Wattam, c’est la dernière curiosité de Keita Takahashi, l’esprit pour le moins original derrière Katamari Damacy. Vous vous souvenez ? Cette grosse boule qu’on fait rouler et qui ramasse, façon boule de neige, tout ce qui se trouve sur son passage, pour finir grosse comme une planète… Avec des antécédents comme Katamari Damacy, mais aussi Nobi Nobi Boy, et des premiers visuels qui nous montraient des cacas colorés qui jouent avec des sushis dans un environnement digne des Teletubbies, on pouvait être à la fois curieux et inquiets. Concept original mais creux, ou “vrai” jeu ?
(Test de Wattam réalisé sur PC avec une copie commerciale du jeu)
Plus on est de fous…
Au début, il n’y avait rien… Enfin, si, un drôle de petit personnage cubique, portant moustache et chapeau melon, désespérément seul. Si seul qu’il passe ses journées à pleurer d’ennui. Jusqu’à ce qu’il s’aperçoive qu’il n’y avait pas tout à fait rien. Un caillou trônait là, pas loin du coin où pleurait Le Maire (c’est le nom du personnage cubique). En s’approchant de la pierre, Le Maire la réveille : ce sera son premier ami ! Et à partir de là, plus rien ne sera pareil…
L’amitié fait boule de neige (l’héritage Katamari), et après ce premier ami, c’est un deuxième, puis un troisième qui vont débarquer, et peu à peu, la petite île du Maire va se repeupler, amenant au passage différentes mécaniques de jeu en forme d’énigmes. Certains nouveaux amis arrivent avec des nouvelles possibilités, permettant de faire évoluer le monde du jeu. Le Maire, déjà, découvrira rapidement le pouvoir de son chapeau, qui explose de joie (il faut le voir pour comprendre !). Puis certains petits amis (gland, pomme de pin…) peuvent se planter pour devenir des arbres qui, en mangeant des objets, peuvent les transformer en fruits. Des fruits que la Bouche se fera un plaisir de digérer pour en faire… des cacas ! Les toilettes se chargent alors des cacas pour en faire autre chose encore… Et tous, arbres, fruits, cacas, toilettes, sont autant de petits habitants du monde de Wattam que le joueur peut (doit) contrôler. Des habitants qui arrivent aussi parfois avec des soucis, que leurs nouveaux amis vont essayer de résoudre.
Tous ensemble, tous ensemble, ouais ! Ouais !
Une fois les principales mécaniques de jeu assimilées, il va falloir essayer de profiter des différentes possibilités offertes par les habitants pour résoudre les problèmes de certains d’entre eux. Wattam se présente alors comme un puzzle game à énigmes. Le problème est souvent exposé via une petite icône à interpréter, puis il s’agit de trouver la ou les mécanique(s) qui nous permettront d’arriver au but. Par exemple, assez rapidement, on rencontrera une quille dorée plutôt fière, qui nous mettra au défi d’être aussi grand qu’elle. Charge à nous de créer assez de cacas dorés (en faisant des fruits avec les arbres, fruits qui seront digérés par la Bouche pour faire des cacas colorés, cacas qui seront recueillis par les toilettes…), cacas dorés qui s’empileront les uns sur les autres jusqu’à atteindre la taille de la quille. “Et voilà !”, comme on dit en anglais.
Les énigmes et les puzzles ne sont jamais trop compliqués, ni à saisir, ni à réaliser. Cependant, le gameplay est suffisamment renouvelé pour conserver notre intérêt. C’est un vrai plaisir de découvrir tous ces petits bonhommes, leurs animations, et les mécaniques de jeu qui y sont associées. Des animations minimalistes, entre les bonhommes « allumettes » et les Mii de chez Nintendo, mais très parlantes et réussies. Et si l’un des messages du jeu, c’est que c’est toujours plus fun quand on joue ensemble, c’est aussi vrai de l’autre côté de l’écran. Ainsi, Wattam sera un jeu parfait pour un moment de jeu vidéo parent-enfant ! L’accessibilité de ses puzzles permettra aux plus jeunes (dès 7 ans) de s’y frotter sans connaître la frustration d’être trop vite et trop souvent bloqué, avec un parent à ses côtés pour le guider lors de rares moments (un peu) plus ardus.
Les contrôles nécessiteront en effet parfois un peu de patience. On contrôle souvent deux personnages à la fois, ce qui rend les manipulations un peu erratiques. Et puis les petites créatures qu’on ne contrôle pas vivent leur vie, rendant irréalisable l’idée de placer un personnage à un endroit précis avant d’aller faire autre chose avec l’un de ses amis : le premier sera parti dès qu’on lui aura laissé un tant soit peu de liberté…
Lucy in the Sky with Diamond
Comme les œuvres précédentes de Keita Takahashi, Wattam vaut presque plus pour la découverte de son concept et de son univers que pour le jeu lui-même. C’est peut-être cependant le titre de Takahashi qui aura le plus en commun avec des jeux disons traditionnels.
C’est aussi une sorte d’album jeunesse interactif, avec ces petits personnages attachants, sa morale sans faille sur l’amitié et l’entraide, et malgré tout, son scénario, qu’on n’a pas encore évoqué, mais qui existe. Il est question d’une époque lointaine, d’une imposante menace pour la planète qui aura poussé tout le monde à fuir. Un mot d’ailleurs sur le sound design très réussi, fait de petits morceaux de musique dominés par le piano, collant bien à l’univers, de babillages infantiles, et autres bruitages de circonstance, comme les prouts ! (bah oui, il est souvent question de caca dans Wattam).
Une fable qui peut être lue aussi sous l’angle très actuel des dangers qui guettent la planète, la nôtre. Catastrophes, guerres, réfugiés climatiques… Le parallèle sera facile à faire. D’ailleurs, sans spoiler, la fin du jeu offre une place plutôt parlante à la planète du jeu. On peut y lire un peu de mysticisme aussi : lee Maire se retrouvera à divers moments de l’aventure à visiter des grottes mystérieuses où lui seront faites, via un parchemin ou un livre, des révélations sur le monde. Certains reconnaîtront d’évidentes scènes religieuses. Étonnant de pouvoir trouver tant de choses dans un jeu qui nous proposait d’abord de jouer avec des cacas roses…!
Enfin, on pourra aussi s’esclaffer devant une œuvre complètement déjantée qui ne sera pas sans rappeler la série d’animation des années 70, Chapi Chapo. Une série surréaliste où deux petits bonhommes sont perdus dans des décors géométriques et vont tenter de résoudre différents problèmes qui se posent à eux. Une série diffusée au milieu des années 70 au fameux générique composé par François de Roubaix, dont les aventures avec le LSD ne sont pas un secret. Wattam aura lui aussi ce côté évidemment trippant.
Wattam est, comme attendu, un jeu à part. On peut néanmoins, et c’est la bonne nouvelle du titre, bien parler de jeu ! Les mécaniques de gameplay sont aussi fun que nombreuses, et le jeu nous propose bel et bien un objectif – ce qui n’est pas toujours le cas dans ces objets vidéoludiques difficilement identifiables. Le jeu est facile, et plutôt court : on en viendra à bout en une à deux partie(s), pour quatre à six heures de jeu. Un peu plus si, comme nous le conseillons, on fait de Wattam une belle aventure de collaboration parent-enfant (ou grand frère – petit frère, et ça marche aussi avec des sœurs). Un jeu court, donc, mais dense : on ne s’ennuiera jamais, on rira beaucoup, et on créera de jolis souvenirs de jeu avec son petit partenaire !