporter une réponse au conflit et de l’apaiser. Malheureusement, les choses ne se passent pas comme prévu et l’escouade d’élite Mad Dogs se retrouve prise au piège dans les ruines de la capitale du pays, alors que les morts semblent revenir à la vie.
En 2006 maintenant, Claire Redfield fait partie d’une ONG appelée Terra Save et est dépêchée au Penamstan pour aider les réfugiés et survivants du conflit. Elle découvre alors de troublantes similitudes entre les événements qui ont eu lieu à Raccoon City en 1998 et ceux survenus au Penamstan. Elle décide ainsi de mener l’enquête pour tenter de découvrir la vérité derrière tout cela.
Léon S. Kenedy est lui au service de la Maison Blanche et plus particulièrement du Président des États-Unis qui lui voue une confiance aveugle depuis qu’il a sauvé sa fille de la secte des Illuminados deux ans auparavant. Alors qu’il se rend à la rencontre du Président à la Maison Blanche, cette dernière se fait attaquer de l’intérieur par des armes biologiques (ou des zombies si vous préférez) et après avoir réglé la situation, non sans aide, il est chargé de découvrir le fin mot de l’histoire et trouver qui est derrière cet assaut.
Le nanar qui se mord la queue
S’il ne fallait qu’un seul mot pour définir le scénario de Resident Evil: Infinite Darkness, ce serait sans aucun doute « prévisible ». Prévisible aussi bien au niveau de son intrigue que du rôle que joue dans cette histoire chaque personnage. On essaie ici de nous proposer une sorte de récit d’espionnage sur fond de complot, lorgnant aussi du côté du film de guerre et du cinéma de genre, sans jamais réussir à faire en sorte que la mayonnaise prenne totalement.
La principale erreur est de nous proposer une intrigue s’étalant sur seulement quatre épisodes de moins de 25 minutes (après avoir retiré de l’équation les génériques de début et de fin) qui se perdent pourtant très vite dans de nombreuses et brouillonnes explications sur les faits relatés. On suit d’un côté Léon, Jason et Shen Mei qui ont pour mission de trouver qui a lancé l’attaque sur la Maison Blanche et d’un autre l’enquête de Claire sur les événements ayant eu lieu au Penamstan. Le souci, c’est que tout est rushé, et même lorsque le récit se pose deux minutes pour respirer, il se perd dans toutes ses sous-intrigues et ses différents arcs.
Le fait est que rien n’est développé comme cela devrait l’être, des thématiques comme celle qui traite du syndrome post-traumatique lié à la guerre ou encore l’expérimentation génétique sur les troupes envoyées au front, ou bien même sur ce qui motive réellement l’antagoniste (le vrai) de cette série. Le fait aussi qu’elle se déroule en 2006 n’aide pas non plus à apprécier pleinement les enjeux qu’elle pose, et ce uniquement parce que l’on sait que tout ce qui est dit, fait ou raconté n’aura aucun réel impact sur la suite des événements puisque cette suite, justement, on la connaît déjà. Et ce n’est pas la petite scène de fin entre Léon et Claire qui va changer quoi que ce soit.
Alors on se contente de suivre une histoire molle du genou, qui jamais ne s’affranchit de son statut de nanar et dont les différents climax ne surprennent à aucun, mais alors à aucun moment. Il y a même de gros soucis de cohérence d’espace et de temps dans le dernier segment qui rendent les événements se déroulant sous nos yeux brouillons et désagréables. Dommage, car il y avait de l’idée, mais il manque bien quelques épisodes à cette série qui se perd trop vite dans un marasme narratif aux dialogues et personnages aussi clichés que faire se peut. Et ce, malgré un troisième épisode d’exposition qui tente de densifier le propos de la série, mais sans là encore prendre le temps de le creuser, car il y a tout simplement trop de nœuds à dénouer, trop de questions auxquelles répondre rapidement pour réussir à apporter une quelconque profondeur à l’ensemble.
Que reste-t-il à sauver alors de ce Resident Evil: Infinite Darkness ? Eh bien, pas grand-chose. Les personnages de Claire et Léon portent plutôt bien l’histoire et on doit avouer que les séquences flashbacks nous ont bien plu, cela nous a même rappelé un long-métrage du nom de Basic d’un certain John Mctierman, même si on est loin de la qualité de ce dernier. Mais voilà, c’est mou, sans intérêt, cela tente de mettre en place un contexte géopolitique avec une sorte de complot mêlant magouilles politiciennes et une société pharmaceutique (trouvée du premier coup) sur fond de création d’armes biologiques et c’est au final tout sauf réussi.
