Connaissez-vous Gal*Gun ? Ne mentez pas, on vous voit au fond avec une petite étincelle dans l’œil. D’abord imaginé comme une blague, ce rail shooter (à la Time Crisis) purement japonais dans l’esprit nous amène à tirer sur des jeunes lycéennes en uniforme avec notre pistolet d’amour à phéromones, et ce pour contrer un phénomène surnaturel amenant ces demoiselles en fleur à nous courir après en permanence. Deux épisodes de la série ayant poussé la blague beaucoup trop loin sont même sortis sur PS4 et Switch, avec Gal*Gun Double Peace et Gal*Gun 2. Et si vous vous demandez pourquoi on parle de ce jeu un peu coquin dans la critique d’un metroidvania tout frais, c’est tout simplement parce que le Gal Guardian: Demon Purge qui nous intéresse aujourd’hui en est un spin-off.
Développé par Inti Creates, à qui l’on doit notamment Bloodstained: Curse of the Moon, Gal Guardians: Demon Purge, disponible sur PlayStation, Xbox, Switch et PC, est un jeu sortant un peu de nulle part. Très discret médiatiquement parlant, son aspect graphique et la richesse apparente de son gameplay ont néanmoins réussi à rendre un certain nombre de joueurs appréciant l’action-aventure en 2D curieux de cette nouvelle expérience. Alors, avec ce statut de titre secondaire d’une blague devenue un peu trop sérieuse pour son propre bien, on est en droit de se demander si finalement, ce Gal Guardian: Demon Purge ne doit pas être ignoré, un peu comme ce vieil oncle qui en est à sa cinquième allusion grivoise dans un dîner de famille ?
(Test de Gal Guardians: Demon Purge sur PS5 réalisée à partir d’une copie commerciale du jeu)
À deux, c’est mieux
Mais que se passe-t-il ? Alors que les deux sœurs Maya et Minobu se rendent comme chaque jour à leur lycée, celui-ci semble avoir été comme aspiré dans une dimension parallèle. À moins que ce ne soit plutôt Kurona la démone qui cherche à prendre possession des lieux pour s’amuser. Heureusement que les deux sœurs se trouvent être des chasseuses de démons. Voilà à peu près tout ce que l’on a besoin de savoir avant de partir à l’aventure dans ce château inspiré, sans vraiment s’en cacher, de Castlevania: Symphony of the Night.
La comparaison s’arrêtera là, car si effectivement, certaines séquences font clairement penser au chef-d’œuvre de Konami, avec par exemple les têtes de méduses flottantes ou même une simili tour de l’horloge, la qualité n’est pas du tout au même niveau. Non pas qu’on ait affaire à un mauvais jeu, mais son statut de spin-off encore plus fauché que les blés se ressent très vite. Les développeurs de Gal Guardian: Demon Purge n’ont d’ailleurs pas eu cette ambition. Une création sans pression qui peut donc permettre de tenter de nouvelles choses, de proposer d’autres mécaniques de gameplay.
On pense en premier lieu ici à l’aspect multijoueur de l’aventure. En effet, il est possible de faire l’intégralité de l’aventure à deux, histoire de repousser encore plus efficacement les vagues de démons présentes. Les protagonistes disposent donc de capacités différentes et complémentaires. Si Minobu aime tirer des coups et est donc spécialisée dans les attaques à distance avec son pistolet, Maya, elle, préfère le corps-à-corps et est donc bien plus efficace en combat rapproché. Et au fur et à mesure de notre progression dans le château, chacune d’elle récupèrera de nouvelles capacités purement offensives, à l’instar des grenades de Minobu, ou de quoi aider pendant les séquences de plateforme, comme la capacité de Maya de créer des appuis en origami.
Une dualité très bien exploitée puisque chacune dispose de fait de ses propres forces et faiblesses, et le placement des ennemis au fur et à mesure de notre ascension dans ce château nous le rappellera régulièrement. Le jeu n’est pas difficile en soi, quoique les différents boss peuvent parfois s’avérer retors, puisque l’on est virtuellement immortel. Alors certes, le titre propose un compteur de vie, mais il nous est apparu comme anecdotique au final. En effet, lorsque l’on joue seul, on peut interchanger à la volée le personnage que l’on souhaite incarner. Chacune ayant sa propre vie et ses propres capacités, il convient de s’adapter à la situation face à nous. Si l’on vient cependant à périr, on dispose d’une unique chance pour sauver notre héroïne, à l’emplacement de son trépas (tiens, tiens, ça ne vous rappelle rien ?). C’est seulement si la seconde sœur meurt en allant sauver la première qu’alors le game over survient, et que l’on se retrouve au dernier point de sauvegarde croisé.
