Steins;Gate Elite est le remake du visual novel à succès de 2009. Le premier jeu était sorti sur à peu près tous les supports de l’époque, Xbox 360 d’abord, puis PC, PSP, et a été porté sur iOS, Android et PS Vita. Il fait partie d’une grande famille de visual novels intitulée Science Adventure reconnaissable au ; qui figure dans les titres, comme Steins;Gate ou Chaos;Child.
(test de Steins;Gate Elite réalisé sur Switch via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
« Tu veux ma photo, banane ? »
Steins;Gate raconte les aventures d’un club de jeunes inventeurs basé (évidemment) à Akihabara, qui crée un peu par hasard une machine permettant d’envoyer des messages dans le temps. Bien entendu, on ne joue pas impunément avec le continuum espace-temps (n’est-ce pas, Marty ?), et leur création ne sera pas sans conséquences.
Le Steins;Gate millésime 2009 a reçu un excellent accueil à la fois public et critique, ce qui lui a valu de connaître de multiples adaptations en manga, film et anime. C’est l’anime qui nous intéresse particulièrement aujourd’hui. Diffusée pour la première fois en 2011, la série portée par les studios White Fox compte 24 épisodes et reprend exactement le scénario du jeu. Et c’est en fusionnant l’écriture du jeu originel avec les animations produites pour la série qu’est né Steins;Gate Elite.
Jeu + anime = jeunime ?
En effet, le jeu est rigoureusement le même qu’il y a dix ans, à un petit (un gros !) détail près : le développeur 5pb a travaillé avec les studios White Fox pour découper et faire coller aux textes et dialogues du jeu les animations des 24 épisodes de la série. Ainsi, chaque « diapo » du Steins;Gate original a été remplacée par une scène correspondante du dessin-animé, changeant radicalement l’expérience.
On se retrouve donc face à une œuvre hybride, plus proche de l’anime classique que du jeu, mais avec cette composante narrative au cœur des visual novels : les embranchements et les fins alternatives.
Cependant, l’interactivité reste limitée, et les différents embranchements ne sont pas extrêmement nombreux. À certains points de l’aventure, le héros reçoit des e-mails, auquel il pourra répondre (ou pas). C’est ici (et seulement là) que Steins;Gate devient interactif, puisque c’est le joueur qui prendra la décision de la réponse à apporter, parmi les choix proposés par le jeu. Malheureusement, les réponses sont un peu obscures, et on ne voit pas bien de quelle manière elles vont influencer l’aventure. Alors on répond un peu au hasard, non sans avoir sauvegardé sa progression avant.
Pilote automatique
En termes de gameplay, c’est tout ce que le jeu a à offrir. Et c’est peu. D’autant que ces embranchements sont rares et arrivent tard dans l’aventure (mini-spoiler : le premier choix impactant le scénario n’intervient qu’au chapitre 3, soit après plusieurs heures de jeu…). Nous vous parlions tout récemment de Song of Memories, autre titre appartenant au genre visual novel sorti dernièrement. Song of Memories a su ajouter une vraie composante gameplay dans son système de jeu, sous la forme d’un jeu de rythme.
Certes, c’est un peu artificiel, un peu forcé, mais cela donne une vraie dynamique au titre, qui a également le bon goût de proposer des choix de route au joueur bien plus souvent, et de manière plus transparente. Le manque d’interactivité de Steins;Gate Elite le font se rapprocher de l’épisode interactif Bandersnatch sur Netflix à mesure qu’il s’éloigne d’un jeu.
On passera donc notre temps à presser A pour aller au dialogue suivant. Le jeu dispose aussi d’un mode auto, très bien calibré question temps de lecture, qui transforme encore un peu plus le jeu en anime. On peut carrément poser la manette et profiter de l’histoire ! Comme on peut aussi la zapper : le bouton L permet en effet d’ignorer une scène complète et de passer à la suivante. Pas facile pour suivre le scénario, mais idéal pour arriver jusqu’à un moment clé afin d’emprunter tel ou tel embranchement.