A Plague Tale Infinite
Mais bon, vous vous dites sûrement après avoir lu ce constat plus qu’affligeant que la licence de Capcom n’a jamais brillé de par son scénario et sa qualité d’écriture et vous auriez raison. Sauf qu’ici, c’est bien l’intrigue qui est le cœur même de la série et l’action est souvent reléguée au second plan, ce qui est paradoxal lorsque l’on voit à quel point elle est expédiée. Ainsi, des séquences de bravoure, il y en a, et de belles parfois, mais elles se comptent sur les doigts d’une main et encore.
Outre de la bastonnade contre du zombie classique aussi vite commencée que finie, il n’y a véritablement rien de bien marquant, même si l’un des flashbacks fait mouche notamment de par sa mise en scène nocturne durant laquelle les seules sources lumineuses sont créées par les flammes sortant des canons des armes des soldats. Mais on regrette globalement que la série se montre très sage et essaie trop de se montrer comme un thriller, oubliant que son intrigue décousue n’est pas à la hauteur de la chose.
Néanmoins, une scène en particulier a retenu notre attention et nous a offert le moment le plus jouissif, gore et Resident Evil finalement de la série. Pour ne rien vous spoiler outre mesure, sachez qu’elle se déroule dans un sous-marin et qu’il y est question de rats, de beaucoup de rats même, et qu’ils ont les crocs. Là, on a retrouvé ce côté décomplexé des autres films d’animation adaptés de la saga et surtout un réel élan de mise en scène et une tension réellement palpable.
Aussi, comme dans tout bon Resident Evil, il y a bien un boss de fin qui se dresse sur la route de nos héros. Sans saveur, pas impressionnant pour un sou et totalement claqué au sol, il nous offre un affrontement générique et particulièrement oubliable. On a vu mieux, Capcom a fait mieux et autant dire qu’à aucun moment on ne sent réellement peser sur notre duo une menace insurmontable. Dommage.
Capcom TV Show
Finissons comme il se doit avec la réalisation de Resident Evil: Infinite Darkness. Il n’y a pas grand-chose à en dire, si ce n’est qu’elle n’a clairement pas été faite pour effrayer son auditoire, car à aucun moment on ne ressent de peur ou un autre sentiment s’en rapprochant. Il y a bien un ou deux jumpscares ici et là, mais rien de bien marquant tant on les voit venir à des kilomètres à la ronde. Par contre, oui, c’est plutôt gore et ce n’est donc pas une œuvre que l’on pourrait qualifier de familiale.
La qualité de la synthèse est, quant à elle, à mettre en avant. C’est beau, voire très beau parfois, à la limite du photo-réaliste, et on ne peut que tirer notre chapeau aux équipes de Capcom pour ça. Les faciès sont d’ailleurs assez impressionnants, et si on est encore loin de ce que Square Enix sait nous proposer, Capcom n’a pas à rougir de sa proposition. Cependant, il n’en va pas de même pour les animations des différents personnages, qui sont antinaturelles au possible la plupart du temps et sont même parfois malaisantes. Il y a qu’à voir la démarche de Shen Mei pour s’en convaincre et le souci ici, c’est que dès qu’on le remarque, on ne peut plus penser à autre chose.
Niveau mise en scène, cela souffle le chaud et le froid. C’est la plupart du temps assez banal, voire oubliable, alors que quelquefois, le métrage brille par son esthétisme et sa recherche du plan, et on vous renvoie là encore à la séquence des rats, sorte de mix entre un Alien et A Plague Tale. Et quand on dit métrage, ce n’est pas pour rien, car on peine à comprendre le découpage en épisodes tant il n’apporte rien et casse même le rythme du récit. Aucun clifhanger de fin d’épisode n’est pertinent et de ce fait, il aurait été plus logique d’en faire un film, quitte à rajouter la bonne demi-heure qu’il manque au scénario pour se montrer réellement travaillé.
Resident Evil: Infinite Darkness est une réelle déception. Jamais réellement emballante, intéressante et même amusante, la série se perd dans ses propres contradictions et nous embarque dans un récit d’espionnage des plus grotesques. Si certaines séquences font mouche, il manque autant d’action que de temps à la narration pour nous proposer une histoire travaillée aux thématiques fortes, et pourtant, elles ne sont pas mauvaises du tout.
On se retrouve là avec quatre épisodes qui manquent d’enjeux, de vision et d’ambition et très franchement, on vous conseille de vous jeter sur les films d’animation très imparfaits, mais autrement plus jouissifs, que sur cet essai raté et totalement oubliable.