Ce qui aurait dû être une belle célébration de l’esport en France a tourné au vinaigre. Cette semaine, les arènes d’Evry-Courcouronnes accueillaient deux événements : le Valorant Challengers Day (8 avril) et les LFL Holydays (9 et 10 avril). C’est lors de l’événement Valorant que des violences entre groupes de supporters ont éclaté, menant à la suspension de la structure DVM.
Les matchs joués lors de l’événement comptaient pour la saison régulière du championnat français de Valorant, habituellement joué en ligne. C’est juste avant le match opposant les équipes DVM et JobLife que certains supporters DVM auraient dépassé la limite de la simple joute verbale et en seraient arrivé aux coups selon des témoins sur place.
L’altercation est allée loin : les forces de l’ordre ont dû intervenir, le match a été annulé dans la foulée. Suite à une enquête menée par Webedia, qui organise le championnat, la structure DVM a été suspendue, au moins pour le segment 2 du championnat, qui se terminera le 30 avril.
C’est une première pour un événement esport français dont on aurait bien aimé se passer. Alors que les différentes disciplines esportives se structurent de plus en plus, avec des équipes représentées par des personnalités fortes, les groupes de supporters se forgent une identité marquée, et prennent un rôle important dans l’écosystème : que ce soit les Golden Hornets (Vitality), le Blue Wall (Karmine Corp), les Green Suits (Gentlemates), ou bien d’autres, les groupes de supporters prennent de plus en plus un rôle pouvant rappeler les supporters de foot.
Chants travaillés, organisation autour des événements pour faciliter l’accès aux fans, créations artistiques… et rivalités. Cultivées tant par les structures que par les fans, ces rivalités font en partie le sel de la compétition, et sont globalement sans réelles conséquences : les supporters suivent des limites instaurées par les structures elles-mêmes, et reconnaissent volontiers leur passion commune.
Cependant, que se passe-t-il lorsqu’une structure peine à mettre en place ces limites ? C’est, au premier abord, ce que les observateurs avaient pensé voir avec la situation de ce 8 Avril. La réaction rapide et ferme de Webedia, face aux premiers débordements du genre, semble bienvenue. La sanction, lourde, devrait permettre de remettre les pendules à l’heure et de décourager un autre débordement du genre.
Cela aurait pu s’arrêter là : une sanction exemplaire, pour un débordement rare, qui ne sera jamais répété. Chaque structure et association de fan y est allée de son communiqué pour affirmer « plus jamais », et on aurait pu facilement passer à la suite du programme.
Cependant, la situation est rapidement devenue plus complexe qu’au premier abord. Les supporters DVM ont remis en cause la sanction, affirmant que les témoignages et les vidéos publiées ne rendaient pas compte de la réalité de l’événement. Forcément : l’opinion générale s’est fondée sur les témoignages publiés sur les réseaux sociaux. Des témoignages qui ont, bien entendu, été déformés à mesure qu’ils se sont propagés.
Webedia reste, encore aujourd’hui ferme sur ses positions : Bertrand Amar, responsable de Webedia esport, a expliqué que la sanction n’avait pas été prise suite aux rumeurs des réseaux sociaux. Ce sont bien plusieurs points, avérés, qui ont justifié la sanction. Il rappelle, notamment, qu’une des personnalités impliquée dans les altercations était proche de la direction de la structure, qu’un clip de rap avait été tourné sans autorisation sur les lieux par la suite.
Si Webedia affirme ne pas avoir été influencé par les rumeurs et les déformations de la situation, d’autres ont sauté à pieds joints dedans pour soutenir leur lecture politique. A mesure que l’affaire a pris de l’ampleur, des médias, qui habituellement ne parlent pas de jeu vidéo, se sont emparés de l’événement et en ont profité pour tenir des propos racistes. DVM, avant d’être une structure esport, est un label de rap, qui cultive une image de banlieue.
Il n’en aura pas fallu plus pour certains. Le lien de cause à effet, l’arrivée d’un public différent dans la scène, et des débordements en événement, a été créé, même s’il est faux. S’il est certain que l’esport est un divertissement historiquement représenté par l’image d’Epinal du geek, c’est être bloqué en 2010 que d’affirmer qu’elle s’arrête à cela, les acteurs du milieu et les spectateurs l’ont bien compris en réagissant en conséquence.
En réalité, à mesure que l’esport grandit en France et que les événements spectaculaires se multiplient, il est évident que les acteurs du milieu vont devoir faire face à des situations de plus en plus complexes.
Au vu de la gestion, tant par les équipes que par les organisateurs, de cette crise, on peut espérer que l’esport français saura encore faire face aux enjeux futurs. Une assurance importante lorsqu’on sait que deux événements majeurs arriveront chez nous d’ici la fin de l’année : la finale des championnats du monde de Rocket League à Lyon en septembre, puis l’EVO 2025 à Nice en octobre.
Fortnite – Un mode FPS pour concurrencer Counter Strike et Valorant ?
Bear
Preview Metal Eden – Grisaille maussade et fast-FPS
ElMama
Un syndicat pour l’esport, l’ambition des grands clubs français
DracoSH