Le menu nous permet enfin d’accéder aux « tips », une longue série d’informations à la fois factuelles et scénaristiques qui permettront d’éclaircir certains points qui pourraient paraître obscurs. On y lira des définitions, des rappels « historiques » ou des renseignements sur l’univers in-game, qui nous aideront à y voir plus clair dans le déroulement des événements, ce qui ne sera pas toujours de trop !
Encore un effort
En effet, on le sait, les histoires de voyages dans le temps sont toujours complexes, avec leurs lots de paradoxes. Ajoutons à cela que le jeu n’est traduit qu’en anglais (les voix japonaises ayant été conservées). Il vous faudra ainsi un bel effort de concentration pour saisir toutes les subtilités de Steins;Gate. D’autant que, et c’est une des très bonnes idées du jeu, ce dernier se base sur des théories scientifiques existantes, et parfois complexes. On assiste d’ailleurs à un cours de physique dans les toutes premières heures de l’aventure ! Le jeu s’approprie aussi le personnage passionnant de John Titor, un voyageur temporel qui a « réellement » existé (en tout cas en dehors de l’univers de Steins;Gate), et qui intervient dans les forums internet du jeu comme il est intervenu sur notre internet de l’an 2000 !
L’autre grande réussite de Steins;Gate Elite avec son scénario, c’est sa patte graphique. Avec du matériel issu de la série, le jeu n’a aucun mal à nous mettre dans l’ambiance « anime » ! On reprochait il y a quelques jours à Song of Memories son manque de mouvement, et il semble que Steins;Gate Elite nous ait entendus ! Toutes les scènes sont en effet animées, et le jeu n’a aucun recours au fameux portrait statique en plan américain qui orne les dialogues de nombreux visual novels et RPGs. Il sera compliqué de retourner à un visual novel plus classique après avoir passé quelques heures avec ces luxueuses animations !
Toujours plus haut beau
Enfin, quelques mots sur le remake, décidément très à la mode ces derniers temps. Après le superbe lissage graphique qui ne touchait pas au gameplay de Lizardcube sur Wonder Boy: The Dragon’s Trap, après le très réussi remake façon « on casse tout et on recommence » de Capcom sur Resident: Evil 2, et sans compter les innombrables (mais beaucoup moins mémorables) « remastered versions », nous voici face à un remake d’un nouveau genre. Probablement bien plus dû à l’opportunité (le dessin-animé existait, il n’y avait qu’à le remonter) qu’à une véritable volonté de proposer une mise à jour du titre ; vu le coût qu’engendrerait une telle production, pas sûr que l’expérience ne se représente à nous de sitôt…! (Notons tout de même que Kadokawa Games a produit un remake live de Root Letter, intitulé Root Letter: Last Answer, mais ce dernier n’a jamais franchi les frontières de l’archipel.)
Voilà étonnamment un visual novel qui s’adresse à tout le monde ! Si vous n’avez jamais tâté du genre, c’est peut-être le titre idéal pour se lancer. En effet, si le gameplay est à l’économie, l’impression est bien réelle d’être devant une série animée interactive. D’autant que son scénario solide et accrocheur saura vous tenir en haleine. C’est d’ailleurs un titre qui peut s’apprécier à plusieurs sur grand écran. Si vous connaissez déjà, et appréciez, le Steins;Gate original, vous le retrouverez ici dans un habit qui met encore plus en valeur ses qualités. Et si vous ne connaissez que la série animée, vous serez probablement excité à l’idée de pouvoir en contrôler le déroulement ! Enfin, si vous êtes allergique au genre visual novel, il y a fort à parier que vous ne soyez pas allé jusque-là dans la lecture de cette critique.
On pourra regretter l’absence de traduction française, mais se satisfaire néanmoins de l’arrivée chez nous, après Song of Memories, d’un titre aussi majeur dans le genre. A noter enfin que la version Switch est livrée avec un deuxième jeu, 8-bit ADV Steins;Gate, spin-off qui reprend les codes des jeux 8 bits ; tandis que la version PS4 contient en bonus l’épisode Steins;Gate: Linear Bounded Phenogram, autre spin-off sorti lui en 2013 sur PlayStation 3, Xbox 360 et PS Vita. Le jeu sort ce 19 février sur PlayStation 4 et Switch, et le lendemain, 20 février, sur PC.