Si l’on ajoute à ce tableau la super attaque disponible une fois la jauge de fierté remplie qui permet d’infliger d’énormes dégâts si le tir atteint sa cible, on pourrait se dire que Gal Guardians: Demon Purge a tout ce qu’il faut pour arriver à exister dans un genre devenu ultra concurrentiel depuis une décennie. Avec un gameplay carré, des capacités à débloquer, un lore original et attachant pour peu que l’on soit réceptif à la proposition initiale et des inspirations prestigieuses, on en viendrait presque à se dire qu’il a tout pour lui. Presque…
Oui, la taille, ça compte
Gal Guardians: Demon Purge propose des mécaniques simples et efficaces, maintes fois éprouvées dans les nombreux autres titres du genre de ces dernières années. Pourtant, on sent ici très vite les limites du jeu qui, s’il fait très bien ce qu’il a à faire, se contente hélas du strict minimum et reste, paradoxalement, beaucoup trop sage et scolaire à notre sens. On est même face à l’un des metroidvanias les plus light qu’il nous ait été donné de voir.
Globalement, le principe d’un metroidvania est de nous plonger dans un environnement assez vaste où de nombreux passages ne s’ouvrent que lorsque l’on a récupéré la compétence idoine, une carte nous aidant généralement à nous repérer. Ici, la carte est absente, inutile même puisque les différentes zones sont riquiquis et indépendantes les unes des autres. Dans Gal Guardians: Demon Purge, on parcourt des niveaux différents, et non un monde organique, ce qui réduit considérablement l’envie et même l’intérêt de l’exploration.
Pourtant, le titre propose bien des capacités permettant de débloquer des accès fermés lors d’un premier passage, mais avec ce cloisonnement de l’univers et, disons-le aussi, la faiblesse générale du level design, on n’a pas vraiment envie de visiter de fond en comble les différents environnements. Il y a bien ces lycéennes perdues à retrouver çà et là, mais leur sauvetage n’ont rien de vraiment motivant, le jeu ne récompensant pas ou très mal les détours et les dangers à affronter qu’ils impliquent. Au-delà de ces collectibles à éventuellement trouver, il n’y a rien à faire à part avancer de manière très linéaire jusqu’au boss nous conférant de nouvelles capacités avant de recommencer dans une zone un peu plus difficile. On n’est jamais vraiment mis en échec, mais la frustration est omniprésente tant on a cet arrière-goût d’inachevé, voire presque de gâchis.
On parcourt donc chaque zone sans déplaisir réel, mais sans folie non plus. Il y a bien les boss qui arrivent tant bien que mal à rehausser l’ensemble, leurs designs et paterns étant cette fois bien plus intéressants à éprouver. Ils représentent même presque le principal intérêt du jeu qui a réussi à s’enfermer dans un conformisme troublant. Alors oui, il y a bien parfois quelques grivoiseries pour nous rappeler son ascendance, mais Gal Guardians: Demon Purge nous donne plus l’impression du petit nouveau du lycée qui ne sait pas trop où se mettre et qui bafouille quelques platitudes gênées quand on lui demande d’où il vient, et ne commence à assumer son héritage que bien plus (trop) tard.
Gal Guardians: Demon Purge est ce que l’on pourrait appeler un metroidvania-light. Il coche quelques cases pour être à peu près considéré comme un titre du genre, avec les classiques capacités à débloquer pour avancer plus efficacement, mais en même temps refuse de se décloisonner comme le ferait un « vrai » metroidvania. Pourtant, avec un univers aussi original et irrévérencieux que celui de Gal*Gun, et avec ses rares idées intéressantes, comme le multijoueur, plutôt bien intégré ici, le titre aurait pu tirer son épingle du jeu.
Mais finalement, tout tombe un peu à plat et on avance sans ressentir grand-chose. Gal Guardians: Demon Purge, s’il n’est pas un mauvais jeu, n’apporte rien ni au jeu vidéo, ni à la série dont il est issu, ni même finalement aux joueurs, et c’est bien là son plus gros problème. En étant trop sages et scolaires à tous les niveaux, les développeurs d’Inti Creates ont à notre sens manqué le coche et ont créé un titre bien trop commun pour subsister par lui-même, et qui en même temps n’assume pas assez ses origines pour être associé à son ascendance. Il peut donc retourner se rhabiller tandis que l’on détournera, sans regrets, le regard.